De la putain à la maman – Poulet Rotique
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Quand elle est tombée enceinte, l’écrivaine nigérienne Chimamanda Ngozi-Adichie a décidé de ne pas rendre la bonne nouvelle publique. “Je trouve que nous vivons une époque où il est attendu des femmes qu’elles performant la grossesse”, a-t-elle plus tard confié. Après neuf mois de grossesse, je suis en mesure de confirmer. Mais à moins de se replier dans sa grotte pendant toute sa gestation et de réserver au seul livreur de pizza la vue de son ventre rond, impossible de garder secrète une nouvelle qu’on porte sur soi de façon aussi visible. Aussi, dans l’espace public, ma nouvelle condition de femme enceinte m’a fait passer de la putain à la maman : de propriété publique sous prétexte de sa supposée disponibilité, mon corps devenait propriété publique sous prétexte, cette fois, qu’il témoignait en chair et en os de l’incroyaaaaaable miracle de la vie. Et les harceleurs étaient, littéralement, à chaque foutu coin de rue pour me le rappeler. A tout moment, un parfait inconnu pouvait débouler de n’importe quelle intersection pour me faire la leçon sur ma silhouette, mon attitude, mon alimentation, mon poids ou mes fringues. Une sorte de version totalement acceptée socialement du harcèlement de rue tel que je me le fadais jusque là.