• En Tunisie, les autorités continuent de chasser des migrants à la frontière algérienne
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/10/16/en-tunisie-les-autorites-continuent-de-chasser-des-migrants-a-la-frontiere-a

    En Tunisie, les autorités continuent de chasser des migrants à la frontière algérienne
    Par Nissim Gasteli(El-Amra, Tunisie, envoyé spécial)
    Paul-Edouard partage sa vie entre les plantations d’oliviers et le café depuis qu’il a trouvé un semblant de refuge dans une zone rurale en périphérie de la petite bourgade d’El-Amra, avec sa femme et sa fille de 5 ans, après avoir fui les violences anti-migrants qui ont secoué Sfax au début de l’été. Dans ce champ devenu dortoir, il dépose tous les soirs sa couverture au pied d’un arbre, installe son couchage puis s’allonge et s’endort, en attendant qu’un autre jour vienne. Au petit matin, lorsque le tenancier du café mitoyen ouvre son commerce, il migre vers la bâtisse et y passe toute la journée.
    C’est là que Le Monde l’a rencontré, le 9 octobre. Assis à une table, un expresso dans une main, une cigarette dans l’autre, ce Camerounais de 38 ans raconte avoir tenté de rejoindre l’Italie trois semaines plus tôt. Mais après avoir été intercepté en mer par la garde nationale tunisienne, il a été débarqué au port de Sfax puis transporté sur plusieurs centaines de kilomètres par les autorités avant d’être abandonné dans une zone désertique à la frontière algérienne, sans eau, ni nourriture, ni autre forme de procès. Données GPS et photographies à l’appui, il témoigne de ces pratiques que les autorités tunisiennes persistent à nier. Pour protéger son identité et celles des autres personnes interrogées, leurs prénoms ont été modifiés.
    Son récit commence comme celui de n’importe quelle traversée clandestine : sur une plage, de nuit, le départ du rafiot dans l’obscurité, puis devient vite celui de n’importe quelle interception de bâteau clandestin par la garde nationale. Les vagues, le moteur qui coupe, la tension avec les agents, le transbordage sur une vedette. A la mi-journée, Paul-Edouard est débarqué sur le port de Sfax avec 300 autres personnes, selon ses estimations.
    C’est là que les violences ont commencé. « Quand on est arrivés au port de Sfax, on a été tabassés », dit-il, en décrivant les coups portés par les agents des forces de sécurité. Ils sont alors retenus toute la journée sur le quai, « sans avoir à manger ou à boire », leurs téléphones sont confisqués. A la nuit tombée, quatre bus déboulent et les migrants sont forcés de monter à bord, sans connaître leur destination.Ils quittent la ville portuaire, escortés par des véhicules des forces de sécurité – comme le montre une vidéo qu’il a filmée, consultée par Le Monde. « On a roulé jusqu’à 4 heures du matin puis on nous a déposés sur une base de la garde nationale », se souvient-il. L’analyse des données GPS transmises révèle que les bus parcourent près de 300 km jusqu’au Kef, dans le nord-ouest de la Tunisie. Ils sont transférés à l’arrière de pick-up, « chargés comme du bétail », puis déposés quelque part dans la montagne.
    Une fois les Tunisiens partis, les Subsahariens font face aux garde-frontières algériens et comprennent rapidement qu’ils ne sont pas les bienvenus. « On a subi des tirs de sommation de la part de l’armée algérienne qui nous a intimé l’ordre de retourner en Tunisie, affirme Paul-Edouard. On n’avait pas le choix, il y avait des femmes enceintes, des bébés, tout un tas de personnes blessées. On avait faim, on avait soif. Alors on est revenus en Tunisie. » En rebroussant chemin, il tombe sur l’unité qui les a expulsés. « Ils nous arrêtent à nouveau, nous mettent dans les pick-up. Ils nous amènent dans un autre camp. Il est environ 10 heures quand on arrive là-bas.
    Ils passent la journée du 20 septembre enfermés dans ce poste de la garde nationale non loin de Thala, toujours dans la même région de l’Ouest tunisien, en attendant la nuit tombée. Les agents les remettent alors dans des véhicules des forces de l’ordre et, à 22 heures, ils prennent la route en direction de la ville frontalière de Sakiet Sidi Youssef à une centaine de kilomètres plus au nord. Les gardes nationaux sont alors clairs : « Ils nous promettent que c’est notre dernier jour en Tunisie », se souvient Paul-Edouard. « Et si on s’entêtait à revenir, ils nous tireraient une balle dans la tête. C’est ce qu’ils nous ont dit. » En face de Paul-Edouard, dans ce café d’El-Amra, Emmanuel, jeune Camerounais de 18 ans, présent au moment des faits, acquiesce d’un signe de la tête.Abandonnés pour la seconde fois, livrés à eux-mêmes, les migrants décident de revenir en Tunisie, le 21 septembre au petit matin. Ils marchent alors pendant neuf jours, parcourant des dizaines de kilomètres à pied, entre montagnes et forêts afin d’éviter de tomber à nouveau sur les autorités du pays. Neuf nuits à dormir à même le sol dans un froid « frigorifique », se remémore Paul-Edouard, la voix tremblante. Ils finissent par rallier Tajerouine, une ville de la région et trouvent un transport clandestin qui les ramène dans les environs de Sfax.
    Deux semaines après les faits, Paul-Edouard et Emmanuel n’arrivent toujours pas à comprendre pourquoi les autorités leur ont fait subir un tel traitement. Dans ce café d’El-Amra, leur histoire trouve un écho : de nombreuses personnes rapportent elles aussi des expulsions au cours des semaines passées et des faits similaires. Le phénomène n’est pas nouveau. Au mois de juillet, plusieurs centaines de migrants avaient déjà été abandonnées dans le désert par les forces de sécurité tunisiennes.
    Les images de ces hommes, femmes et enfants abandonnés le long de la frontière tuniso-libyenne sous une chaleur extrême, sans eau ni nourriture, avaient alors largement circulé sur les réseaux sociaux et dans les médias. Mais, début août, la signature d’un accord entre les ministres de l’intérieur des deux pays pour évacuer l’ensemble des migrants restant dans la zone laissait espérer la fin de ses pratiques. Or, une organisation humanitaire basée en Libye a confirmé au Monde, sous couvert d’anonymat, qu’au moins 3 700 migrants ont été expulsés de Tunisie vers la Libye depuis juin.
    Les autorités tunisiennes n’ont jamais reconnu ces expulsions. Interrogé par Le Monde, le porte-parole du ministère de l’intérieur, Faker Bouzghaya, a réfuté ses pratiques renvoyant à une déclaration du 3 août de son ministre, Kamel Feki, dans laquelle celui-ci soulignait « que les allégations sur les expulsions sont sans fondement ». Le porte-parole de la garde nationale, Houssem Jebabli, nie lui aussi de telles pratiques. « Ce n’est pas vrai, on a d’autres témoignages disant exactement le contraire. La Tunisie avait accueilli ces gens, et le Croissant-Rouge a fait de son mieux pour les migrants », déclare-t-il, sans donner plus de précisions. Une trentaine de cadavres a cependant été retrouvée dans la zone frontalière, selon la source humanitaire précédemment citée, et 80 personnes seraient toujours portées disparues. A El-Amra, la reprise des expulsions terrorise. « Du jour au lendemain, tu peux te retrouver dans le désert. Qui n’a pas peur ? Sans nourriture, sans eau, forcément tu as peur », explique Amadou, qui a été conduit vers la frontière algérienne avec son ami Félix fin septembre. A une autre table, Mohamed montre sur son téléphone une photo d’un jeune homme assis dans une zone désertique de la frontière libyenne : « Je n’ai pas de nouvelles de mon ami, on a été séparés là-bas, je ne sais pas ce qu’il est devenu. » Après un tel traumatisme, tous ont déjà pensé à rentrer chez eux, mais ont finalement exclu cette option. « Autant faire les 150 km qui nous séparent de Lampedusa. On caresse ce rêve », conclut Paul-Edouard.

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  • La Côte d’Ivoire se défend d’être un des principaux pourvoyeurs de migrants en Europe
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/10/04/la-cote-d-ivoire-se-defend-d-etre-un-des-principaux-pourvoyeurs-de-migrants-

    La Côte d’Ivoire se défend d’être un des principaux pourvoyeurs de migrants en Europe
    Selon l’agence européenne Frontex, près de 14 000 Ivoiriens figurent parmi les exilés ayant débarqué en septembre sur l’île italienne de Lampedusa. Les autorités ivoiriennes contestent ces chiffres et envisagent de mettre en place des visas avec certains pays maghrébins.
    Par Marine Jeannin(Abidjan, correspondance)
    Publié le 04 octobre 2023 à 07h30
    Alors qu’en Italie, les arrivées irrégulières de migrants en provenance d’Afrique du Nord ont quasiment doublé entre janvier et août par rapport à la même période en 2022, la Côte d’Ivoire réfute la présence en nombre de ses ressortissants dans leurs rangs. Selon le recensement de l’agence européenne Frontex, 14 000 Ivoiriens – 12 500 selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) – figurent parmi les exilés ayant débarqué en septembre en Europe. La Côte d’Ivoire est d’après ces statistiques le deuxième pays pourvoyeur de migrants clandestins vers l’Europe après la Guinée. Au cours d’un point presse consacré au sujet, lundi 2 octobre à Abidjan, le ministre ivoirien de l’intérieur, Vagondo Diomandé, s’est offusqué d’« une situation qui tend à ternir l’image de notre pays » et a contredit les chiffres donnés par Frontex et l’OIM. Ces « accusations portées contre notre pays » ne reposent, selon le ministre que sur les déclarations des personnes enregistrées par les services d’immigration italiens. « Aucune vérification n’a été effectuée avec le concours des services compétents de la Côte d’Ivoire pour s’assurer de la réalité de la nationalité ivoirienne de ces migrants, ainsi que le prévoit l’accord multilatéral conclu par notre pays avec l’Union européenne », a-t-il pointé. En somme, selon lui, beaucoup de migrants se diraient Ivoiriens mais seraient en réalité d’une autre nationalité.
    Pour appuyer son propos, M. Diomandé a ensuite énuméré les actions du gouvernement ivoirien pour lutter contre l’immigration clandestine : « amélioration des conditions de vie et de travail des populations », accords passés avec l’Europe, renforcement des mesures de contrôle et de surveillance aux postes-frontières, démantèlement de certaines filières… ainsi que l’envoi de missions d’identification dans les pays européens « chaque fois que cela s’est avéré nécessaire », et prochainement à Lampedusa. Selon le ministre, lors de ces précédentes missions d’identification, la nationalité ivoirienne a été confirmée pour moins de 15 % des demandeurs d’asile « présumés ivoiriens » entre 2009 et 2018.
    Se faire passer pour un Ivoirien ? Pareille stratégie peut sembler étonnante de la part des exilés. En Afrique de l’Ouest, les ressortissants des pays du Sahel, une région en proie aux attaques terroristes et aux conflits armés, sont vraisemblablement plus à même de recevoir l’asile en Europe que les Ivoiriens, qui n’ont plus droit au statut de réfugié depuis juin 2022. Une information manifestement ignorée par la majorité des demandeurs d’asile.
    « Jusqu’au coup d’Etat de janvier 2022 au Burkina Faso, des filières utilisaient des cartes d’identité ivoiriennes volées, explique l’ethnologue Léo Montaz. Les migrants qui les montraient disaient qu’ils étaient victimes de la crise ivoirienne qui a eu lieu entre 2002 et 2011. Beaucoup de non Ivoiriens se présentaient comme tels, ça pouvait passer dans la première moitié des années 2010… Mais cela a moins de sens aujourd’hui. D’autant plus que la fameuse “filière de Daloa” [ville ivoirienne considérée à l’époque comme une plaque tournante de l’immigration clandestine vers l’Europe] a été démantelée en 2018. »
    Autre explication possible : l’espoir, à défaut d’Europe, d’être rapatrié en Côte d’Ivoire, locomotive économique de la sous-région, plutôt que dans son pays d’origine. Interrogé sur le sujet le 28 septembre, le porte-parole du gouvernement, Amadou Coulibaly, avait rappelé que la Côte d’Ivoire était « un pays de transit », dont un quart de la population est d’origine étrangère. De nombreux immigrés des pays de la région y travaillent dans l’attente de réunir assez d’argent pour financer la traversée. « Cela ne fait pas d’eux des Ivoiriens, a déclaré M. Coulibaly. Une nationalité ne se déclare pas simplement, il faut des documents qui l’attestent. »
    C’est par le Maghreb que passent la plupart des migrants d’Afrique de l’Ouest, selon l’agence Frontex et le gouvernement ivoirien. « La pression migratoire accrue sur cette route pourrait persister dans les mois à venir, les passeurs baissant les prix pour les migrants partant de Libye et de Tunisie, dans un contexte de concurrence féroce entre les groupes criminels », indiquait l’agence européenne dans un communiqué publié le 14 septembre. Plus de 2 000 personnes sont mortes ou portées disparues depuis le début de l’année en tentant d’effectuer cette traversée vers l’Europe, selon l’OIM.Pour tenter d’y remédier, le gouvernement ivoirien a engagé des discussions avec la Tunisie et le Maroc, où les ressortissants ivoiriens peuvent pour l’heure se rendre librement par voie aérienne. Des procédures diplomatiques sont en cours, a indiqué Vagondo Diomandé, pour instaurer un visa entre la Côte d’Ivoire et ces deux pays. Une mesure annoncée comme temporaire, pour répondre à la crise migratoire.
    Marine Jeannin(Abidjan, correspondance)

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  • La chute du Heron blanc, ou la fuite en avant de l’agence #Frontex

    Sale temps pour Frontex, l’agence européenne de gardes-frontières : après le scandale des pushbacks dans les eaux grecques, qui a fait tomber son ex-directeur, l’un de ses drones longue portée de type Heron 1, au coût faramineux, s’est crashé fin août en mer ionienne. Un accident qui met en lumière la dérive militariste de l’Union européenne pour barricader ses frontières méridionales.

    Jeudi 24 août 2023, un grand oiseau blanc a fait un plongeon fatal dans la mer ionienne, à 70 miles nautiques au large de la Crète. On l’appelait « Heron 1 », et il était encore très jeune puisqu’il n’avait au compteur que 3 000 heures de vol. Son employeur ? Frontex, l’agence européenne de gardes-frontières et de gardes-côtes chargée depuis 2004 de réguler les frontières européennes, avec un budget sans cesse en hausse.

    Le Heron 1 est désigné dans la terminologie barbare du secteur de l’armement comme un drone MALE (Medium Altitude Long Endurance) de quatrième génération, c’est-à-dire un engin automatisé de grande taille capable de voler sur de longues distances. Frontex disposait jusqu’au crash de seulement deux drones Heron 1. Le premier a été commandé en octobre 2020, quand l’agence a signé un contrat de 50 millions d’euros par an avec Airbus pour faire voler cet appareil en « leasing » – Airbus passant ensuite des sous-contrats, notamment avec le constructeur israélien IAISystem
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    – pour un total de 2 400 heures de vol, et avec des dépassements qui ont fait monter la facture annuelle. En clair, le coût de fonctionnement de ce drôle d’oiseau est abyssal. Frontex rechigne d’ailleurs à entrer dans les détails, arguant de « données commerciales sensibles », ainsi que l’explique Matthias Monroy, journaliste allemand spécialisé dans l’aéronautique : « Ils ne veulent pas donner les éléments montrant que ces drones valent plus cher que des aéroplanes classiques, alors que cela semble évident. »
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    La nouvelle de la chute de l’onéreux volatile n’a pas suscité beaucoup de réactions publiques – il n’en est quasiment pas fait mention dans les médias autres que grecs, hormis sur des sites spécialisés. On en trouve cependant une trace sur le portail numérique du Parlement européen, en date du 29 août 2023. Ce jour-là, Özlem Demirel, députée allemande du parti de gauche Die Linke, pose la question « E-002469/2023 » (une interpellation enregistrée sous le titre : « Crash of a second long-range drone operated on Frontex’s behalf »), dans laquelle elle interroge la fiabilité de ces drones. Elle y rappelle que, déjà en 2020, un coûteux drone longue distance opéré par Frontex s’était crashé en mer – un modèle Hermes 900 cette fois-ci, tout aussi onéreux, bijou de l’israélien Elbit Systems. Et la députée de demander : « Qui est responsable ? »

    Une question complexe. « En charge des investigations, les autorités grecques détermineront qui sera jugé responsable, explique Matthias Monroy. S’il y a eu une défaillance technique, alors IAI System devra sans doute payer. Mais si c’est un problème de communication satellite, comme certains l’ont avancé, ou si c’est une erreur de pilotage, alors ce sera à Airbus, ou plutôt à son assureur, de payer la note. »
    VOL AU-DESSUS D’UN NID D’EMBROUILLES

    Le Heron 1 a la taille d’un grand avion de tourisme – presque un mini-jet. D’une envergure de 17 mètres, censé pouvoir voler en autonomie pendant 24 heures (contre 36 pour le Hermes 900), il est équipé de nombreuses caméras, de dispositifs de vision nocturne, de radars et, semble-t-il, de technologies capables de localiser des téléphones satellites
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    . Détail important : n’étant pas automatisé, il est manœuvré par un pilote d’Airbus à distance. S’il est aussi utilisé sur des théâtres de guerre, notamment par les armées allemande et israélienne, où il s’est également montré bien peu fiable
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    , sa mission dans le cadre de Frontex relève de la pure surveillance : il s’agit de fournir des informations sur les embarcations de personnes exilées en partance pour l’Europe.

    Frontex disposait de deux drones Heron 1 jusqu’au crash. Airbus était notamment chargé d’assurer le transfert des données recueillies vers le quartier général de Frontex, à Varsovie (Pologne). L’engin qui a fait un fatal plouf se concentrait sur la zone SAR(Search and Rescue
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    ) grecque et avait pour port d’attache la Crète. C’est dans cette même zone SAR que Frontex a supervisé plus ou moins directement de nombreux pushbacks (des refoulements maritimes), une pratique illégale pourtant maintes fois documentée, ce qui a provoqué un scandale qui a fini par contraindre le Français Fabrice Leggeri à démissionner de la tête de l’agence fin avril 2022. Il n’est pas interdit de penser que ce Heron 1 a joué en la matière un rôle crucial, fournissant des informations aux gardes-côtes grecs qui, ensuite, refoulaient les embarcations chargées d’exilés.

    Quant à son jumeau, le Heron positionné à Malte, son rôle est encore plus problématique. Il est pourtant similaire à celui qui s’est crashé. « C’est exactement le même type de drone », explique Tamino Bohm, « tactical coordinator » (coordinateur tactique) sur les avions de Sea-Watch, une ONG allemande de secours en mer opérant depuis l’île italienne de Lampedusa. Si ce Heron-là, numéro d’immatriculation AS2132, diffère de son jumeau, c’est au niveau du territoire qu’il couvre : lui survole les zones SAR libyennes, offrant les informations recueillies à ceux que la communauté du secours en mer s’accorde à désigner comme les « soi-disant gardes-côtes libyens »
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    – en réalité, des éléments des diverses milices prospérant sur le sol libyen qui se comportent en pirates des mers. Financés en partie par l’Union européenne, ils sont avant tout chargés d’empêcher les embarcations de continuer leur route et de ramener leurs passagers en Libye, où les attendent bien souvent des prisons plus ou moins clandestines, aux conditions de détention infernales
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    .

    C’est ainsi qu’au large de Lampedusa se joue une sorte de guerre aérienne informelle. Les drones et les avions de Frontex croisent régulièrement ceux d’ONG telles que Sea-Watch, dans un ballet surréaliste : les premiers cherchant à renseigner les Libyens pour qu’ils arraisonnent les personnes exilées repérées au large ; les seconds s’acharnant avec leurs maigres moyens à documenter et à dénoncer naufrages et refoulements en Libye. Et Tamino d’asséner avec malice : « J’aurais préféré que le drone crashé soit celui opérant depuis Malte. Mais c’est déjà mieux que rien. »
    BUDGET GONFLÉ, MANDAT ÉLARGI

    Tant que l’enquête sur le crash n’aura pas abouti, le vol de drones Heron 1 est suspendu sur le territoire terrestre et maritime relevant des autorités grecques, assure Matthias Monroy (qui ajoute que cette interdiction s’applique également aux deux drones du même modèle que possède l’armée grecque). Le crash de l’un de ses deux Heron 1 est donc une mauvaise nouvelle pour Frontex et les adeptes de la forteresse Europe, déjà bien éprouvés par les arrivées massives à Lampedusa à la mi-septembre et l’hospitalité affichée sur place par les habitants. À l’image de ces murs frontaliers bâtis aux frontières de l’Europe et dans l’espace Schengen – un rapport du Parlement européen, publié en octobre 2022 « Walls and fences at EU borders » (https://www.europarl.europa.eu/thinktank/en/document/EPRS_BRI(2022)733692), précise que l’on en est à 2 035 kilomètres de barrières frontalières, contre 315 en 2014 –, matérialisation d’un coûteux repli identitaire clamant une submersion fantasmée, il est évident que la démesure sécuritaire ne freine en rien les volontés de rejoindre l’Europe.

    Ce ne sont pourtant pas les moyens qui manquent. Lors de sa première année d’opérations, en 2005, Frontex disposait d’un budget de 6 millions d’euros. Depuis, celui-ci n’a cessé d’enfler, pour atteindre la somme de 845,4 millions d’euros en 2023, et un effectif de plus de 2 100 personnels – avec un budget prévisionnel 2021-2027 de 11 milliards d’euros et un objectif de 10 000 gardes d’ici à 2027 (dont 7 000 détachés par les États membres).

    Depuis 2019, Frontex dispose d’un mandat élargi qui autorise l’acquisition et la possession d’avions, de drones et d’armes à feu. L’agence s’est aussi géographiquement démultipliée au fil de temps. Ses effectifs peuvent aussi bien patrouiller dans les eaux de Lampedusa que participer à des missions de surveillance de la frontière serbo-hongroise, alors que son rôle initial était simplement d’assister les pays européens dans la gestion de leurs frontières. L’agence européenne joue aussi un rôle dans la démesure technologique qui se développe aux frontières. Rien que dans les airs, l’agence se veut novatrice : elle a déjà investi plusieurs millions d’euros dans un projet de #zeppelin automatisé relié à un câble de 1 000 mètres, ainsi que dans le développement de drones « #quadcopter » pesant une dizaine de kilos. Enfin, Frontex participe aussi à la collecte généralisée de #données migratoires dans le but d’anticiper les refoulements. Elle soutient même des projets visant à gérer les flux humains par #algorithmes.

    Traversée comme les armées par une culture du secret, l’agence s’est fait une spécialité des zones grises et des partenariats opaques, tout en prenant une place toujours plus importante dans la hausse de la létalité des frontières. « Frontex est devenue l’agent de la #militarisation_des_frontières européennes depuis sa création, résume un rapport de la Fondation Jean-Jaurès sorti en juillet 2023. Fondant son fonctionnement sur l’#analyse_des_risques, Frontex a contribué à la perception des frontières européennes comme d’une forteresse assiégée, liant le trafic de drogue et d’êtres humains à des mouvements migratoires plus larges. »

    « VOUS SURVEILLEZ LES FRONTIÈRES, NOUS VOUS SURVEILLONS »

    Dans sa volonté d’expansion tous azimuts, l’agence se tourne désormais vers l’Afrique, où elle œuvre de manière plus ou moins informelle à la mise en place de politiques d’#externalisation des frontières européennes. Elle pèse notamment de tout son poids pour s’implanter durablement au #Sénégal et en #Mauritanie. « Grâce à l’argent des contribuables européens, le Sénégal a construit depuis 2018 au moins neuf postes-frontières et quatre antennes régionales de la Direction nationale de lutte contre le trafic de migrants. Ces sites sont équipés d’un luxe de #technologies de #surveillance_intrusive : outre la petite mallette noire [contenant un outil d’extraction des données], ce sont des #logiciels d’#identification_biométrique des #empreintes_digitales et de #reconnaissance_faciale, des drones, des #serveurs_numériques, des lunettes de vision nocturne et bien d’autres choses encore », révèle une enquête du journal étatsunien In These Times. Très impopulaire sur le continent, ce type de #néocolonialisme obsidional se déploie de manière informelle. Mais il porte bien la marque de Frontex, agence agrippée à l’obsession de multiplier les murs physiques et virtuels.

    Au Sénégal, pour beaucoup, ça ne passe pas. En août 2022, l’association #Boza_Fii a organisé plusieurs journées de débat intitulées « #Pushback_Frontex », avec pour slogan : « Vous surveillez les frontières, nous vous surveillons ». Une manifestation reconduite en août 2023 avec la mobilisation « 72h Push Back Frontex ». Objectif : contrer les négociations en cours entre l’Union européenne et le Sénégal, tout en appelant « à la dissolution définitive de l’agence européenne de gardes-frontières ». Sur RFI, son porte-parole #Saliou_Diouf expliquait récemment son point de vue : « Nous, on lutte pour la #liberté_de_circulation de tout un chacun. […] Depuis longtemps, il y a beaucoup d’argent qui rentre et est-ce que ça a arrêté les départs ? »

    Cette politique « argent contre muraille » est déployée dans d’autres États africains, comme le #Niger ou le #Soudan. Frontex n’y est pas directement impliquée, mais l’Europe verse des centaines de millions d’euros à 26 pays africains pour que des politiques locales visant à bloquer les migrations soient mises en place.

    « Nous avons besoin d’aide humanitaire, pas d’outils sécuritaires », assure Mbaye Diop, travailleur humanitaire dans un camp de la Croix-Rouge situé à la frontière entre le Sénégal et la Mauritanie, dans l’enquête de In These Times. Un constat qui vaut de l’autre côté de la Méditerranée : dans un tweet publié après le crash du Heron 1, l’ONG Sea-Watch observait qu’avec les 50 millions alloués à Airbus et à ses sous-traitants pour planter son Heron dans les flots, « on pourrait faire voler pendant 25 ans nos avions de secours Seabird 1 et Seabird 2 ».

    https://afriquexxi.info/La-chute-du-Heron-blanc-ou-la-fuite-en-avant-de-l-agence-Frontex

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  • En Libye, les travailleurs étrangers rescapés « sont parmi les plus détruits psychologiquement par la catastrophe » de Derna
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/09/23/en-libye-les-travailleurs-etrangers-rescapes-sont-parmi-les-plus-detruits-ps

    En Libye, les travailleurs étrangers rescapés « sont parmi les plus détruits psychologiquement par la catastrophe » de Derna
    Par Nissim Gasteli et Madjid Zerrouky (envoyés spéciaux à Derna, en Libye)
    Publié le 23 septembre 2023 à 10h05, modifié le 24 septembre 2023 à e
    Venus d’Egypte, du Soudan ou du Tchad, de nombreux immigrés, saisonniers ou plus permanents, doivent surmonter le traumatisme de l’inondation sans le secours des solidarités familiales. Ils seraient quelque 100 000 dans les zones affectées par les inondations.
    La mort a fini par congédier Awad au dernier moment. Le 11 septembre, alors qu’on s’apprêtait à refermer le sac mortuaire dans lequel il avait été placé, un spasme a alerté les employés des services funéraires de Derna et l’a ramené dans le monde des vivants. Dans la nuit, la crue du Wadi Derna venait d’emporter un tiers de cette ville libyenne de 100 000 habitants, pulvérisant ou projetant des blocs d’habitation entiers dans la mer.
    (...)Des jeunes psychologues de l’hôpital psychiatrique de la ville préviennent : « Ici se trouvent ceux, petits et grands, qui sont parmi les plus détruits psychologiquement par la catastrophe. Ils ont vécu les mêmes scènes d’horreur que beaucoup d’entre nous, mais ils sont isolés et ne peuvent pas compter sur les solidarités familiales. » La ville compte 40 000 déplacés.
    Fiévreux, le visage marqué, les avant-bras et les mains anormalement gonflés, Awad est toujours sous le choc quand il se présente à nous. Solitaire quand les autres rescapés devisent en groupe à l’extérieur ou font le ménage à l’intérieur. Comme tous les habitants de Derna, il commence par raconter « son » 11 septembre : « C’était le jour du jugement dernier. Je m’étais barricadé avant de dormir dans le restaurant quand, vers 2 h 30, j’ai entendu un son terrifiant [la rupture du premier barrage, à 1 kilomètre en amont de la ville]. L’immeuble roulait sur lui-même. J’ai repris conscience quatre heures plus tard après avoir vomi de l’eau. Ils m’avaient déshabillé et commençaient à m’envelopper. Techniquement, j’étais mort, raconte-t-il d’une traite. Je n’habitais Derna que depuis deux semaines… »
    Près de 8 000 migrants et travailleurs étrangers
    De sa vie d’avant, il ne lui reste qu’un compte Facebook et les téléphones que lui prêtent ses compatriotes et compagnons d’infortune. Parmi eux, Mohamed Al-Saïd, 29 ans, Saïd Al-Masry, 26 ans, et Ahmad Mohamad, 24 ans. Assis à l’ombre de quelques arbustes sur une couverture, les trois amis sont originaires du village égyptien décimé de Nazlat Al-Sharif, une petite commune de la vallée du Nil d’où de nombreux jeunes étaient partis travailler en Cyrénaïque (province de l’est de la Libye, frontalière de l’Egypte) pour nourrir leur famille. Officiellement, soixante-quinze d’entre eux sont morts à Derna. Ils seraient davantage, selon les trois amis. « Environ 120 habitants de notre village sont décédés ou disparus », estime Mohamed, le pied bandé. Il s’est blessé sur des tessons de bouteille en escaladant un mur lors de la montée des eaux. Tous trois travaillent dans le secteur du bâtiment. « Beaucoup d’entre nous sont des travailleurs saisonniers, qui viennent ici pour quelques mois. D’autres restent un, deux ou trois ans avant de repartir en Egypte », précise Saïd Al-Masry.
    Selon l’Organisation internationale pour les migrations, la ville comptait près de 8 000 migrants et travailleurs étrangers au moment de la catastrophe, sur plus de 100 000 vivant dans les zones affectées par les inondations, la plupart originaires d’Egypte, du Tchad et du Soudan. Près de 430 d’entre eux auraient perdu la vie dans la nuit du 11 septembre, selon des bilans encore très parcellaires. Les autorités égyptiennes, qui faisaient état de plus de 120 corps identifiés jeudi, restaient sans nouvelles de 300 de leurs ressortissants.
    Les Egyptiens se rendent depuis des décennies en Libye pour y chercher du travail, « attirés par la prospérité relative du pays, structurellement plus riche et moins peuplé que l’Egypte », explique Jalel Harchaoui, chercheur associé au Royal United Services Institute for Defence and Security Studies. La migration de travail vers la Cyrénaïque est d’abord un enjeu socio-économique : pour Le Caire, elle offre des débouchés professionnels à ses ressortissants et leur permet de soutenir financièrement leurs familles restées au pays, afin d’éviter toute gronde sociale. « L’accueil continu des Egyptiens en Libye est perçu par les autorités égyptiennes comme un dû, vu les défis démographiques et économiques croissants de l’Egypte », précise l’universitaire. Dans ce contexte, le sort des travailleurs égyptiens est imbriqué dans les relations entre leur pays et le pouvoir de Benghazi, principale ville de la Cyrénaïque. Début juin, les autorités de l’Est libyen ont mené de larges opérations d’arrestations et d’expulsions contre les migrants égyptiens. Près de 4 000 auraient été reconduits aux frontières, selon des sources sécuritaires égyptiennes citées par Reuters. En Egypte, cette politique a été perçue comme une « humiliation », survenant à un moment de tensions entre Le Caire et Benghazi, ajoute M. Harchaoui. La situation s’est depuis apaisée, permettant aux Egyptiens de poursuivre leurs occupations professionnelles dans l’Est.(...)
    Les grandes villes de la Cyrénaïque ne sont pas les seules à attirer la main-d’œuvre venue d’ailleurs. La région du djebel Akhdar et ses multiples exploitations agricoles s’appuient sur de nombreux travailleurs migrants. Les dégâts provoqués par la tempête, qui a ravagé les cultures sur des milliers d’hectares, pourraient faire basculer l’avenir de beaucoup d’entre eux. « Je devais être payé mi-septembre, mais mon patron ne m’a pour l’instant rien donné », explique Naïm, 21 ans, employé d’un élevage de poulets près de la ville de Gandoula.
    Originaire du nord du Tchad, Naïm garde aujourd’hui l’entrée d’une exploitation vide de toute vie et d’activités. « Je gagne 1 000 dinars [190 euros] et je suis soutien de ma famille qui est restée là-bas. Enfin, je gagnais… », explique d’un ton doux le jeune homme. Il ne s’en cache pas, il se rêvait un avenir au-delà de l’horizon libyen : « J’espérais constituer un petit pécule pour quitter ce pays un jour. Je n’ai plus rien. Même mes papiers d’identité ont été emportés par l’eau. »
    La Cyrénaïque est aussi un point de départ majeur vers l’Europe. Depuis la fin de l’année 2022, un corridor reliant l’est de la Libye à l’Italie s’est rouvert, sur lequel s’élancent de vétustes chalutiers embarquant plusieurs centaines de personnes. La route est empruntée par de nombreux Egyptiens, qui ont représenté le premier contingent d’arrivées en Italie en 2022, avec 21 301 personnes, mais aussi par des Syriens qui y voient une alternative à la route des Balkans, désormais difficile d’accès, et des Bangladais.Mais, pour les trois rescapés de l’Institut technique de Derna, pas question de bouger pour le moment. « Nous resterons ici jusqu’à ce que nous retrouvions nos disparus. Puis nous retournerons en Egypte. Si telle est la volonté de Dieu », annoncent, fatalistes, Mohamed, Saïd et Ahmad. Revenu d’entre les morts, Awad, lui, n’a que faire du destin. « Ce sont des erreurs humaines, assène-t-il. Nous sommes venus dans ce pays pour travailler, pas pour finir au fond de la mer à des kilomètres [des immeubles entiers ont été repérés à 3 kilomètres de la côte, leurs habitants toujours piégés à l’intérieur]. Qui s’occupait des barrages ? Qui a permis qu’on construise sur des sols dangereux ? Je ne demande pas des comptes à Dieu, j’en réclame aux autorités libyennes. »

    #Covid-19#migrant#migration#libye#travailleurmigrant#mortalite#inondation#crise#humanitaire#egypte#soudan#tchad#sante#santementale#routemigratoire

  • « Le #viol, passage presque inévitable de la migration » : à Marseille, huit femmes témoignent

    Lundi 18 septembre, la revue scientifique internationale « The Lancet » publie une enquête de santé publique inédite menée sur 273 demandeuses d’asile à Marseille, corrélant la migration et la violence sexuelle dont elles sont victimes. « Le Monde » a recueilli les histoires de huit femmes qui ont participé à l’étude.

    Au milieu de la conversation, Aissata tressaille. Adama, elle, manque plusieurs fois de faire tomber son bébé de 2 mois, gros poupon emmailloté dans un body blanc, qu’elle allaite le regard absent. Les yeux de Perry se brouillent : elle a vu trop de #violence. Ceux de Fanta sont devenus vitreux : elle est là, mais plus vraiment là. Grace regrette sa sécheresse oculaire, elle aimerait tant pleurer et hurler, peut-être la croirait-on et l’aiderait-on davantage, mais elle ne sait pas où ses larmes sont parties. Nadia sourit en montrant les cicatrices des brûlures de cigarettes qui constellent sa poitrine, comme pour s’excuser de cette vie qui l’a fait s’échouer ici. Stella porte ses lunettes de soleil à l’intérieur, et explose de rire en racontant qu’elle a été vendue quatre fois.

    Tous ces détails, ces marques de la #barbarie inscrite dans le #corps des femmes migrantes, le docteur Jérémy Khouani les observe depuis ses études de médecine. Généraliste dans une maison de santé du 3e arrondissement de Marseille – avec 55 % de ses habitants au-dessous du seuil de pauvreté, c’est l’un des endroits les plus pauvres de France –, il soigne les bobos, les angines et les gastros, mais voit surtout le #traumatisme surgir face aux mots « #excision », « #Libye », « #traite » ou « viol ».

    Bouleversé par des consultations qui l’amènent à mesurer la taille de lèvres vaginales post-excision pour l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra), à diagnostiquer une arthrose massive à une jeune femme de 30 ans ou à prescrire des antidépresseurs à une autre qui vient de tenter de s’immoler, il a décidé de lutter avec ce qu’il savait faire : « De la science ». « Je n’ai pas envie de hiérarchiser, mais les violences que subissent les femmes demandeuses d’asile, c’est trois fois plus horrible que les hommes. Ils subissent aussi des violences, mais ce n’est pas systémique, ils n’ont pas le vagin mutilé à 6 ans, ou le viol comme passage presque inévitable de la migration. » En Europe, en 2021, les femmes représentent 31 % des demandeurs d’asile.

    Il y a trois ans, avec l’Assistance publique-Hôpitaux de Marseille et la faculté de médecine d’Aix-Marseille, #Jérémy_Khouani a lancé une grande enquête de #santé_publique pour mesurer l’#incidence des violences sexuelles chez les femmes demandeuses d’asile en France. Une étude inédite, publiée ce lundi 18 septembre dans la revue scientifique The Lancet (Regional Health Europe) et menée sur 273 femmes arrivées sur le territoire français, volontaires pour participer et en attente de la réponse des autorités quant à leur statut. La moitié d’entre elles viennent d’Afrique de l’Ouest, le reste du Moyen-Orient, d’Asie ou d’Europe.

    « Un impondérable du #parcours_migratoire »

    Ainsi, 26 % d’entre elles se déclarent victimes de violences sexuelles au cours de leurs douze derniers mois sur le territoire français, et 75 % avant leur entrée en France. Les demandeuses d’asile encourent dix-huit fois plus le risque d’être victimes de viol en France que les Françaises de la population générale ; 40 % d’entre elles ont subi des #mutilations_génitales. « L’étude fait ressortir que la violence sexuelle est un motif de départ, un impondérable du parcours migratoire, et un crime dont on ne les protège pas en France », analyse #Anne_Desrues, sociologue et enquêtrice sur le projet.

    L’absence de logement, de compagnon et les antécédents de violence apparaissent comme des facteurs de risque du viol. « Le débat, ce n’est même pas de savoir si elles ont vocation à rester sur le territoire ou pas, mais, au moins, que pendant tout le temps où leur demande est étudiée, qu’elles ne soient pas violées à nouveau, elles sont assez traumatisées comme ça », pose le médecin généraliste.

    Il faut imaginer ce que c’est de soigner au quotidien de telles blessures, de rassembler 273 récits de la sorte en six mois – ce qui n’est rien par rapport au fait de vivre ces violences. L’expression « #traumatisme_vicariant » qualifie en psychiatrie le traumatisme de seconde ligne, une meurtrissure psychique par contamination, non en étant exposé directement à la violence, mais en la documentant. « Heureusement, j’avais une psychologue pour débriefer les entretiens, évoque Anne Desrues. Moi, ce qui m’a aidée, c’est de savoir que celles qu’on rencontrait étaient aussi des femmes fortes, qui avaient eu le courage de partir, et de comprendre leur migration comme une #résistance à leur condition. » Le docteur Khouani, lui, érige cette étude comme rempart à son sentiment d’impuissance.

    Le Monde, pendant quarante-huit heures, a recueilli les histoires de huit femmes qui ont participé à l’étude. Certaines sont sous obligation de quitter le territoire français (OQTF), risquant l’expulsion. Mais elles voulaient que quelqu’un entende, note et publie tout ce qu’elles ont subi. Dans le cabinet du médecin, sous les néons et le plafond en contreplaqué, elles se sont assises et ont parlé.

    Lundi, 9 heures. Ogechi, surnommée « Perry », 24 ans. Elle regarde partout, sauf son interlocuteur. Elle a une croix autour du cou, une autre pendue à l’oreille, porte sa casquette à l’envers. Elle parle anglais tout bas, en avalant la fin des mots. Elle vient de Lagos, au Nigeria. Jusqu’à son adolescence, ça va à peu près. Un jour, dans la rue, elle rencontre une fille qui lui plaît et l’emmène chez elle. Son père ne supporte pas qu’elle soit lesbienne : il la balance contre le mur, la tabasse, appelle ses oncles. Ils sont maintenant cinq à se déchaîner sur Perry à coups de pied. « Ma bouche saignait, j’avais des bleus partout. »

    Perry s’enfuit, rejoint une copine footballeuse qui veut jouer en Algérie. Elle ne sait pas où aller, sait seulement qu’elle ne peut plus vivre chez elle, à Lagos. L’adolescente, à l’époque, prend la route : Kano, au nord du pays, puis Agadez, au Niger, où un compatriote nigérian, James, l’achète pour 2 000 euros et la fait entrer en Libye. Elle doit appeler sa famille pour rembourser sa dette. « Je n’ai pas de famille ni d’argent, je ne vaux rien », lui répond Perry. Une seule chose a de la valeur : son corps. James prélève ses cheveux, son sang, fait des incantations vaudoues « pour me contrôler ». A 15 ans, elle est prostituée dans un bordel sous le nom de « Blackgate ».

    « Si je meurs, qui va s’en apercevoir ? »

    Son débit est monocorde, mais son récit est vif et transporte dans une grande maison libyenne divisée en « chambres » avec des rideaux. Un lit par box, elles sont sept femmes par pièce. « Des vieilles, des jeunes, des enceintes. » Et les clients ? « Des Africains, des Arabes, des gentils, des violents. » En tout, une cinquantaine de femmes sont exploitées en continu. « J’aurais jamais pensé finir là, je ne pouvais pas imaginer qu’un endroit comme ça existait sur terre », souffle-t-elle.

    Perry passe une grosse année là-bas, jusqu’à ce qu’un des clients la prenne en pitié et la rachète pour l’épouser. Sauf qu’il apprend son #homosexualité et la revend à une femme nigériane, qui lui paye le voyage pour l’Europe pour la « traiter » à nouveau, sur les trottoirs italiens cette fois-ci. A Sabratha, elle monte sur un bateau avec 150 autres personnes. Elle ne souhaite pas rejoindre l’Italie, elle ne veut que fuir la Libye. « Je ne sais pas nager. Je n’avais pas peur, je n’étais pas heureuse, je me demandais seulement comment un bateau, ça marchait sur l’eau. » Sa première image de l’Europe : Lampedusa. « J’ai aimé qu’il y ait de la lumière 24 heures sur 24, alors que chez nous, la nuit, c’est tout noir. »

    Mineure, Perry est transférée dans un foyer à Milan, où « les gens qui travaillent avec James m’ont encore fait travailler ». Elle tape « Quel est le meilleur pays pour les LGBT ? » dans la barre de recherche de Google et s’échappe en France. « Ma vie, c’est entre la vie et la mort, chaque jour tu peux perdre ou tu peux gagner », philosophe-t-elle. Le 4 septembre 2020, elle se souvient bien de la date, elle arrive dans le sud de la France, une région qu’elle n’a pas choisie. Elle suit un cursus de maroquinerie dans un lycée professionnel avec, toujours, « la mafia nigériane » qui la harcèle. « Ils m’ont mis une arme sur la tempe, ils veulent que je me prostitue ou que je vende de la drogue. C’est encore pire parce que je suis lesbienne, ils disent que je suis une abomination, une sorcière… »

    A Marseille, elle fait trois tentatives de suicide, « parce que je suis trop traumatisée, j’arrive plus à vivre, mais Dieu m’a sauvée ». A 24 ans, pour qui Perry existe-t-elle encore ? « Si je meurs, qui va s’en apercevoir ? Je regrette d’avoir quitté le Nigeria, je ne pensais pas expérimenter une vie pareille », termine-t-elle, en s’éloignant dans les rues du 3e arrondissement.

    Lundi, 11 heures. A 32 ans, la jeunesse de Fanta semble s’être dissoute dans son parcours. Elle a des cheveux frisés qui tombent sur son regard sidéré. Elle entre dans le cabinet les bras chargés de sacs en plastique remplis de la lessive et des chaussures qu’elle vient de se procurer pour la rentrée de ses jumeaux en CP, qui a eu lieu le matin même. « Ils se sont réveillés à 5 heures tellement ils étaient excités, raconte-t-elle. C’est normal, on a passé l’été dans la chambre de l’hôtel du 115, on ne pouvait pas trop sortir à cause de mon #OQTF. » Fanta vient de Faranah, en Guinée-Conakry, où elle est tombée accidentellement enceinte de ses enfants. « Quand il l’a su, mon père, qui a lui même trois femmes, m’a tapée pendant trois jours et reniée. »

    Elle accouche, mais ne peut revenir vivre dans sa famille qu’à condition d’abandonner ses bébés de la honte. Elle refuse, bricole les premières années avec eux. Trop pauvre, trop seule, elle confie ses enfants à sa cousine et souhaite aller en Europe pour gagner plus d’argent. Mali, Niger, Libye. La prison en Libye lui laisse une vilaine cicatrice à la jambe. En 2021, elle atteint Bari, en Italie, puis prend la direction de la France. Pourquoi Marseille ? « Parce que le train s’arrêtait là. »

    Sexe contre logement

    A la gare Saint-Charles, elle dort par terre pendant trois jours, puis rejoint un squat dans le quartier des Réformés. Là-bas, « un homme blanc est venu me voir et m’a dit qu’il savait que je n’avais pas de papiers, et que si on ne faisait pas l’amour, il me dénonçait à la police ». Elle est violée une première fois. Trois jours plus tard, il revient avec deux autres personnes, avec les mêmes menaces. Elle hurle, pleure beaucoup. Ils finissent par partir. « Appeler la police ? Mais pour quoi faire ? La police va m’arrêter moi », s’étonne-t-elle devant notre question.

    En novembre 2022, le navire de sauvetage Ocean-Viking débarque ses passagers sur le port de Toulon. A l’intérieur, sa cousine et ses jumeaux. « Elle est venue avec eux sans me prévenir, j’ai pleuré pendant une semaine. » Depuis, la famille vit dans des hôtels sociaux, a souvent faim, ne sort pas, mais « la France, ça va, je veux bien aller n’importe où du moment que j’ai de la place ». Parfois, elle poursuit les passants qu’elle entend parler sa langue d’origine dans la rue, « juste pour avoir un ami ». « La migration, ça fait exploser la violence », conclut-elle, heureuse que ses enfants mangent à la cantine de l’école ce midi.

    Lundi, 15 heures. « C’est elle qui m’a donné l’idée de l’étude », s’exclame le docteur Khouani en nous présentant Aissata. « Oui, il faut parler », répond la femme de 31 ans. Elle s’assoit, décidée, et déroule un récit délivré de nombreuses fois devant de nombreux officiels français. Aissata passe son enfance en Guinée. En 1998, sa mère meurt et elle est excisée. « C’était très douloureux, je suis vraiment obligée de reraconter ça ? » C’est sa « marâtre » qui prend le relais et qui la « torture ». Elle devient la petite bonne de la maison de son père, est gavée puis privée de nourriture, tondue, tabassée, de la harissa étalée sur ses parties intimes. A 16 ans, elle est mariée de force à un cousin de 35 ans qui l’emmène au Gabon.

    « Comme je lui ai dit que je ne voulais pas l’épouser, son travail, c’était de me violer. J’empilais les culottes et les pantalons les uns sur les autres pour pas qu’il puisse le faire, mais il arrachait tout. » Trois enfants naissent des viols, que son époux violente aussi. Elle s’interpose, il la frappe tellement qu’elle perd connaissance et se réveille à l’hôpital. « Là-bas, je leur ai dit que ce n’était pas des bandits qui m’avaient fait ça, mais mon mari. » Sur son téléphone, elle fait défiler les photos de bleus qu’elle avait envoyées par mail à son fils – « Comme ça, si je mourais, il aurait su quelle personne était son père. »

    Un soignant lui suggère de s’enfuir, mais où ? « Je ne connais pas le Gabon et on ne peut pas quitter le mariage. » Une connaissance va l’aider à sortir du pays. Elle vend tout l’or hérité de sa mère, 400 grammes, et le 29 décembre 2018, elle prend l’avion à l’aéroport de Libreville. « J’avais tellement peur, mon cœur battait si fort qu’il allait sortir de mon corps. » Elle vit l’atterrissage à Roissy - Charles-de-Gaulle comme un accouchement d’elle-même, une nouvelle naissance en France. A Paris, il fait froid, la famille arrive à Marseille, passe de centres d’accueil humides en hôtels avec cafards du 115.

    Sans cesse, les hommes la sollicitent. Propositions de sexe contre logement ou contre de l’argent : « Les hommes, quand tu n’as pas de papiers, ils veulent toujours en profiter. Je pourrais donner mon corps pour mes enfants, le faire avec dix hommes pour les nourrir, mais pour l’instant j’y ai échappé. » Au début de l’année, l’OQTF est tombée. Les enfants ne dorment plus, elle a arrêté de soutenir leurs devoirs. « La France trouve que j’ai pas assez souffert, c’est ça ? », s’énerve celle que ses amies surnomment « la guerrière ».

    « Je suis une femme de seconde main maintenant »

    Lundi, 17 heures. Nadia a le visage rond, entouré d’un voile noir, les yeux ourlés de la même couleur. Une immense tendresse se dégage d’elle. Le docteur Khouani nous a prévenues, il faut faire attention – elle sort à peine de l’hôpital psychiatrique. Il y a quelques semaines, dans le foyer où elle passe ses journées toute seule, elle a pris un briquet, a commencé à faire flamber ses vêtements : elle a essayé de s’immoler. Quand il l’a appris, le médecin a craqué, il s’en voulait, il voyait bien son désespoir tout avaler et la tentative de suicide arriver.

    Pourtant, Nadia a fait une petite heure de route pour témoigner. Elle a grandi au Pakistan. Elle y a fait des études de finance, mais en 2018 son père la marie de force à un Pakistanais qui vit à Marseille. Le mariage est prononcé en ligne. Nadia prend l’avion et débarque en France avec un visa de touriste. A Marseille, elle se rend compte que son compagnon ne pourra pas la régulariser : il est déjà marié. Elle n’a pas de papiers et devient son « esclave », subit des violences épouvantables. Son décolleté est marqué de plusieurs cicatrices rondes : des brûlures de cigarettes.

    Nadia apparaît sur les écrans radars des autorités françaises un jour où elle marche dans la rue. Il y a une grande tache rouge sur sa robe. Elle saigne tellement qu’une passante l’alerte : « Madame, madame, vous saignez, il faut appeler les secours. » Elle est évacuée aux urgences. « Forced anal sex », explique-t-elle, avec son éternel rictus désolé. Nadia accepte de porter plainte contre son mari. La police débarque chez eux, l’arrête, mais il la menace d’envoyer les photos dénudées qu’il a prises d’elle au Pakistan. Elle retire sa plainte, revient au domicile.

    Les violences reprennent. Elle s’échappe à nouveau, est placée dans un foyer. Depuis qu’elle a témoigné auprès de la police française, la propre famille de Nadia ne lui répond plus au téléphone. Une nuit, elle s’est réveillée et a tenté de gratter au couteau ses brûlures de cigarettes. « Je suis prête à donner un rein pour avoir mes papiers. Je pense qu’on devrait en donner aux femmes victimes de violence, c’est une bonne raison. Moi, je veux juste étudier et travailler, et si je suis renvoyée au Pakistan ils vont à nouveau me marier à un homme encore pire : je suis une femme de seconde main maintenant. »

    « Je dois avoir une vie meilleure »

    Mardi, 11 heures. Médiatrice sociale du cabinet médical, Elsa Erb est une sorte d’assistante pour vies fracassées. Dans la salle d’attente ce matin, il y a une femme mauritanienne et un gros bébé de 2 mois. « C’est ma chouchoute », sourit-elle. Les deux femmes sont proches : l’une a accompagné l’autre à la maternité, « sinon elle aurait été toute seule pour accoucher ». Excision dans l’enfance, puis à 18 ans, en Mauritanie, mariage forcé à son cousin de 50 ans. Viols, coups, cicatrices sur tout le corps. Deux garçons naissent. « Je ne pouvais pas rester toute ma vie avec quelqu’un qui me fait autant de mal. » Adama laisse ses deux enfants, « propriété du père », et prend l’avion pour l’Europe.

    A Marseille, elle rencontre un autre demandeur d’asile. Elle tombe enceinte dans des circonstances troubles, veut avorter mais l’homme à l’origine de sa grossesse la menace : c’est « péché » de faire ça, elle sera encore plus « maudite ». Depuis, elle semble trimballer son bébé comme un gros paquet embarrassant. Elsa Erb vient souvent la voir dans son foyer et lui apporte des boîtes de sardines. Elle s’inquiète car Adama s’isole, ne mange pas, passe des heures le regard dans le vide, un peu sourde aux pleurs et aux vomissements du petit. « Je n’y arrive pas. Avec mes enfants là-bas et celui ici, je me sens coupée en deux », se justifie-t-elle.

    Mardi, 14 heures. A chaque atrocité racontée, Stella rit. Elle vient du Biafra, au Nigeria. Ses parents sont tués par des miliciens quand elle a 13 ans. Elle est envoyée au Bénin auprès d’un proche qui la viole. Puis elle tombe dans la #traite : elle est transférée en Libye. « J’ai été vendue quatre fois, s’amuse-t-elle. En Libye, vous pouvez mourir tous les jours, plus personne ne sait que vous existez. » Elle passe en Italie, où elle est encore exploitée.

    Puis la France, Marseille et ses squats. Elle décrit des hommes blancs qui débarquent armés, font tous les étages et violent les migrantes. La police ? Stella explose de rire. « Quel pouvoir est-ce que j’ai ? Si je raconte ça à la police française, les agresseurs me tueront. C’est simple : vous êtes une femme migrante, vous êtes une esclave sexuelle. »

    Avec une place dans un foyer et six mois de #titre_de_séjour en tant que victime de traite, elle est contente : « Quand on a sa maison, on est moins violée. » Des étoiles sont tatouées sur son cou. « Je dois avoir une vie meilleure. Mon nom signifie “étoile”, je dois briller », promet-elle. Le docteur Khouani tient à nous montrer une phrase issue du compte rendu d’une radio de ses jambes : « Lésions arthrosiques inhabituelles pour son jeune âge. » « Il est très probable qu’elle ait subi tellement de violences qu’elle a l’arthrose d’une femme de 65 ans. » Stella a 33 ans.

    Déboutés par l’Ofpra

    Mardi, 16 heures. Grace entre avec sa poussette, dans laquelle s’ébroue une petite fille de 7 mois, son quatrième enfant. Nigériane, la jeune femme a le port altier et parle très bien anglais. « J’ai été très trafiquée », commence-t-elle. Après son bac, elle est recrutée pour être serveuse en Russie. C’est en réalité un réseau de #proxénétisme qui l’emmène jusqu’en Sibérie, d’où elle finit par être expulsée. De retour au Nigeria, elle veut poursuivre ses études à la fac à Tripoli, en Libye.

    A la frontière, elle est vendue, prostituée, violée. Elle tombe enceinte, s’échappe en Europe pour « fuir, pas parce que je voulais particulièrement y aller ». Arrivée en Italie, on lui propose d’avorter de son enfant du viol. Elle choisit de le garder, même si neuf ans après, elle ne sait toujours pas comment son premier fils a été conçu. En Italie, elle se marie avec un autre Nigérian. Ils ont quatre enfants scolarisés en France, mais pas de papiers. L’Ofpra les a déboutés : « Ils trouvent que j’ai les yeux secs, que je délivre mon histoire de manière trop détachée », comprend-elle.

    Mardi, 18 heures. Abby se présente dans le cabinet médical avec sa fille de 12 ans. Elles sont originaires de Sierra Leone. Abby a été excisée : elle se remémore le couteau, les saignements, souffre toujours vingt-cinq ans après. « Ils ont tout rasé, c’est lisse comme ça », décrit-elle en caressant la paume de sa main.

    Sa fille a aussi été mutilée, un jour où sa mère n’était pas à la maison pour la protéger. « Mais pour Aminata, ce n’est pas propre. » Alors, quand la mère et la fille ont déposé leur demande d’asile à l’Ofpra, le docteur Khouani s’est retrouvé à faire un acte qui l’énerve encore. « J’ai dû pratiquer un examen gynécologique sur une préado pour mesurer la quantité de ses lèvres qui avait survécu à son excision. Si tout était effectivement rasé, elles étaient déboutées, car il n’y avait plus rien à protéger. » Les deux femmes ont obtenu des titres de séjour. Abby travaille comme femme de ménage en maison de retraite. Aminata commence sa 5e, fait du basket et veut devenir médecin, comme le docteur Khouani.

    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/09/18/le-viol-passage-presque-inevitable-de-la-migration-a-marseille-huit-femmes-r

    #VSS #violences_sexuelles #migrations #femmes #femmes_migrantes #témoignage #asile #réfugiés #viols #abus_sexuels #mariage_forcé #prostitution #néo-esclavage #esclavage_sexuels #traite_d'êtres_humains #chantage

  • Solidarité avec le peuple libyen et ses paysan.ne·s suite à la tempête Daniel

    Le dimanche 10 septembre 2023, la ville de Derna en Libye, ainsi que les villages et villes voisins, ont été témoins de l’impact dévastateur de la tempête Daniel. Cette catastrophe naturelle sans précédent a profondément détruit la Libye, laissant une trace de dévastation sans précédent. La tempête Daniel, accompagnée d’inondations torrentielles dues à l’effondrement de deux barrages, a tragiquement coûté la vie à plus de 3 900 personnes, dont plus de 9 000 sont toujours portées disparues et 20 000 autres ont été déplacées de force. Malheureusement, le nombre des victimes pourrait encore augmenter. Parmi les personnes directement touchées, on compte de nombreux pêcheur·euse·s, paysan·ne·s et petits agriculteur·rice·s.

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2023/09/15/solidarite-avec-le-peuple-marocain/#comment-58862

    #international #libye

  • Immigration en Europe : Gérald Darmanin se rend lundi à Rome pour discuter de la coopération européenne
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/09/18/immigration-en-europe-gerald-darmanin-se-rend-lundi-a-rome-pour-discuter-de-

    Immigration en Europe : Gérald Darmanin se rend lundi à Rome pour discuter de la coopération européenne
    Alors que plus de 6 000 migrants sont arrivés sur l’île italienne de Lampedusa la semaine dernière, et qu’un plan d’urgence pour aider Rome à faire face à ce flux record a été annoncé par la Commission européenne, le ministre de l’intérieur français se rend à son tour en Italie, lundi 18 septembre pour discuter de la coopération européenne, a-t-il annoncé.
    « A la demande du président [Emmanuel Macron] je vais à Rome cet après-midi », a déclaré Gérald Darmanin, au micro conjoint d’Europe 1 et de CNews lundi matin, expliquant que la France voulait notamment « aider l’Italie à tenir sa frontière » extérieure, première porte d’entrée vers l’Europe en provenance d’Afrique du Nord. M. Darmanin doit rencontrer son homologue italien, Matteo Piantedosi, selon son entourage.
    Entre lundi et mercredi dernier, environ 8 500 personnes, soit plus que l’ensemble de la population de Lampedusa, sont arrivées à bord de 199 bateaux, selon les chiffres de l’agence des Nations unies pour les migrations.Cette situation a mis les capacités d’accueil de l’île sous forte tension, a généré une onde de choc politique en Italie et a relancé l’épineuse question de la solidarité européenne en matière de répartition des demandeurs d’asile pour soutenir les pays en première ligne de ces arrivées.
    « Il ne peut pas y avoir comme message donné aux personnes qui viennent sur notre sol [européen] qu’ils seront accueillis quoi qu’il arrive », a déclaré Gérald Darmanin, qui veut passer depuis Rome un message de « fermeté ».
    « Nous devons appliquer les règles européennes », a-t-il fait valoir, ajoutant : « S’il y a des demandeurs d’asile qui sont éligibles à l’asile, qui sont persécutés pour des raisons politiques, évidemment, ce sont des réfugiés. Et, dans ce cas-là, la France (…), comme elle l’a toujours fait, peut accueillir ces personnes ». Mais, dans « 60 % » des cas, ils « viennent de pays comme la Côte d’Ivoire, la Guinée, la Gambie », où « il n’y a pas de question humanitaire », selon ses dires.
    « Ce que nous voulons dire à nos amis italiens, qui je crois sont parfaitement d’accord avec nous, [c’est] que nous devons protéger les frontières extérieures de l’Union européenne et surtout tout de suite regarder les demandes d’asile, et, quand [les demandeurs] ne sont pas éligibles, les renvoyer dans leur pays », a résumé M. Darmanin.
    Il n’est pas prévu que le ministre se rende à Lampedusa, comme l’a fait la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, dimanche, afin de présenter le plan d’urgence d’aide à l’Italie, a précisé l’entourage du ministre.Ce plan d’aide en dix points, destiné à gérer l’urgence des flux migratoires vers l’Italie, prévoit de mieux répartir les demandeurs d’asile entre les pays européens ou encore de faciliter les retours. Il est censé conjuguer fermeté à l’encontre des passeurs et facilitation des voies légales d’entrée dans l’espace européen pour les candidats à l’exil éligibles à l’asile.
    La Méditerranée centrale, qui relie l’Afrique du Nord – notamment la Libye et la Tunisie – à l’Europe, est la route migratoire maritime la plus dangereuse au monde : plus de 2 000 migrants sont morts en tentant cette traversée depuis le début de l’année, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM).

    #Covid-19#migrant#migration#italie#lampedusa#france#UE#politiquemigratoire#retour#asile#routemigratoire#libye#tunisie#mediterranee#OIM#frontiere

  • ### Solidarité avec le peuple marocain !
    La Via Campesina est solidaire avec le Maroc suite à un tremblement de terre catastrophique
    Manifeste pour le soutien aux filles et femmes victimes du tremblement de terre au Maroc
    Solidarité avec le peuple libyen !

    https://entreleslignesentrelesmots.wordpress.com/2023/09/15/solidarite-avec-le-peuple-marocain

    #international #maroc #libye

  • Des pluies torrentielles en Libye font plus de 2 000 morts, selon les autorités locales – Libération
    https://www.liberation.fr/international/afrique/des-centaines-de-morts-en-libye-apres-des-pluies-diluviennes-20230911_A3E

    La #Libye est touchée depuis dimanche 10 septembre par des pluies diluviennes. « Au moins 150 personnes ont été tuées à cause des inondations provoquées par la tempête Daniel à Derna, dans les régions du Jabal Al-Akhdar et dans la banlieue d’Al-Marj », avait déclaré dans un premier temps Mohamed Massoud, porte-parole du chef de l’exécutif parallèle basé à Benghazi (est). Mais le bilan s’alourdit rapidement. Au moins 2 000 personnes seraient mortes, a ensuite affirmé Oussama Hamada, Premier ministre par intérim du gouvernement de l’est du pays, cité par l’agence AP. En outre, plus de 5 000 personnes seraient portées disparues, a chiffré Issam Abu Zriba, ministre de l’Intérieur du gouvernement de l’est, rapporte la même agence.

    • Effondrement de quatre ponts principaux et des deux barrages situés au dessus de la ville de Derna

      La crue a emporté les habitants de Derna, ses arbres, ses maisons, ses immeubles, ses rues, ses places et tout ce qui constituait un pan de cette ville de 100 000 habitants. Elle n’a laissé qu’une cicatrice béante en plein milieu de la cité. Dans un entretien téléphonique, lundi, avec le média libyen Al-Marsad, Oussama Hammad, le premier ministre de l’Est libyen, dont l’autorité n’est pas reconnue par la communauté internationale, a indiqué que dans cette ville « sinistrée », « des quartiers entiers ont disparu ». D’après lui, le bilan humain de cette calamité s’élève à plus de « 2 000 morts » et des « milliers de disparus ». Son ministre de l’intérieur, Essam Abu Zeriba, s’est montré encore plus alarmiste, en affirmant le même jour sur la chaîne satellitaire Al-Arabiya que « plus de 5 000 personnes seraient portées disparues à Derna » et que de nombreuses victimes auraient été emportées vers la mer Méditerranée. Toutes ces estimations sont provisoires. Celles-ci ne prenant pas en compte les morts et les disparus dans les autres villes touchées par le déluge comme Al-Marj, El-Baïda ou encore Benghazi, la seconde ville du pays.

      Après avoir violemment balayé la Grèce, la Turquie et la Bulgarie, tuant au moins 27 personnes sur son passage, le phénomène météorologique, qualifié d’« extrême en termes de quantité d’eau tombée » par les experts, a continué son chemin vers l’Afrique du Nord. Dans la nuit du samedi 9 au dimanche 10 septembre, il a atteint les côtes de l’Est libyen, générant des pluies diluviennes et des vents violents sur une vaste région entre Benghazi et Tobrouk, causant d’importants dégâts humains et matériels.

      https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/09/11/en-libye-plus-de-2-000-morts-dans-des-inondations-selon-les-autorites-de-l-e

      #medicane #inondation

    • Inondations en Libye : « La puissance du cyclone Daniel vient de la température très élevée de la Méditerranée »

      https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/09/12/inondations-en-libye-la-puissance-du-cyclone-daniel-vient-de-la-temperature-

      La Libye a subi de plein fouet les impacts d’un Tropical Like Cyclone (TLC), une structure dépressionnaire verticale alimentée par l’énergie d’une mer très chaude. Il s’agit de la continuité du cyclone Daniel qu’ont connu la Grèce, la Turquie et la Bulgarie la semaine dernière. Il ne s’était pas épuisé. D’habitude, ce genre de phénomènes est évacué vers l’est. Là, à cause du blocage en oméga [un anticyclone avec deux zones de basse pression accolées, formant les « pattes » de la lettre grecque oméga] qui a provoqué les fortes chaleurs en France il y a plusieurs jours, il est d’abord resté longtemps sur la Grèce, ce qui explique le niveau des précipitations pendant de longues heures. Puis, il est resté statique en mer, entre la Sicile et la Grèce. Les pluies y ont été très violentes. Les courants atmosphériques l’ont ensuite entraîné vers les côtes libyennes, où il a aussi été attiré par les températures très élevées de la mer.

      Comment expliquer de telles précipitations ? En Grèce, il y a eu jusqu’à 750 millimètres en dix-huit heures…

      Comme les vents d’altitude ne l’emportaient pas, il est resté actif très longtemps au-dessus de certaines zones. Et sa puissance vient de la température de la mer, très élevée. La moyenne de la Méditerranée était de 28 °C cet été. Dans cette atmosphère réchauffée depuis des semaines et rendue très humide à cause de l’évaporation de la Méditerranée, le cyclone se recharge au fur et à mesure. Il arrive sur les côtes libyennes bourré d’énergie. Ces fortes précipitations se déversent sur des sols désertiques encore plus asséchés par des mois de fortes chaleurs. Cela crée des ruissellements. A la fin de la saison, les cours d’eau sont aussi encombrés de déchets naturels ou humains qui empêchent le bon écoulement et favorisent les débordements. On a déjà vu ça en Sicile.
      https://justpaste.it/ay25r

      #Tropical_Like_Cyclone

  • Méditerranée : 68 migrants sauvés par le bateau « Ocean-Viking », l’Italie lui assigne un débarquement 1 500 km plus loin
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/09/10/mediterranee-68-migrants-sauves-par-le-bateau-ocean-viking-l-italie-lui-assi

    Méditerranée : 68 migrants sauvés par le bateau « Ocean-Viking », l’Italie lui assigne un débarquement 1 500 km plus loin
    Le navire-ambulance de l’ONG SOS Méditerranée est intervenu au large de la Libye, dimanche matin. Les autorités italiennes lui ont assigné le port d’Ancône, situé dans la mer Adriatique, pour les débarquer.
    Le Monde avec AFP
    L’Ocean-Viking, navire-ambulance affrété par SOS Méditerranée, a secouru soixante-huit migrants en détresse dans les eaux internationales au large de la Libye dans la matinée du dimanche 10 septembre, a annoncé l’ONG humanitaire basée en France. Les naufragés ont été trouvés sur « une embarcation en bois à double pont qui avait quitté Zouara, en Libye, la nuit dernière, a précisé l’ONG dans un communiqué. Plusieurs d’entre [eux] souffrent du mal de mer et sont actuellement soignées par l’équipe médicale de SOS Méditerranée et de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge (IFRC) à bord de l’Ocean-Viking. » Pour débarquer ces soixante-huit rescapés, les autorités italiennes ont assigné au bateau le port… d’Ancône, situé dans la mer Adriatique, « à 1 560 kilomètres (soit quatre jours de navigation) de la zone d’opération », a déploré SOS Méditerranée. Sur des photos publiées par l’ONG sur X (ex-Twitter), on y voit plusieurs dizaines de migrants entassés dans un bateau de fortune portant des gilets de sauvetage orange. Fin août, l’Ocean-Viking avait déjà secouru en mer 438 migrants en détresse dans les eaux internationales au large de la Libye et de la Tunisie avant de faire route vers Gênes (nord de l’Italie), le port sûr éloigné qui lui avait été assigné par les autorités italiennes pour débarquer les personnes rescapées.
    La Méditerranée centrale est la route migratoire la plus dangereuse du monde, selon l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). L’agence onusienne estime que depuis début 2023, 2 013 migrants y ont disparu contre 1 417 sur toute l’année 2022. En juin, un naufrage présenté comme l’un des plus graves impliquant des migrants en Méditerranée, a fait au moins 82 morts, mais en Méditerranée orientale. L’Ocean-Viking avait été retenu durant dix jours en juillet par les autorités italiennes qui lui reprochaient des défaillances de sécurité, mais il avait été autorisé à reprendre la mer le 21 juillet.

    #Covid-19#migrant#migration#mediterranee#routemigratoire#OIM#tunisie#libye#italie#traversee#associationhumanitaire#traversee#mortalite

  • En Italie, la France de nouveau visée dans l’affaire du crash d’Ustica en 1980
    https://www.lemonde.fr/international/article/2023/09/03/en-italie-la-france-de-nouveau-visee-dans-l-affaire-du-crash-d-ustica-en-198

    La catastrophe aérienne survenue près de l’île d’Ustica, dans la soirée du 27 juin 1980, fait partie des nombreux événements meurtriers partiellement inexpliqués qui parsèment l’histoire de l’Italie républicaine et continuent de hanter sa mémoire. Samedi 2 septembre, l’idée d’une implication de la France dans le drame sur fonds de tensions géopolitiques, alors fortes entre Paris et la Libye, a été relancée par un ancien président du conseil italien, Giuliano Amato. Dans un entretien accordé au quotidien national La Repubblica, il reprend la thèse défendue par les familles des victimes selon laquelle un avion français aurait été à l’origine d’un tir de missile dont l’explosion aurait touché le DC-9, qui assurait une liaison entre Bologne et Palerme, entraînant la mort de ses quatre-vingt-un occupants.

    « La version la plus crédible est celle de la responsabilité de l’aviation française avec la complicité des Américains », déclare ainsi M. Amato, 85 ans, chef de l’exécutif italien de 1992 à 1993 puis de 2000 à 2001. L’ancien responsable politique précise s’être intéressé au dossier en 1986, alors qu’il était secrétaire d’Etat auprès du président du conseil Bettino Craxi. Le scénario des événements auquel il accorde le plus de crédit dans son entretien voudrait qu’un avion de chasse français ait pris pour cible dans le ciel italien un appareil libyen dans lequel aurait dû se trouver le Guide de la révolution Mouammar Kadhafi (1942-2011), déclenchant un tir dont les passagers du DC-9 auraient été les victimes collatérales.

    Dommage qu’ils l’aient raté, cela aurait peut-être évité de détruire la #Libye 40 ans plus tard.

  • Comprendre l’affaire libyenne de Sarkozy - entretien avec Fabrice Arfihttps://www.youtube.com/watch?v=0eI90NJLnmA&ab_channel=LaMatinaled%27Ostpolitik

    Dans cet entretien réalisé le 31 août 2023 sur ma chaîne Twitch, on revient avec Fabrice Arfi sur l’affaire des financements libyens sur laquelle il enquête avec Karl Laske depuis plus de 10 ans. On parle aussi de la corruption en France et du traitement médiatique de ces affaires.

  • Tunisie : des migrants consignés dans un lycée pendant les vacances scolaires
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/08/24/tunisie-des-migrants-consignes-dans-un-lycee-pendant-les-vacances-scolaires_

    Tunisie : des migrants consignés dans un lycée pendant les vacances scolaires
    Les autorités tunisiennes ont fait de l’établissement de l’oasis de Tamerza un centre de rétention provisoire pour des dizaines de personnes expulsées de Sfax ou interceptées aux frontières libyenne ou algérienne.
    Par Monia Ben Hamadi(Tamerza (Tunisie), envoyée spéciale)
    Tamerza, oasis de montagne située à quelques kilomètres de la frontière algérienne, dans le sud-ouest de la Tunisie, est surtout connue pour ses paysages à couper le souffle, le long de canyons et de sources. A la lisière du village, une montagne rocheuse surplombe le lycée. Au début du mois d’août, alors qu’élèves et professeurs sont toujours en vacances scolaires, plusieurs agents de la garde nationale surveillent l’entrée de l’établissement. Des hommes et des femmes portant pour certains des gilets de l’organisation humanitaire du Croissant-Rouge font des va-et-vient.« Personne ne peut entrer, à part les bénévoles », avertit Salwa (le prénom a été modifié), une volontaire de la région. Profitant de la livraison de nourriture et de produits de première nécessité envoyés par des associations tunisiennes, Le Monde a pu accéder au bâtiment pendant plusieurs minutes, avant d’éveiller les soupçons des agents de sécurité présents à l’intérieur.
    Dans la cour du lycée, des tables et des chaises en plastique sont disposées de manière disparate. Abdoulaye (le prénom a été modifié), un jeune Ivoirien au physique athlétique portant une barbe de quelques jours, est installé là avec trois hommes et deux femmes. Au coucher du soleil, le groupe tente de chasser l’ennui en jouant aux cartes. « On n’a pas le droit de sortir d’ici, on ne sait pas ce qu’ils veulent faire de nous », explique le jeune homme à voix basse, sous le regard méfiant des gardes.
    Quarante-six hommes, femmes et enfants sont toujours retenus dans ce lycée à l’approche de la rentrée scolaire. La plupart ont été expulsés de Sfax puis récupérés à la frontière libyenne ou algérienne, selon Wafa, une surveillante de l’établissement qui s’est portée volontaire, avec le soutien du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux, de la Ligue tunisienne des droits de l’homme et de bénévoles indépendants pour assurer une aide vitale aux migrants en détresse. Ces bénévoles s’activent particulièrement dans les villes frontalières, dans le bassin minier de Gafsa, l’oasis de Nefta ou celle de Tamerza, qui ont connu des arrivées massives de migrants expulsés à la frontière ou arrivés directement d’Algérie. Ils se coordonnent aussi avec d’autres associations à Tunis, ou encore avec l’Organisation internationale pour les migrations, qui gère des centres d’hébergement et les procédures de retour « volontaire ». Ces aides sont fournies parallèlement au soutien apporté par le Croissant-Rouge, qui collabore principalement avec les autorités.
    Installé depuis des années à Sfax, Abdoulaye a vécu les tensions survenues dans la deuxième ville du pays après la mort d’un jeune Tunisien tué par des migrants – selon les premiers éléments de l’enquête – dans la nuit du 3 au 4 juillet. Dans la foulée, le jeune Ivoirien et plusieurs centaines d’autres migrants subsahariens ont été expulsés à la frontière avec la Libye, à l’est, près du poste-frontière de Ras Jedir. Sous la pression des ONG et des médias, les autorités tunisiennes, qui nient toujours ces expulsions, ont autorisé le Croissant-Rouge, dès le 9 juillet – après que le chef de l’Etat tunisien, Kaïs Saïed, a reçu le président de l’organisation – à se rendre dans la zone tampon entre les deux pays, dont l’accès est contrôlé par les militaires.Dans les jours qui ont suivi, ces centaines de migrants bloqués entre la mer et le désert sous une chaleur caniculaire ont été répartis dans plusieurs centres d’hébergement situés dans le sud du pays. Abdoulaye et près d’une cinquantaine d’autres personnes se sont alors retrouvés enfermés dans l’enceinte du lycée de Tamerza, le 13 juillet, dormant dans l’internat des élèves. « Ils sont bien traités, y compris par les agents de sécurité, explique Wafa, mais le problème est qu’ils n’ont pas le droit de sortir. » Selon la jeune surveillante, les autorités tunisiennes tenteraient de collecter les informations nécessaires pour établir l’identité et le parcours de chaque personne retenue sur place depuis plus d’un mois. Trois personnes qui ont exprimé leur volonté de retourner dans leur pays auraient été transférées dans un autre centre, et quarante-six autres sont toujours dans l’attente. Contactés par Wafa et ses collègues, les anciens bailleurs ou employeurs de certains de ces migrants se seraient dits prêts à les accueillir de nouveau. « Il y a même des étudiants dont nous essayons de régulariser la situation », affirme la jeune femme. Mais le temps presse et le lycée de Tamerza ne pourra plus être utilisé comme lieu de rétention ou de tri dès le début du mois de septembre, avec la rentrée scolaire. Bientôt, les lits devront être libérés pour laisser place aux élèves. Le destin des hôtes temporaires de l’internat demeure incertain.

    #Covid-19#migrant#migration#tunisie#migrationirreguliere#retention#ONG#OIM#droit#regularisation#libye#algerie#frontiere#retour#postcovid

  • V.serious mistake to let Gaddafi be killed - Tajani
    https://www.msn.com/en-us/news/world/vserious-mistake-to-let-gaddafi-be-killed-tajani/ar-AA1fmnvn

    It was a “very serious mistake” on the part of the West to let former Libyan leader Muammar Gaddafi be killed after an uprising in the Arab Spring in 2011 because his death unleashed instability in the north African nation, Deputy Premier and Foreign Minister Antonio Tajani said Wednesday. “It was a very serious mistake to let Gaddafi be killed, he may not have been the champion of democracy, but once he was finished, political instability arrived in Libya and Africa”, said Tajani, interviewed by conservative journalist Alessandro Sallusti at the Versiliana midsummer forum in Marina di Pietrasanta (Lucca) on the north Tuscan coast. Gaddafi, who presided over a rapprochement with Italy, was killed by rebels on October 20, 2011.

    – « to let be killed », comme c’est joliment dit !
    – on progresse tout de même, pour l’Irak on n’a même pas eu droit à ce constat.
    (- et pour le Niger, très bientôt ?)

    #libye

  • La Tunisie et la Libye trouvent un accord pour accueillir les migrants bloqués à la frontière
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/08/10/la-tunisie-et-la-libye-trouvent-un-accord-pour-accueillir-les-migrants-bloqu

    La Tunisie et la Libye trouvent un accord pour accueillir les migrants bloqués à la frontière
    Le Monde avec AFP
    La Tunisie et la Libye ont annoncé jeudi 10 août s’être entendus pour se répartir l’accueil des migrants africains subsahariens bloqués, pour certains depuis un mois, près du poste frontière de Ras Jedir, après y avoir été conduits par la police tunisienne, selon de multiples témoignages. Lors d’une rencontre entre les ministres de l’intérieur des deux pays à Tunis mercredi, « on s’est mis d’accord pour se partager les groupes de migrants présents sur la frontière », a confirmé à l’Agence france-Presse (AFP) un porte-parole du ministère tunisien. Environ trois cents migrants originaires d’Afrique subsaharienne étaient encore bloqués ces derniers jours dans des conditions très précaires sur une langue de terre au bord de la mer, dans la zone tampon de Ras Jedir, ont affirmé à l’AFP des sources humanitaires. « La Tunisie va prendre en charge un groupe de 76 hommes, 42 femmes et 8 enfants », a précisé le porte-parole tunisien, Faker Bouzghaya. C’est le ministère de l’intérieur libyen qui a le premier annoncé dans la nuit la conclusion d’un accord bilatéral « pour une solution consensuelle, afin de mettre fin à la crise des migrants irréguliers, bloqués dans la zone frontalière ». Côté tunisien, le communiqué officiel s’est borné à annoncer que le ministre tunisien Kamel Feki avait reçu son homologue libyen, Imed Trabelsi, soulignant le besoin d’une « coordination des efforts pour trouver des solutions qui tiennent compte des intérêts des deux pays ».
    L’accord prévoit que les Libyens prendront en charge le reste des migrants bloqués, de 150 à 200 personnes. « Le transfert du groupe a eu lieu hier [mercredi] dans des centres d’accueil à Tataouine et Médenine avec la participation du Croissant-Rouge » tunisien (CRT), a ajouté M. Bouzghaya.
    Dans un nouveau communiqué jeudi, le ministère libyen a annoncé qu’« il n’y avait plus aucun migrant irrégulier dans la zone frontalière » après l’accord bilatéral. « Des patrouilles sont organisées en coordination » entre les deux pays pour « sécuriser la frontière ». Jusqu’à 350 personnes ont été bloquées à Ras Jedir, parmi lesquelles 12 femmes enceintes et 65 enfants et mineurs, d’après des sources humanitaires et selon lesquelles l’essentiel des aides (nourriture, eau, soins médicaux) leur était apporté depuis le 20 juillet par le Croissant-Rouge libyen avec le soutien des agences onusiennes. Après la mort le 3 juillet d’un Tunisien lors d’une rixe avec des migrants à Sfax, épicentre de l’émigration clandestine en Tunisie, « au moins 2 000 ressortissants subsahariens » ont été « expulsés » par les forces de sécurité tunisiennes et déposés dans des zones inhospitalières aux frontières libyenne, tunisienne et algérienne, avaient rapporté plusieurs sources humanitaires à l’AFP. Le 12 juillet, le CRT a mis à l’abri, environ 630 personnes récupérées à Ras Jedir, selon des ONG. Il en a aussi pris en charge environ 200 autres, refoulées initialement vers l’Algérie. Mais les semaines suivantes, divers médias dont l’AFP ont documenté avec des témoignages de migrants, des gardes-frontières libyens et d’ONG, que plus de 350 migrants se trouvaient toujours à Ras Jedir. Des centaines d’autres migrants affluent en outre en Libye, en provenance de Tunisie, à la hauteur de Al’Assah, à 40 kilomètres au sud de Ras Jedir, errant sans nourriture ni eau jusqu’à ce que des gardes libyens viennent à leur secours, a constaté une équipe de l’AFP début août. L’ONU a dénoncé, le 1er août depuis son siège de New York, « l’expulsion de migrants de Tunisie vers la Libye », appelant à ce que « les expulsions cessent immédiatement ». Les autorités tunisiennes ont réfuté deux jours plus tard « les allégations sur des expulsions », évoquant des « imprécisions voire des contrevérités ». Depuis début juillet, « au moins 27 migrants » sont morts dans ce désert et « 73 sont portés disparus », a affirmé cette source. La Libye, qui compte sur son sol plus de 600 000 migrants, a elle été épinglée par plusieurs rapports de l’ONU sur de graves violences à leur encontre.

    #Covid-19#migration#migrant#tunisie#libye##ONU#violence#refoulement#frontiere#afriquesusaharienne#politiquemigratoire#migrationirreguliere#postcovid#crise

  • « Cela fait déjà 3 semaines » : à bout de forces, des migrants manifestent dans le désert pour revenir en Tunisie - InfoMigrants
    https://www.infomigrants.net/fr/post/50801/cela-fait-deja-3-semaines--a-bout-de-forces-des-migrants-manifestent-d

    « Cela fait déjà 3 semaines » : à bout de forces, des migrants manifestent dans le désert pour revenir en Tunisie
    Par Louis Chahuneau Publié le : 02/08/2023
    Près de 150 migrants subsahariens sont toujours bloqués, depuis le début du mois de juillet, en plein désert, à Ras Jedir, dans la zone transfrontalière entre la Tunisie et la Libye. Ils ont été abandonnés là par les autorités de Tunis. Mardi, ils ont improvisé une manifestation pour réclamer leur retour en Tunisie et l’aide de la communauté internationale, pour l’instant sourde à leurs appels. La situation est toujours aussi déplorable à la frontière entre la Tunisie et la Libye, où des centaines de migrants subsahariens se sont fait expulser par les autorités de Tunis, en plein désert, au début du mois de juillet. A Ras Jdir, dans la zone transfrontalière, un groupe de 150 migrants ivoiriens, maliens ou encore nigérians, sont bloqués en pleine nature, sans eau sans nourriture et sans abris contre la chaleur depuis maintenant trois semaines.
    Face au silence assourdissant des autorités internationales et à l’inertie de la Tunisie, ils ont organisé ce mardi une manifestation en plein désert pour réclamer de l’aide, un retour en Tunisie, un accueil dans un camp de réfugiés ou même un départ vers l’Europe. « Cela fait déjà 3 semaines que nous sommes là, témoigne Kelvin un jeune nigérian de 33 ans joint au téléphone par InfoMigrants. Nous avons manifesté pour interpeller les autorités car on nous traite comme des animaux, mais le président tunisien ne veut pas répondre à nos appels ». Dans une vidéo envoyée par le jeune homme, on peut voir quelques dizaines d’exilés à la frontière tunisienne brandir des pancartes en carton indiquant en anglais ou en arabe « We need your help » ou encore « Please Tunisian government, take us back ». D’autres tapent sur des casseroles en métal à seulement quelques mètres de militaires tunisiens qui se contentent de les observer.
    Arrivé en Tunisie il y a un peu moins d’un an avec son frère pour travailler dans le bâtiment, Kelvin n’a plus de nouvelles de lui depuis leur expulsion en bus dans le désert par les forces de l’ordre tunisiennes. Selon lui, son frère a été expulsé à la frontière algérienne. D’après l’ONG américaine Human Rights Watch, au moins « 1 200 ressortissants subsahariens » ont été expulsés de Tunisie à la frontière libyenne ou algérienne, depuis début juillet.
    Le groupe de migrants a reçu il y a 5 jours quelques colis humanitaires déposés par le Croissant Rouge libyen et l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), mais ils n’ont désormais plus rien : « Nous n’avons ni eau ni nourriture, beaucoup de gens sont malades dont des enfants », témoigne Kelvin, l’un des rares exilés à avoir réussi à charger son téléphone portable avec la complicité de « bons policiers libyens ». Les migrants ont tendu des bâches sur les rares arbres pour se protéger du soleil, mais ils souffrent également du froid pendant la nuit. « J’aimerais pouvoir revenir en Tunisie, certains d’entre nous ont de la famille là-bas, et des activités commerciales, mais les militaires nous ont prévenus qu’ils nous tireraient dessus si on essayait de franchir la frontière. On appelle n’importe qui à nous venir en aide, car on ne pourra pas se battre à mains nues contre les militaires armés », prévient Kelvin.
    Pour l’instant, quasiment aucune autorité internationale n’a réagi aux exactions qui se multiplient depuis début juillet en Tunisie, à la suite du discours xénophobe de Kaïs Saïed en février dernier. « Nous sommes profondément préoccupés par l’expulsion de migrants, réfugiés et demandeurs d’asile de Tunisie vers les frontières avec la Libye, et aussi avec l’Algérie », a déclaré ce mardi Farhan Haq, le porte parole du secrétaire adjoint des Nations unies.
    Quelques jours plus tôt, le Haut commissariat aux réfugiés (HCR) et l’OIM avaient réclamé des « solutions urgentes » concernant les centaines de migrants bloqués à la frontière tunisienne, mais cet appel semble être resté lettre morte, et ce malgré la vingtaine de morts décomptés par InfoMigrants dans le désert depuis début juillet. Un bilan qui pourrait être bien plus élevé en raison de l’étendue de la zone. L’Union européenne, qui vient pourtant de passer un « partenariat stratégique » avec la Tunisie à hauteur de 105 millions d’euros pour limiter les traversées maritimes vers l’Europe, n’a pour l’instant pas réagi.
    De son côté, la Tunisie a rejeté « les allégations » de mauvais traitements contre des migrants subsahariens fin juillet. La Tunisie « n’hésite pas à accomplir son devoir d’aide humanitaire aux immigrés africains et autres étrangers sur le sol tunisien », pouvait-on lire dans ce communiqué publié par le ministère de l’Intérieur.

    #Covid-19#migrant#migration#tunisie#UE#HCR#algerie#libye#frontiere#migrationirreguliere#expulsion#routemigratoire#afriquesubsaharienne

  • North Africa a ’testing ground’ for EU surveillance technology

    The EU is outsourcing controversial surveillance technologies to countries in North Africa and the Sahel region with no human rights impact assessments, reports say.

    Controversial surveillance technologies are being outsourced by the European Union to countries in North Africa and the Sahel region with no transparency or regulation, according to two new reports.

    Funding, equipment and training is funnelled to third countries via aid packages, where autocratic governments use the equipment and techniques to surveil the local population.

    Beyond the borders of Europe, the movements of asylum seekers are being policed and eventually used to assess their asylum applications.

    Antonella Napolitano, author of a report for human rights group EuroMed Rights, told Middle East Eye that the implementation of these projects is opaque and lacks proper consideration for the rights of civilians and the protection of their data.

    “There aren’t enough safeguards in those countries. There aren’t data protection laws,” Napolitano said. “I think the paradox here is that border externalisation means furthering instability [in these countries].”

    The complex web of funding projects and the diversity of actors who implement them make the trails of money difficult to track.

    “This enables states to carry out operations with much less transparency, accountability or regulation than would be required of the EU or any EU government,” Napolitano told MEE.

    The deployment of experimental technologies on the border is also largely unregulated.

    While the EU has identified AI regulation as a priority, its Artificial Intelligence Act does not contain any stringent provision for the use of the technologies for border control.

    “It’s creating a two-tiered system,” Napolitano told MEE. “People on the move outside the EU don’t have the same rights by design.”
    Asylum claims

    The surveillance of migrants on the move outside of Europe is also brought to bear back inside Europe.

    A Privacy International report published in May found that five companies were operating GPS tagging of asylum seekers for Britain’s Home Office.

    “It’s been massively expanded in the past couple of years,” Lucie Audibert, legal officer at Privacy International, told MEE.

    Other, less tangible forms of surveillance are also deployed to monitor asylum seekers. “We know, for example, that the Home Office uses social media a lot… to assess the veracity of people’s claims in their immigration applications,” Audibert told MEE.

    According to the reports, surveillance equipment and training is supplied by the EU to third countries under the guise of development aid packages.

    These include the EU Emergency Trust Fund for Africa (EUTF for Africa) and now the Neighbourhood, Development and International Cooperation Instrument.

    The reports cite multiple instances of how these funding instruments served to bolster law enforcement agencies in Algeria, Egypt, Libya and Tunisia, furnishing them with equipment and training that they then used against the local population.

    The EUTF for Africa allocated 15 million euros ($16.5m USD) in funding to these countries to train up a group of “cyber specialists” in online surveillance and data extraction from smart devices.

    A Privacy International investigation into the role of CEPOL, the EU law enforcement training agency, revealed that it had supplied internet surveillance training to members of Algeria’s police force.

    The investigation highlights a potential connection between these tactics, which contravened the EU’s own policies on disinformation, and the wave of online disinformation and censorship driven by pro-regime fake accounts in the aftermath of the 2019 Hirak protests in Algeria.
    A dangerous trend

    For journalist Matthias Monroy, the major development in border surveillance came after the so-called migration crisis of 2015, which fuelled the development of the border surveillance industrial complex.

    Prior to that, Europe’s border agency, Frontex, was wholly dependent on member states to source equipment. But after 2015, the agency could acquire its own.

    “The first thing they did: they published tenders for aircraft, first manned and then unmanned. And both tenders are in the hands of private operators,” Monroy told MEE.

    Frontex’s drones are now manned by the British company Airbus. “The Airbus crew detected the Crotone boat,” Monroy told MEE, referring to a shipwreck off the coast of Crotone, Italy, in February.

    “But everybody said Frontex spotted the boat. No, it was Airbus. It’s very difficult to trace the responsibility, so if this surveillance is given to private operators, who is responsible?”

    Almost 100 people died in the wreck.

    Since 2015, with the expansion of the border surveillance industrial complex, its digitisation and control has been concentrated increasingly in the hands of private actors.

    “I would see this as a trend and I would say it is very dangerous,” Monroy said.

    https://www.middleeasteye.net/news/eu-north-africa-surveillance-technology-testing-ground

    #surveillance #technologie #test #Afrique_du_Nord #Sahel #asile #migrations #réfugiés #frontières #intelligence_artificielle #IA #EU_Emergency_Trust_Fund_for_Africa (#EUTF_for_Africa) #développement #Emergency_Trust_Fund #Algérie #Egypte #Tunisie #Libye #complexe_militaro-industriel #contrôles_frontaliers #Frontex #Airbus #drones #privatisation

    ping @_kg_

    • The (human) cost of Artificial Intelligence and Surveillance technology in migration

      The ethical cost of Artificial Intelligence tools has triggered heated debates in the last few months. From chatbots to image generation software, advocates and detractors have been debating the technological pros and societal cons of the new technology.

      In two new reports, Europe’s Techno-Borders and Artificial Intelligence: The New Frontier of the EU’s Border Externalisation Strategy, EuroMed Rights, Statewatch and independent researcher Antonella Napolitano have investigated the human and financial costs of AI in migration. The reports show how the deployment of AI to manage migration flows actively contribute to the instability of the Middle East and North African region as well as discriminatory border procedures, threatening the right to asylum, the right to leave one’s country, the principle of non-refoulement as well as the rights to privacy and liberty.

      European borders and neighbouring countries have been the stage of decades-long efforts to militarise and securitise the control of migration. Huge sums of public money have been invested to deploy security and defence tools and equipment to curb arrivals towards the EU territory, both via externalisation policies in countries in the Middle East and North Africa and at the EU’s borders themselves. In this strategy of “muscling-up” the borders, technology has played a crucial role.

      EuroMed Rights’ new reports highlight how over the decades, surveillance technology has become a central asset in the EU’s migration policies with serious impacts on fundamental rights and privacy. In Artificial Intelligence: The New Frontier of the EU’s Border Externalisation Strategy we analyse how surveillance technology has been a crucial part of the European policy of externalisation of migration control. When surveillance technologies are deployed with the purpose of anti-smuggling, trafficking or counterterrorism in countries where democracies are fragile or there are authoritarian governments, they can easily end up being used for the repression of civic space and freedom of expression. What is being sold as tools to curb migrant flows, could actually be used to reinforce the security apparatus of repressive governments and fuel instability in the region.

      At the same time, Europe’s Techno-Borders highlights how this security obsession has been applied to the EU’s borders for decades, equipping them with ever-more advanced technologies. This architecture for border surveillance has been continuously expanding in an attempt to detect, deter and repel refugees and migrants. For those who manage to enter, they are biometrically registered and screened against large-scale databases, raising serious concerns on privacy violations, data protection breaches and questions of proportionality.

      Decades of “muscling-up” the EU’s borders keep showing the same thing: military, security, defence tools or technology do not stop migration, they only make it more dangerous and lethal. Nonetheless, the security and surveillance apparatus is only expected to increase: more and more money is being invested to research and develop new tech tools to curb migration, including through Artificial Intelligence.

      In a context that is resistant to public scrutiny and accountability, and where the private military and security sector has a vested interest in expanding the surveillance architecture, it is crucial to keep monitoring and denouncing the use of these technologies, in the struggle for a humane migration policy that puts the right of people on the move at the centre!

      Read our reports here:

      - Artificial Intelligence: the new frontier of the EU’s border externalisation strategy: https://euromedrights.org/wp-content/uploads/2023/07/Euromed_AI-Migration-Report_EN-1.pdf
      - Europe’s Techno-Borders: https://euromedrights.org/wp-content/uploads/2023/07/EuroMed-Rights_Statewatch_Europe-techno-borders_EN-1.pdf

      https://euromedrights.org/publication/the-human-cost-of-artificial-intelligence-and-surveillance-technology
      #rapport #EuroMed_rights

  • Les pays méditerranéens jettent les bases d’un fonds commun pour réguler les flux migratoires
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/07/24/migration-a-rome-les-pays-mediterraneens-jettent-les-bases-d-un-fonds-commun

    Les pays méditerranéens jettent les bases d’un fonds commun pour réguler les flux migratoires
    La présidente du conseil italien, Giorgia Meloni, entend promouvoir un nouveau mode de coopération entre pays d’immigration et d’émigration, sur le modèle de l’accord signé par l’Union européenne avec la Tunisie.
    Le Monde avec AFP
    Publié le 24 juillet 2023 à 11h41, modifié le 24 juillet 2023 à 13h07
    Le sommet des dirigeants du pourtour méditerranéen réunis dimanche 23 juillet à Rome par Giorgia Meloni a esquissé les contours d’un fonds pour financer les projets d’investissements et le contrôle aux frontières, avec l’objectif à moyen terme de mieux réguler les flux migratoires. A l’origine de cette conférence rassemblant les dirigeants d’une vingtaine de pays, Mme Meloni entend promouvoir un nouveau mode de coopération entre pays d’immigration et pays d’émigration, sur le modèle de l’accord signé par l’Union européenne (UE) avec la Tunisie dans le but de freiner l’arrivée de migrants en Europe. A l’issue d’une demi-journée de pourparlers, la présidente du conseil italien a annoncé la création d’un fonds qui sera abondé par une première conférence des donateurs dont la date n’a pas été arrêtée, initiative à laquelle les Emirats arabes unis ont déjà apporté 100 millions d’euros. Si aucune autre mesure concrète n’a émergé de la conférence, « c’est le début d’un long travail » avec le lancement du « processus de Rome », dont Mme Meloni a fixé les priorités. « Lutte contre l’immigration illégale, gestion des flux légaux d’immigration, soutien aux réfugiés, et surtout, la chose la plus importante, sinon tout ce que nous ferons sera insuffisant, une large coopération pour soutenir le développement de l’Afrique, et particulièrement des pays de provenance » des migrants, a-t-elle détaillé. Selon la dirigeante d’extrême droite, « les lignes de financement prioritaires doivent avant tout concerner les investissements stratégiques et les infrastructures, car c’est la manière la plus pérenne de faire de la coopération ».Parmi les personnalités présentes, les présidents de la Tunisie, Kaïs Saïed, des Emirats arabes unis, Mohammed Ben Zayed, de la Mauritanie, Mohamed Ould Ghazouani, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, le président du Conseil européen, Charles Michel, le haut-commissaire des Nations unies pour les réfugiés, Filippo Grandi, et des délégués des grandes institutions financières internationales.
    Pendant la campagne des législatives de 2022 qui l’ont portée au pouvoir, Giorgia Meloni avait promis de « stopper les débarquements » de migrants en Italie. Son gouvernement a depuis mis des bâtons dans les hélices des navires humanitaires, sans pour autant tarir les départs. Selon Rome, quelque 80 000 personnes ont traversé la Méditerranée et sont arrivées sur les côtes de la péninsule depuis le début de l’année, contre 33 000 l’an dernier sur la même période, en majorité au départ du littoral tunisien.
    Face à ce constat, Mme Meloni et la Commission européenne ont intensifié leur « dialogue » avec la Tunisie en promettant des financements si le pays s’engage à combattre l’émigration à partir de son territoire. Bruxelles et Rome ont signé la semaine dernière avec le président tunisien un protocole d’accord qui prévoit notamment une aide européenne de 105 millions d’euros destinée à empêcher les départs de bateaux de migrants et lutter contre les passeurs, ainsi que plus de retours de Tunisiens en situation irrégulière dans l’UE.Un haut responsable européen s’exprimant sous couvert de l’anonymat a confirmé que l’UE souhaitait négocier avec l’Egypte et le Maroc des partenariats similaires. Et selon Mme Meloni, il est d’autant plus important de soutenir les pays africains après la suspension par Moscou de l’accord sur les exportations de céréales ukrainiennes « La Tunisie est un pays en extrême difficulté et l’abandonner à son sort peut avoir des conséquences très graves », a-t-elle averti.
    Les ONG sont en revanche vent debout. Sea-Watch déplore que « l’UE et ses Etats membres continuent de durcir leurs politiques mortelles d’isolement », tandis que Human Rights Watch (HRW) estime que « l’Europe n’a rien appris de sa complicité dans les abus atroces commis à l’encontre des migrants en Libye ». HRW a également pointé « de graves abus », ces derniers mois, chez les forces de sécurité tunisiennes contre les migrants africains, estimant que l’UE devrait « cesser son soutien » à ce pays dans la lutte contre l’immigration irrégulière.A la suite d’affrontements ayant coûté la vie à un Tunisien le 3 juillet, des centaines de migrants africains ont été chassés de Sfax, deuxième ville du pays et principal point de départ en Tunisie pour l’émigration clandestine. Ils ont été conduits par les autorités, selon des ONG, vers des zones inhospitalières près de la Libye à l’est, et l’Algérie à l’ouest.Selon l’ONU, plus de 100 000 migrants sont arrivés en Europe au cours des six premiers mois de 2023 par la mer, depuis les côtes nord-africaines, la Turquie et le Liban. Ils étaient un peu plus de 189 000 en 2022.

    #Covid-19#migrant#migration#UE#italie#ONU#afrique#liban#turquie#libye#migrationirreguliere#politiquemigratoire#ONG#postcovid

  • Fabio de Masi zum Wirecard-Skandal : Der Schatten des Jan Marsalek (Teil 1)
    https://www.berliner-zeitung.de/wirtschaft-verantwortung/fabio-de-masi-zum-wirecard-skandal-der-schatten-des-jan-marsalek-te

    Dans l’affaire Wirecard rien n’est comme on nous le fait croire et on ne sait pas grand chose finalement. Fabio di Masi est l’homme qui en sait tout ce qu’on peut savoir si on me fait pas partie des acteurs et intéressés. Voici son compte rendu.

    20.7.2023 von Fabio De Masi - Vor drei Jahren entpuppte sich der deutsche Zahlungsdienstleister Wirecard AG als großes Geldwäsche- und Betrugssystem. Der Wirecard-Manager Jan Marsalek, der sich mit Geheimdiensten umgab, ist seither untergetaucht.

    Doch es drängt sich der Eindruck auf, dass deutsche Behörden kein Interesse an seiner Auslieferung haben, meint unser Kolumnist Fabio De Masi, der sich als erster Bundestagsabgeordneter bereits vor der Insolvenz kritisch mit Wirecard befasste.

    Er steht auf der Fahndungsliste von Interpol und war bei „Aktenzeichen XY... Ungelöst“ im ZDF zu sehen. Am Münchener Flughafen hing sein Fahndungsplakat gleich an der Passkontrolle. Politik und Sicherheitsbehörden vollziehen das Kunststück, fieberhafte Suche nach einem Mann vorzutäuschen, den sie auf gar keinen Fall in Deutschland wiederhaben wollen: Jan Marsalek, den früheren Chief Operating Officer und Asien-Vorstand des Zahlungsdienstleisters Wirecard AG, der im Zuge der Wirecard-Milliardenpleite vor drei Jahren am 19. Juni 2020 unbehelligt Deutschland verließ.

    Jan Marsalek ist eine schillernde Figur: Er ist ein Enkel von Hans Marsalek, eines antifaschistischen Widerstandskämpfers und KZ-Überlebenden, der nach dem Krieg in Österreich Polizist wurde. Jan Marsalek brach hingegen die Schule ab, lernte Programmieren, stieg früh zum Vorstand eines späteren DAX-Konzerns auf und umgab sich mit Geheimdiensten aus Ost und West.

    Marsalek – ein Strohmann der Nachrichtendienste?

    Ich bin mittlerweile überzeugt: Jan Marsalek war ein Strohmann – auch unserer Sicherheitsbehörden. Er bahnte Zahlungsprojekte im Umfeld von Staaten an, die als geopolitische Rivalen des Westens galten, wie Russland, oder von enormer sicherheitspolitischer Bedeutung waren, wie Saudi-Arabien. Die frühere Bundeskanzlerin Angela Merkel lobbyierte gar für Wirecard persönlich bei Staatspräsident Xi Jinping, dem mächtigsten Mann der Weltmacht China, obwohl sie zuvor wegen der kritischen Medienberichte über Wirecard einen Termin mit dem CEO Markus Braun absagen ließ. Der jetzige Bundeskanzler Olaf Scholz hatte zuvor im Rahmen des deutsch-chinesischen Finanzdialogs erreicht, dass Wirecard der erste ausländische Zahlungsanbieter werden sollte, der über eine grenzüberschreitende Zahlungslizenz für China verfügte.

    Das Interesse von Politik und Sicherheitsbehörden an Wirecard war die Lebensversicherung von Jan Marsalek auf diesem kriminellen Pulverfass. Ich habe gemeinsam mit Journalisten aus Deutschland und Österreich auch noch nach meinem Ausscheiden aus der Politik zahlreiche Verbindungen des Marsalek-Netzwerkes in die kritische Sicherheitsinfrastruktur der Bundesrepublik Deutschland offengelegt. Aber im Bundestag und auch in weiten Teilen der Medien wurde darüber der Mantel des Schweigens gelegt. Vorbei die Zeiten, als man es mit nahezu jeder Schlagzeile über Wirecard in die Abendnachrichten schaffte und sich als knallharter Aufklärer feiern lassen konnte. Im Ukraine-Krieg vergeht kein Tag, an dem sich die Politik nicht für Härte gegen Russland brüstet. Aber ausgerechnet die zahlreichen Verbindungen von Netzwerken um Jan Marsalek mit Russland-Bezug, die etwa für die deutsche Cybersicherheit zuständig waren oder Millionen-Aufträge von der Bundeswehr erhalten, scheinen niemanden zu stören.

    Bis heute behaupten deutsche Sicherheitsbehörden gar, sie hätten nicht gewusst, wer Jan Marsalek war. Dies ist eine schlechte Lüge. Die Nachrichtendienste bedienen sich dabei eines Taschenspielertricks. Ihre Kontaktpersonen zu Marsalek waren unter anderem ehemalige Offizielle aus den Sicherheitsbehörden. Da diese keine offizielle Rolle in den Nachrichtendiensten spielen, aber sowohl mit der Arbeitsweise vertraut als auch loyal sind, behaupten unsere Geheimdienste, es habe keine offiziellen Kontakte gegeben.
    Wirecards trüber Teich und die Geheimdienste

    Dass Marsalek und Wirecard zahlreiche Verbindungen zu Personen aus der Welt der Nachrichtendienste unterhielten, ist belegt. Ein paar Beispiele:

    Der Bundesnachrichtendienst (BND) nutzte Kreditkarten von Wirecard. Einmal forderte Marsalek die gesamten Kundendaten von Wirecard mit der Begründung an, der BND wolle diese nutzen. Der BND dementiert jedoch, dass es eine solche Anforderung gegeben habe.

    Der ehemalige deutsche Geheimdienstkoordinator der Bundesregierung, Klaus-Dieter Fritsche (CSU), beriet mit Zustimmung des Bundeskanzleramtes Wirecard sowie den früheren österreichischen Verfassungsschutz (BVT) während des BVT-Skandals rund um russische Einflussnahme auf den österreichischen Geheimdienst. Zwei Schlüsselfiguren in diesem Skandal, die österreichischen Agenten Martin W. und Egisto O., waren eng mit Marsalek verbunden. W. hatte gar ein Büro in Marsaleks Villa, beiden wurde von Staatsanwälten vorgeworfen, bei der Flucht von Marsalek geholfen zu haben.

    Wirecard: Ließ Marsalek deutsche Politiker ausspionieren?

    Der frühere deutsche Geheimdienstkoordinator Bernd Schmidbauer (CDU) sprang beiden Agenten immer wieder öffentlich zur Seite. Er suchte Marsalek auch auf, nachdem dieser 2018, nach dem Anschlag auf den ehemaligen russischen Geheimagenten Sergei Skripal, mit streng vertraulichen Unterlagen der Organisation für das Verbot von Chemiewaffen vor britischen Investoren herumgewedelt haben soll. In dem Dokument sei eine Verbindung Russlands zu dem Anschlag bestritten worden und es soll die Formel für das Nervengift Nowitschok enthalten gewesen sein. Dies rief vermutlich die britischen Dienste auf den Plan. Schmidbauer diskutierte mit Marsalek die Reform der Nachrichtendienste. Ein ungewöhnliches Interessengebiet für einen DAX-Vorstand und einen Pensionär. Schmidbauer behauptet auch, sich mit einem „Ehemaligen“ aus den Sicherheitsbehörden ausgetauscht zu haben und öfter heikle Missionen zu übernehmen.

    Marsalek interessierte sich für Cyberspionage und Überwachungstechnologie. Er tummelte sich im Umfeld der Münchner Sicherheitskonferenz auf einem „Policy Innovation Forum“ des deutschen Tech-Milliardärs Christian Angermayer, bei dem Jens Spahn (CDU) und Donald Trumps Ex-Botschafter Richard Grenell auftraten. Auf der Sicherheitskonferenz muss man eine Sicherheitsprüfung durchlaufen.

    Marsalek war zudem mit einem früheren CDU-Politiker und Auto-Manager verabredet, dem Vorsitzenden des Supervisory Boards der Beratungsfirma Agora Strategy, die vom ehemaligen Präsidenten der Münchner Sicherheitskonferenz, dem Ex-Staatssekretär und Diplomaten Wolfgang Ischinger, gegründet wurde. Denn Marsalek strebte auch nach dem Mord am saudischen Oppositionellen Jamal Kashoggi Geschäfte zur Zahlungsabwicklung in Saudi-Arabien an und brauchte dazu Kontakte, etwa zum saudischen Blutprinzen. Über Agora Strategy sollen im Umfeld der Münchner Sicherheitskonferenz etwa Rüstungsunternehmen und Diktaturen mit Geldzahlungen zusammengebracht werden, wie der Spiegel berichtete. So konnten diskret Deals eingefädelt werden. Später sollte etwa ebenfalls der Spiegel berichten, dass die bayerische Rüstungsfirma Hensoldt AG, trotz Waffenembargos und Beteiligung des Bundes an dem Rüstungskonzern, den saudischen Geheimdienst belieferte. Marsalek soll Interesse gehabt haben, für die futuristische Megacity Neom, die das saudische Königshaus mit seinen Petrodollars in der Wüste errichten will, die Zahlungsinfrastruktur aufzusetzen. Deutsche Sicherheitsbehörden hätten sicher keine Einwände gehabt, über Marsalek trotz des Embargos einen Fuß in der Tür zu Saudi-Arabien zu behalten und Einblick in die Finanzflüsse zu bekommen. Die Bundesregierung verfolgt seit dem Ukraine-Krieg wieder eine Annäherung an das Regime. Scholz besuchte kürzlich Saudi-Arabien. Mit dabei im Regierungsflieger: eine Firma, die sich um Zahlungstechnologie kümmert und mit Wirecard eine sogenannte Flüchtlingskarte aufsetzen wollte.

    Der frühere Wirecard-Manager Burkard Ley, der bis heute nicht strafrechtlich belangt wird, obwohl er eine zentrale Figur im Betrugssystem von Wirecard war, half dem Ex-Geheimdienstkoordinator Fritsche wiederum, einem französischen Investor den Einstieg bei der deutschen Waffenschmiede Heckler & Koch zu ermöglichen. Dies erforderte, eine komplizierte Struktur aus Briefkastenfirmen aufzusetzen, da das Unternehmen zur kritischen Infrastruktur zählte und die Genehmigung unter Vorbehalt der Bundesregierung stand.. Die Bundesregierung winkte den Deal durch.

    Marsalek soll auch für hochrangige konservative Beamte aus dem österreichischen Verteidigungs- und Innenministerium Pläne zum Aufbau einer Miliz zur Flüchtlingsabwehr mit der russischen Söldnertruppe Wagner in Libyen verfolgt haben. Die westliche Militärintervention hatte das Land endgültig ins Chaos gestürzt, und der innenpolitische Streit um die Flüchtlingskrise tobte, was Sebastian Kurz (ÖVP) in Österreich an die Macht brachte. Marsalek und der österreichische Vizekanzler der ÖVP verfolgten das Projekt eben jener zuvor erwähnten digitalen Flüchtlingskarte, die es in den bayerischen Koalitionsvertrag schaffte. Marsalek wurde direkt über diese Beratungen informiert. Die Liste ließe sich fortsetzen.
    Die Rolle des Online-Glückspiels

    Wirecard entstand aus der Verschmelzung von EBS und Wire Card. Das Unternehmen wurde mit der Abwicklung von Zahlungen für Online-Glücksspiel und -Pornos zur Jahrtausendwende groß. Das Bezahlen im Internet steckte noch in den Kinderschuhen. Internet war Neuland, es war langsam und hing an der Telefonbuchse. Es gab noch kein Amazon und keine Smartphones.

    Doch das Internet war auch Wilder Westen. Das Unternehmen lenkte Nutzer ohne ihr Wissen beim Aufruf von pornografischen Inhalten über sogenannte Dialer auf 0190-Nummern um. Diese schnellere Überholspur auf der Datenautobahn mündete in horrenden Telefonrechnungen, die neugierige Teenager oder beschämte Ehepartner häufig zahlten, bis Verbraucherschützer einschritten. Die Zahlungsabwicklung war jedoch mit hohen Rechtsrisiken verbunden, da wohl auch Zahlungen für Inhalte aus dem Bereich des Kindesmissbrauchs abgewickelt wurden.

    Online-Glücksspiel wurde in den USA gegen Ende der Amtszeit von George W. Bush mit dem „Unlawful Internet Gambling Online Act“ scharf sanktioniert. Es galt als Geldwäschemagnet für organisierte Kriminalität und Terrorfinanzierung, da sich Umsätze leicht manipulieren lassen, aber auch als Spielwiese für Geheimdienste, die hierüber schmutzige Zahlungsflüsse verfolgten und dubiose Geschäftsleute anwarben.

    Wirecard: Weiß Olaf Scholz etwa, wo Jan Marsalek steckt?

    So tummelten sich etwa der frühere Chef des Verfassungsschutzes Hans-Georg Maaßen sowie Ex-BND-Chef August Hanning im Umfeld einer Schweizer Firmengruppe, Pluteos AG bzw. der dazugehörigen System 360 Deutschland, wie Hans-Martin Tillack einst im Stern berichtete. Pluteos bezeichnet sich als „private intelligence agency“ und System 360 als „Unternehmensberatung im Bereich wirtschaftskrimineller Handlungen“. Der Gründer des Sportwettenanbieters Tipico, gegen dessen Franchisenehmer immer wieder wegen Geldwäsche der organisierten Kriminalität ermittelt wurde, soll wiederum über eine Firma erhebliche Anteile an System 360 halten. Hanning gehörte zudem mit dem ehemaligen Nato-Chef Anders Fogh Rasmussen dem Aufsichtsrat einer lettischen Bank an, die sich zunächst im Eigentum eines russischen Tycoons befand. Ein Whistleblower soll gegenüber der lettischen Staatspolizei vor kriminellen Netzwerken innerhalb der Bank gewarnt haben. Später schritten die Europäische Zentralbank (EZB) und die lettische Bankenaufsicht ein und der Geschäftsbetrieb der Bank wurde untersagt. Hanning drohte die Pfändung einer Immobilie, von Firmenanteilen und von Teilen seiner Pension. Er überschrieb dann Firmenanteile seiner Familie und auch Grundvermögen an seine Ehefrau, um die Pfändung abzuwenden, wie zumindest die Zeitung Welt mutmaßte.

    Wirecard unter Druck

    Dem Management des britischen Zahlungsabwicklers Neteller drohten wegen der Verschärfung der Gesetze gegen Zahlungsabwicklung für Online-Glücksspiel in den USA etliche Jahre Haft, und das Unternehmen zog sich letztlich aus dem amerikanischen Markt zurück. Zudem gab es immer mehr Gratis-Pornos im Netz. Wirecards Geschäftsmodell kam so unter Druck, da die USA ein wichtiger Markt des Unternehmens waren. Teilweise soll sich der Wirecard-Vorstand aus Furcht vor Strafverfolgung nicht getraut haben, in die USA einzureisen.

    Wirecard verkaufte sich fortan als ein Unternehmen, das vom Schmuddelkind der New Economy zum Tech-Wunder gereift sei und sich neu erfunden habe. Die Umsätze und Gewinne des Unternehmens wuchsen unbeeindruckt jedes Jahr, wie mit dem Lineal gezogen. Doch 2015 stellten die USA ein Rechtshilfeersuchen gegen die Wirecard-Tochter Click2Pay, die Zahlungen für Online-Poker in den USA abwickelte, und es kam zu einer Razzia der Staatsanwaltschaft München. Jan Marsalek wurde als Beschuldigter geführt.

    Nationale Sicherheit: Eine unbequeme Wahrheit kommt ans Licht

    Dann kam Donald Trump an die Macht. Jan Marsalek suchte Hilfe bei einem ehemaligen CIA-Beamten, der Trump nahestand. Die Ermittlungen gegen Wirecard wurden im intensiven Dialog mit US-Behörden eingestellt, und Wirecard bekam kurze Zeit später sogar den Zuschlag für das Prepaidkarten-Geschäft der CitiGo der USA und ermöglichte die Aufladung der Karten mit hohen Summen. Prepaidkarten gelten als zentrales Werkzeug der organisierten Kriminalität zur Verschleierung von Geldflüssen. Die Kommunikation mit dem CIA-Beamten deutet auf einen Deal mit den US-Behörden hin. Ließ man Wirecard gewähren und konnte im Gegenzug die Geldflüsse von Kriminellen und Terroristen verfolgen?

    Später haben sich dann zwei frühere CDU-Ministerpräsidenten, Ole von Beust und Peter Harry Carstensen, für Wirecard und die Liberalisierung des Online-Glücksspiels in Deutschland engagiert. Wirecard sollte zentraler Zahlungsabwickler nach der Liberalisierung des Glücksspiels in Deutschland werden. Es kam zu Treffen mit dem hessischen Ministerpräsidenten Volker Bouffier und dem EU-Kommissar Guenther Oettinger, der eine mutmaßliche Schlüsselfigur der italienischen Mafia einst als Freund bezeichnete. Auch der Kontakt zum Ministerpräsidenten Baden-Württembergs Winfried Kretschmann war angestrebt. Es war eine schwarz-grüne Achse, die sich letztlich für die Liberalisierung des Online-Glückspiels engagierte.

    Fabio De Masi zum Wirecard-Skandal : Der Schatten des Jan Marsalek (Teil 2)
    https://www.berliner-zeitung.de/wirtschaft-verantwortung/wirecard/fabio-de-masi-zum-wirecard-skandal-der-schatten-des-jan-marsalek-te

    19.6.2023 von Fabio De Masi - Vor drei Jahren entpuppte sich der deutsche Zahlungsdienstleister Wirecard AG als großes Geldwäsche- und Betrugssystem. Der Wirecard-Manager Jan Marsalek, der sich mit Geheimdiensten umgab, ist seither untergetaucht. Doch es drängt sich der Eindruck auf, dass deutsche Behörden kein Interesse an seiner Auslieferung haben, meint unser Kolumnist Fabio De Masi, der sich als erster Bundestagsabgeordneter bereits vor der Insolvenz kritisch mit Wirecard befasste. Den ersten Teil des Artikels können Sie hier lesen.

    Marsalek und die Staatsanwaltschaft

    Die Staatsanwaltschaft München und Jan Marsalek sind ein eigenes Kapitel. So leitete die Staatsanwaltschaft ein sogenanntes Leerverkaufsverbot (Leerverkäufe sind Wetten auf sinkende Aktienkurse) für Aktien der Wirecard AG bei der Finanzaufsicht BaFin ein, um angebliche Marktmanipulation durch angelsächsische Spekulanten abzuwehren. Es war das erste Leerverkaufsverbot zugunsten eines einzelnen Unternehmens in der Geschichte der Bundesrepublik. Grundlage war eine wilde Story, wonach die Nachrichtenagentur Bloomberg Wirecard um sechs Millionen Euro erpressen wolle und sonst angeblich drohte mit der Financial Times in die kritische Berichterstattung einzusteigen. Kronzeuge für dieses Märchen war ein britischer Drogendealer. Präsentiert hat die Geschichte jener Jan Marsalek, der zuvor Beschuldigter im Rechthilfeersuchen der USA war. Gleichzeitig erstattete die Finanzaufsicht bei der Staatsanwaltschaft Strafanzeige gegen den Journalisten der Financial Times Dan McCrum, der frühzeitig auf Ungereimtheiten von Wirecard in Singapur hingewiesen hatte. Ihm wurde vorgeworfen mit Leerverkäufern unter einer Decke zu stecken. Erst 2020 wurden die Ermittlungen eingestellt, nachdem der damalige Präsident der Finanzaufsicht Felix Hufeld diese auf dem Wirtschaftsgipfel der Süddeutschen Zeitung noch gegenüber mir verteidigt hatte, und damit für einen Eklat sorgte.

    Im Frühjahr 2020 war auch eine Razzia in der Wohnung von Marsalek erfolgt. Da angeblich zu wenig Polizeikräfte verfügbar waren, konnte man nicht alle wichtigen Beweismittel sichern. Am 16. Juni 2020 informierte die Finanzaufsicht die Staatsanwaltschaft, dass vermeintliche Bankbelege über die Existenz von 1,9 Milliarden Euro Guthaben auf Treuhandkonten in den Philippinen gefälscht waren, nachdem bereits die Sonderprüfer von KPMG bemängelt hatten, dass die Existenz der Guthaben und somit ein Drittel der Bilanzsumme des Dax-Konzerns nicht nachgewiesen werden konnten.

    Dies war der unmittelbare Verantwortungsbereich von Asien-Vorstand und Chief Operating Officer Jan Marsalek. Die Staatsanwaltschaft ließ jedoch Jan Marsalek in aller Ruhe mit Unterstützung der ehemaligen österreichischen BVT-Agenten und eines FPÖ-Abgeordneten ausreisen. Die Staatsanwaltschaft wartete sogar mit einem internationalen Haftbefehl, bis Marsalek zu einem mit seinem Anwalt vereinbarten Termin in München nicht erschien, da dieser versicherte, Marsalek wolle das Geld auf den Philippinen „suchen“.

    Auf meine Frage, warum die Staatsanwaltschaft Marsalek nicht sofort nach der Information der BaFin über die nicht vorhandenen Treuhandguthaben einbestellte (wohlgemerkt nach einer bereits erfolgten Razzia), entgegnete die Staatsanwältin im Untersuchungsausschuss des Deutschen Bundestages, das hätte ja ohnehin nichts gebracht, da die Postzustellung in München so langsam sei und Marsalek wäre ja dann eh schon weg gewesen.

    Abgesehen davon, dass die Staatsanwältin gar nicht gewusst haben konnte, dass Marsalek vorhatte, drei Tage später zu fliehen, und es daher keinen Sinn macht, mit dieser Begründung auf eine Vorladung oder Verhaftung zu verzichten, reichte es wenige Tage später offenbar für eine Red-Notice-Fahndung bei Interpol. Ausgerechnet die Tonbandaufzeichnung der denkwürdigen Vernehmung der Staatsanwältin im Deutschen Bundestag sollte später aufgrund eines technischen Fehlers nicht funktioniert haben. Die Untätigkeit der Staatsanwaltschaft war aber eine der vielen „Zufälle“ und „glücklichen Fügungen“, die es ermöglichten, die Ermittlungen gegen die Fluchthelfer von Marsalek vom österreichischen Verfassungsschutz einzustellen, da zum Zeitpunkt der Ausreise des Österreichers noch kein Haftbefehl bestand.

    Die rechte Hand von Marsalek, Henry O’Sullivan, wurde derweil in Singapur verhaftet. Bis heute hat die Staatsanwaltschaft laut der Behörden in Singapur keinen Antrag auf Rechtshilfe gestellt, um O’Sullivan vernehmen zu dürfen. Auch gegen weitere Beschuldigte wie den früheren Geschäftspartner von Marsalek, bei dessen privatem Beteiligungsfonds IMS Capital, den früheren Tui-Manager Aleksandr Vucak, oder den früheren Finanzvorstand Burkhard Ley, der für den Wahlkampf von Christian Lindner spendete und eine Schlüsselfigur war, wurde bis heute nach meiner Kenntnis keine Anklage erhoben.

    Nach meinem freiwilligen Ausscheiden aus dem Deutschen Bundestag musste ich auf eigene Rechnung weiter von der Seitenlinie ermitteln. Eine kleine Auswahl der Dinge, die ich insbesondere mit dem Nachrichtenmagazin Der Spiegel, Thomas Steinmann von Capital sowie Ben Weiser von Österreichs Online-Magazin ZackZack durch Detailarbeit und Quellen erhärten konnte:

    Marsalek und die Cybersecurity Deutschlands

    Die österreichischen Agenten und Fluchthelfer von Marsalek tauschten sich laut einem Vernehmungsprotokoll der Wiener Staatsanwaltschaft und beschlagnahmter Kommunikation auch mit dem ehemaligen Geheimdienstkoordinator der Bundesregierung, Bernd Schmidbauer, über mich aus. Dies wurde mir bereits während des Untersuchungsausschusses im Bundestag bekannt. Schmidbauer tauchte sowohl im BVT-Skandal als Fürsprecher von Marsaleks Agenten, bei einer Geiselbefreiung des BVT in Libyen sowie im Umfeld von einer Firma auf, die Überwachsungssoftware vertreibt, die laut Europäischem Parlament auch gegen Oppositionspolitiker in der EU eingesetzt wurde.

    In dem Vernehmungsprotokoll taucht auch ein Mann auf, der dort vom Fluchthelfer als Geschäftspartner von Jan Marsalek bezeichnet wurde. Es ist Nicolaus von Rintelen, der damalige Gesellschafter der Cybersecurity-Firma Virtual Solution, die sich früher damit brüstete, das Kanzlerhandy sowie die E-Mails der Bundesregierung und wichtiger Bundesbehörden (darunter die Finanzaufsicht und zeitweilig auch das Bundeskriminalamt) auf mobilen Geräten abzusichern.

    Von Rintelen, ein Nachfahre des russischen Nationaldichters Alexander Puschkin und des Zaren Alexander II., verdiente sein Vermögen mit dem russischen Gas-Oligarchen Leonid Michelson. Als ich Olaf Scholz und Angela Merkel im Untersuchungsausschuss persönlich darauf hinwies, dass ihre E-Mails durch einen Mann gesichert werden, der offenbar Kontakt mit Jan Marsalek unterhielt, meldete sich Scholz’ Staatssekretär, der heutige Kanzleramtsminister Wolfgang Schmidt, bei mir. Er bat um Belege für meine Informationen und behauptete, „Olaf ist sehr besorgt!“.

    Später kam heraus, dass Schmidt den intensivsten Kontakt mit von Rintelen innerhalb der Bundesregierung pflegte, obwohl er für IT-Fragen nicht zuständig war. Die Kommunikation von Schmidt und von Rintelen wurde nach parlamentarischen Anfragen zwar mit exakten Daten benannt, aber offenbar rechtswidrig gelöscht. Ebenso konnten wir Kommunikation nachweisen, aus der hervorging, dass von Rintelen Verbindungen zum Fluchthelfer von Marsalek sowie einem FPÖ-Abgeordneten unterhielt, der im BVT-Skandal eine Rolle spielte. Er war in Marsaleks Villa und hat sich nach unseren Recherchen von seinen Anteilen an Virtual Solutions getrennt. Ebenso engagierte sich von Rintelen für eine Firma, die während der Corona-Krise Schnelltests herstellen wollte und in die IMS Capital investiert war. Dies ist eine Firma, über die Marsalek private Investments getätigt haben soll.

    Marsalek und der General

    Der ehemalige militärpolitische Berater der Bundeskanzlerin, Brigadegeneral a.D. Erich Vad, hat an einem Essen mit Jan Marsalek, dem ehemaligen österreichischen Kanzler Wolfgang Schüssel (ÖVP), dem ehemaligen bayerischen Ministerpräsidenten Edmund Stoiber (CSU) und Frankreichs Ex-Präsidenten Nicolas Sarkozy teilgenommen. Das Thema war unter anderem Libyen. Das Land spielte damals eine Schlüsselrolle in der Flüchtlingskrise und war von großer wirtschaftlicher Bedeutung für Österreich, deren Mineralölkonzern OMV mit Libyens Ex-Präsidenten Gaddafi stabile Geschäfte machte. Wie Schmidbauer und Teile des österreichischen Verfassungsschutzes war auch Vad gegenüber den Regime-Change-Interventionen des Westens in Libyen (zu Recht) kritisch eingestellt und strebte mehr strategische Autonomie von den USA an. Die Flüchtlingskrise sorgte das konservative Establishment, da Kräfte wie die AfD und die FPÖ profitierten. Auch Vad war ein Kritiker der Flüchtlingspolitik von Angela Merkel.

    Vad hat mich kontaktiert und mir das dubiose Angebot unterbreitet, in den Beirat eines österreichischen Milliardärs und Immobilienunternehmers zu gehen. Es handelte sich um Cevdet Caner. Er gilt als graue Eminenz hinter der Adler-Gruppe. Wollte Vad mich einkaufen oder diskreditieren? Natürlich lehnte ich ab. Später erfuhr ich: Gegen exakt dieses Unternehmen wettete der britische Leerverkäufer, der zuvor gegen Wirecard gewettet hatte. Es wäre daher denkbar, dass hinter dem Konflikt um Wirecard auch ein Wirtschaftskrieg von Nachrichtendiensten stand, die immer wieder über Informationshändler Informationen an Medien oder Spekulanten ausspielen. Denn genau diese Erzählung – Wirecard sei ein unbescholtenes deutsches Unternehmen und Opfer angelsächsischer Spekulanten – ließ das Unternehmen und die deutsche Finanzaufsicht beim Leerverkaufsverbot verbreiten. Natürlich war Wirecard eine kriminelle Bude, aber wahrscheinlich auch Teil eines Informationskrieges. Immer wieder fällt in meinen Gesprächen mit deutschen Führungskräften aus Banken der Vorwurf, es handle sich etwa bei Ermittlungen der US-Börsenaufsicht gegen Deutsche Bank und Co wegen Russlandgeschäften um einen Wirtschaftskrieg.

    Mit einer einfachen Internetrecherche fand ich innerhalb von einer Minute heraus, dass der russische Konsul in München, mit dem Marsalek verkehrte, vor seiner Abordnung nach Deutschland vom österreichischen Innenministerium der Spionage bezichtigt wurde. Gegenüber Die Welt, die darüber berichtete, entgegneten Sicherheitsbehörden, sie hätten davon keine Kenntnisse gehabt. Das ist unglaubwürdig.
    Marsalek und die Bundeswehr

    Kürzlich enthüllte Thomas Steinmann von Capital in Zusammenarbeit mit mir, wie die Bundeswehr einen Millionenauftrag an eine Firma vergab, die einem österreichischen IT-Unternehmer und früheren Geschäftspartner von Marsalek gehörte. Dieser hatte mit Marsalek etwa in Russland Projekte verfolgt und sich mit ihm zur elektronischen Überwachung von Flüchtlingsströmen in Libyen ausgetauscht. Die Auftragsvergabe – offiziell für die Analyse von Krisenszenarien für die Bundeswehr – erfolgte nicht unter Einhaltung der vorgeschriebenen Bekanntmachung in der EU-Datenbank. Aufträge des österreichischen Staatsschutzes (der Nachfolgebehörde des BVT) für diese Firmen beziehungsweise den Personenkreis führten zu empörten Reaktionen des deutschen Geheimdienstkontrolleurs Konstantin von Notz und einer großen Veröffentlichung des Bayerischen Rundfunks. Im Falle des Bundeswehr-Auftrages für die Firma eines Marsalek-Geschäftspartners schweigt der Bundestag jedoch. Auch in den Medien gab es keine größere Resonanz.

    Der Wirecard-Skandal und die Figur Jan Marsalek mögen ein komplizierter Kriminalfall sein. Aber im Kern ist es recht einfach: Die Behauptung, die deutschen Sicherheitsbehörden hätten gar nicht gewusst, wer Marsalek war, muss als Lüge verbucht werden. Und wenn Sicherheitsbehörden den Untersuchungsausschuss des Deutschen Bundestages anlogen, muss es dafür wichtige Gründe geben. Eines ist dabei sicher: Es gibt offenbar kein Interesse, dass Jan Marsalek nach Deutschland zurückkehrt und aussagt. Denn er hütet viele dunkle Geheimnisse.

    #Allemagne #Russie #Chine #Libye #finance #banques #service_de_paiement #services_secrets #terrorisme #espionnage #fraude #Wirecard

  • Chassés de Tunisie, des dizaines de Subsahariens secourus dans le désert par les autorités libyennes
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/07/17/chasses-de-tunisie-des-dizaines-de-subsahariens-secourus-dans-le-desert-par-

    Chassés de Tunisie, des dizaines de Subsahariens secourus dans le désert par les autorités libyennes. Selon des témoignages recueillis par l’AFP, les migrants avaient été déposés par la police tunisienne dans une zone désertique à la frontière entre les deux pays.
    Le Monde avec AFP
    Publié aujourd’hui à 09h53, modifié à 10h14
    Des gardes-frontières libyens ont secouru des dizaines de migrants subsahariens déposés selon eux par les autorités tunisiennes dans une zone désertique à la frontière entre les deux pays, et laissés sans eau, nourriture ou abri, a constaté une équipe de l’AFP, dimanche 16 juillet. Ces journalistes ont pu photographier et filmer plusieurs groupes de jeunes hommes et quelques femmes, visiblement épuisés et assoiffés, assis ou couchés sur le sable, tentant de s’abriter sous des arbustes décharnés, par des températures dépassant les 40 °C.A la suite d’affrontements ayant coûté la vie à un Tunisien le 3 juillet, des centaines de migrants africains ont été chassés de Sfax, deuxième ville de Tunisie et principal point de départ pour l’émigration clandestine vers l’Europe. Ils ont été conduits par la police tunisienne, selon des ONG, et abandonnés à leur sort dans des zones inhospitalières près de la Libye à l’est et l’Algérie à l’ouest.
    Les migrants secourus par les gardes-frontières libyens erraient dans une zone inhabitée, près d’Al-Assah, à environ 150 km au sud-ouest de Tripoli et une quinzaine de kilomètres à l’intérieur du territoire libyen. « Le nombre de migrants ne cesse d’augmenter chaque jour. Là, nous avons secouru entre 50 et 70 migrants. Nous leur offrons des soins médicaux, des premiers secours, considérant le trajet qu’ils ont fait dans le désert », a déclaré à l’AFP le lieutenant Mohamad Abou Snenah, membre d’une brigade qui effectue des patrouilles frontalières. L’AFP a pu rencontrer un groupe de femmes et d’enfants, dont des bébés, accueillis dans un centre où on les voit allongés sur des matelas ou manger des yaourts. « Ils nous ont raconté comment ils ont été maltraités par les autorités tunisiennes et ont dit avoir été frappés et torturés », a poursuivi l’officier, précisant que sa brigade est « chargée de sécuriser ce tronçon de la frontière ».
    Abou Kouni, un Ivoirien, a dit à l’AFP être arrivé en Tunisie il y a sept ans et avoir été brutalement interpellé avec sa femme dans la rue, la semaine passée, avant d’être embarqué dans un camion. Selon lui, les policiers leur ont dit qu’ils allaient « les jeter en Libye ». A la question de savoir pourquoi, ils lui auraient répondu : « On n’a pas besoin de vous en Tunisie », avant de lui prendre son téléphone et ceux de sa femme. M. Kouni a affirmé à l’AFP que les policiers l’ont « frappé » au torse et dans le dos, et menacé de le tuer. « Ils nous ont mis dans le désert et ils ont tiré dans notre direction en disant : “Allez en Libye !” », a-t-il dit, soulignant qu’après un périple dans le désert, ils ont croisé la police libyenne, qui leur a donné de l’eau, de la nourriture et des médicaments. « Je marche dans le désert depuis deux jours. Il y a 30 autres personnes de l’autre côté. Je ne veux plus retourner en Tunisie », a dit à l’AFP Moussa, un Malien de 20 ans.
    Selon des ONG tunisiennes, de 100 à 150 personnes se trouvaient encore abandonnées à leur sort, vendredi, dans des zones désertiques à la frontière entre la Libye et la Tunisie. Les jours précédents, le Croissant-Rouge tunisien avait mis à l’abri plus de 600 migrants, lâchés après le 3 juillet près du poste-frontière libyen à Ras Jedir, à 40 km au nord d’Al-Assah. La Libye abrite au moins 600 000 migrants subsahariens et a été accusée à de nombreuses reprises de mauvais traitements à leur encontre par des ONG et des organisations internationales.

    #Covid-19#migrant#migration#tunisie#libye#migrationirreguliere#expulsion#afriquesubsaharienne#frontiere#sante#postcovid

  • [ARTICLE ORIGINAL - EN] Chris Hedges : Ils ont menti sur l’#Afghanistan et l’#Irak ; maintenant ils mentent sur l’#Ukraine. Le public américain s’est fait avoir, une fois de plus, en déversant des milliards dans une nouvelle guerre sans fin.

    Le scénario que les proxénètes de la #guerre utilisent pour nous entraîner dans un fiasco militaire après l’autre, notamment au Vietnam, en Afghanistan, en Irak, en #Libye, en #Syrie et aujourd’hui en Ukraine, ne change pas. La liberté et la démocratie sont menacées. Le mal doit être vaincu. Les droits de l’homme doivent être protégés. Le sort de l’Europe et de l’#OTAN, ainsi que celui d’un « ordre international fondé sur des règles », est en jeu. La victoire est assurée.

    Les résultats sont les mêmes. Les justifications et les récits sont démasqués comme des mensonges. Les pronostics optimistes sont faux. Ceux au nom desquels nous sommes censés nous battre sont aussi vénaux que ceux que nous combattons.

    https://scheerpost.com/2023/07/08/chris-hedges-they-lied-about-afghanistan-they-lied-about-iraq-and-they-a

  • En Tunisie, des centaines de migrants ont été mis à l’abri, d’autres restent abandonnés dans le désert
    https://www.lemonde.fr/afrique/article/2023/07/11/en-tunisie-des-centaines-de-migrants-ont-ete-mis-a-l-abri-d-autres-restent-a

    En Tunisie, des centaines de migrants ont été mis à l’abri, d’autres restent abandonnés dans le désert
    Ces migrants subsahariens avaient été conduits vers des zones frontalières inhospitalières et laissés sur place à la suite des violences survenues à Sfax.
    Le Monde
    Publié aujourd’hui à 12h03
    Des migrants subsahariens à Sfax, le 7 juillet 2023. HOUSSEM ZOUARI / AFP
    Plusieurs centaines de migrants, abandonnés dans une zone désertique à la frontière avec la Libye après avoir été évacués de la ville tunisienne de Sfax la semaine passée, ont été mis à l’abri, lundi 10 juillet, dans des villes du sud de la Tunisie. Mais les ONG s’inquiètent du sort de dizaines d’autres, repoussés vers la frontière algérienne.(...)
    A la suite d’affrontements ayant coûté la vie à un Tunisien, des dizaines de migrants avaient été chassés de Sfax, ville portuaire du centre-est du pays devenue le principal point de départ de l’émigration irrégulière vers l’Europe. Ils avaient été conduits, par les autorités selon des ONG, vers des zones inhospitalières frontalières de la Libye et l’Algérie. Ceux qui ont été récupérés par les autorités tunisiennes à la frontière libyenne, dans la zone tampon militarisée de Ras Jdir, ont été divisés en plusieurs groupes, selon des ONG et des médias. « Un groupe se trouve à Mednine, au niveau d’un lycée gardé par les forces de sécurité », a précisé la responsable de HRW.
    Un correspondant de l’AFP a vu arriver un autre contingent à Ben Gardane, hébergé là aussi dans un lycée sous le contrôle des forces de sécurité. dans cette ville, et d’autres ont été emmenés en autocars à Tataouine et Gabès, selon des médias.Beity, une association tunisienne d’aide aux femmes victimes de violence, avait lancé un appel pressant aux autres ONG et aux institutions publiques, lundi 10 juillet, pour se « coordonner et mutualiser les ressources » afin de fournir une aide d’urgence aux migrants subsahariens « déportés aux portes du Sahara ».
    Pour Salsabil Chellali, de HRW, « c’est un soulagement de savoir qu’ils ont pu quitter la zone frontalière avec la Libye, mais de nombreuses autres personnes expulsées près de la frontière algérienne risquent leur vie si elles ne sont pas immédiatement secourues ». Selon HRW, elles seraient au moins 150 à 200 dans cette situation.« S’il vous plaît, aidez-nous, si vous pouvez envoyer la Croix-Rouge ici, aidez-nous, sinon on va mourir, y’a rien ici, y’a pas à manger, y’a pas d’eau », a dit Mamadou, un Guinéen, par téléphone à l’AFP. Selon lui, ils sont une trentaine abandonnés à leur sort dans une zone désertique près du village algérien de Douar El Ma, à deux pas de la frontière tunisienne.
    Dans un communiqué, l’organisation d’aide aux réfugiés Refugees International a dénoncé « les arrestations violentes et expulsions forcées de centaines de migrants africains noirs » à Sfax, soulignant que certains étaient pourtant « enregistrés auprès du Haut-Commissariat aux réfugiés ou ont un statut légal en Tunisie ». L’Organisation mondiale contre la torture en Tunisie (OMCT Tunisie) a annoncé pour sa part avoir saisi le Comité des Nations unies contre la torture pour dénoncer le cas spécifique de « VF, un migrant d’origine subsaharienne déporté à la frontière entre la Tunisie et Libye le 2 juillet » après avoir été arrêté sans motif et « roué de coups avec une barre de fer dans des postes sécuritaires » à Ben Gardane (dans l’est du pays).Ces mauvais traitements, ainsi que la privation d’eau et de nourriture pour « plus de 700 migrants » retenus dans la zone tampon, « sciemment impos[ée] par des agents de l’Etat à VF et d’autres migrants en raison de leur appartenance raciale afin de les contraindre à quitter le territoire, sont constituti[fs] de torture », a ajouté l’OMCT.Un discours de plus en plus ouvertement xénophobe à l’égard des migrants subsahariens s’est répandu depuis que le président tunisien, Kaïs Saïed, a pourfendu en février l’immigration clandestine, la présentant comme une menace démographique pour son pays, en proie à une crise sociale et économique qui s’est aggravée depuis qu’il s’est arrogé les pleins pouvoirs en juillet 2021.Samedi, il a dénoncé ce qu’il a qualifié de « mensonges propagés sur les réseaux sociaux », affirmant que les migrants en Tunisie recevaient « un traitement humain conforme à nos valeurs, contrairement à ce qui se dit dans les milieux coloniaux et chez les agents qui œuvrent à leur service », selon un communiqué de la présidence. Lundi soir, il a estimé dans un nouveau communiqué que « la Tunisie a donné une leçon au monde avec la manière dont elle a pris soin de ces migrants », ajoutant toutefois qu’« elle refuse d’être une patrie de substitution pour eux et n’acceptera que ceux qui sont en situation régulière ».

    #Covid-19#migrant#migration#tunisie#afriquesubsarienne#xenophobie#violence#algerie#libye#migrationirreguliere#postcovid