J’avoue ne pas trop voir la raison de traiter tout rétif à Internet du nom de cet infâme personnage qu’est « Finkielkraut », ou de réactionnaire. C’est un nouveau point Godwin ?
En l’occurrence, la critique d’Accardo (un coup de gueule, effectivement) fait toujours du bien dans le ron-ron que les thuriféraires de la technique se confectionnent sur le net en claironnant que c’est l’espace de discussion le plus ouvert qu’il ait jamais existé.
Cette question sur le sujet est tout à fait entendable d’un point de vue émancipateur (je suis pas d’accord d’ailleurs), et même centrale pour celles et ceux dont l’horizon révolutionnaire – qui rêvent d’un monde un peu meilleur – ne s’arrête pas à leur(s) écran(s), au dernier gadget numérique ou robotique.
Pourquoi serais-je un, quand je peux être innombrable, pourquoi resterais-je coincé en un lieu, en une classe, en un camp, en un serment, puisque grâce au virtuel je peux être partout, vivre et penser une chose et puis son contraire, ici et ailleurs, sans me soucier de logique, sans me préoccuper de synthèse, de constance ni de fidélité ?
Questions qui recoupent par exemple celles publiées, il y a quelques années, dans un excellent journal (papier) autonome lyonnais, reproduites ici :
▻http://rebellyon.info/Le-web-2-0-ou-l-ere-du-vide.html
Une question plane au dessus de n’importe quel post sur twitter : « what are you doing now ? », « mais putain, qu’est ce que je suis en train de faire là ? ». C’est quoi JE, quelle FACE à JE, ça serait quoi MON ESPACE. On sent monter une pointe d’angoisse. Ce que racontent bien les faux débats où on peut à peu près tout raconter, les embrouilles bizarres sur les forums, les rencontres ambiguës depuis Meetic, c’est qu’Internet a produit cette curieuse possibilité d’une communication sans la présence. Le web : Utopie démocratique, mais également Utopie du Capital. Comme si cette grosse machine à briser les liens (…) avait finit par secréter un monde à son tour, mais un monde virtuel : où les liens n’engagent pas vraiment, où les corps sont absents, où les désirs tournent tristement à vide sur l’écran.
Peut-il y avoir une critique du net sur le net ? Peut-être que non, de la même manière qu’il n’y a jamais pu y avoir de critique de la télévision à la télévision.