• La mort du cyberflâneur | InternetActu
    http://internetactu.blog.lemonde.fr/2012/04/04/la-mort-du-cyberflaneur

    Superbe article de Xavier de la Porte

    On vient bien, alors, pourquoi la cyberflânerie pouvait être une notion tentante dans les premiers temps du Web. L’idée d’explorer le cyberespace comme un territoire vierge, pas encore colonisé par les états et les entreprises, était romantique ; un romantisme qui se reflétait dans les noms des premiers navigateurs ("Internet explorer", « Netscape Navigator »). Des communautés en ligne comme GeoCities et Tripod étaient les passages numériques de cette époque, vendant les choses les plus étranges et les plus communes, sans aucune forme de hiérarchie tenant à leur popularité ou leur valeur commerciale. Dans ces temps-là, Ebay était plus étrange qu’un marché aux puces ; errer dans ses stands virtuels était plus plaisant qu’y acheter quoi que ce soit. Pendant une brève période, au milieu des années 90, Internet donnait l’impression de permettre une renaissance inattendue de la flânerie.

    [...]

    Il s’est passé la même chose sur Internet. Internet n’est plus un lieu de déambulation – c’est un lieu où l’on agit. Presque plus personne ne surfe sur le Web. La popularité des applications, grâce auxquelles nos téléphones et nos tablettes nous aident à faire ce que nous voulons, sans même avoir à passer par un navigateur et parcourir l’Internet, a rendu la flânerie plus difficile. Le fait qu’une bonne partie de l’activité en ligne tourne autour de l’achat n’aide pas non plus.

    Le tempo du Web contemporain a aussi changé. Il y a dix ans, un concept comme le « web en temps réel » (Twitter, mise à jour des statuts, réponses immédiates, etc.) était impensable. Il est aujourd’hui dans la bouche de toute la Silicon Valley. Ce n’est pas une surprise, les gens aiment la vitesse et l’efficacité. Mais le lent chargement des pages d’antan, avec le bruit bizarre du modem, avait aussi son étrange poésie, qui ouvrait un nouvel espace de jeu et d’interprétation. Parfois même, cette lenteur nous alertait sur le fait qu’on était assis face à un ordinateur. Eh bien cette tortue a disparu.

    #nostalgie #web