• Nous détruisons même leurs puits - UJFP
    https://ujfp.org/nous-detruisons-meme-leurs-puits

    La bétonnière a vomi le liquide grisâtre qui s’est déversé bruyamment dans, les obstruant. Il y avait là les soldats qui servent de gardes, les employés de l’administration civile qui ont conçu ce plan diabolique, les ouvriers qui l’ont exécuté et les paysans qui voient leur subsistance réduite à néant pour l’éternité.

    • Pour mémoire…

      Un nouveau rapport dévoile comment l’Israël de Golda Meir a empoisonné la terre palestinienne dans une opération de nettoyage ethnique
      https://www.france-palestine.org/Un-nouveau-rapport-devoile-comment-l-Israel-de-Golda-Meir-a-empois

      Dans son article, intitulé Révélation : Israël a empoisonné des terres palestiniennes pour construire une colonie en Cisjordanie dans les années 1970, Ofer Aderet raconte l’histoire de la dépossession du village palestinien d’Aqraba, situé à environ trois miles de Huwwara, dans le nord de la Cisjordanie. Les terres d’Aqraba étaient convoitées pour y établir Gitit, une nouvelle colonie juive. Au final, 83 % des terres d’Aqraba, qui était alors un village de 4 000 habitants, ont été confisquées par Israël, les réduisant de 145 000 dounams (36 000 hectares) à 25 000 dounams (6 000 hectares).

      Voici comment les Israéliens ont procédé :

      « La première étape a consisté à déposséder les habitants du village palestinien voisin de leurs terres sous le prétexte fallacieux d’en faire une zone d’entraînement militaire. Lorsque les Palestiniens ont insisté pour cultiver la terre, les soldats israéliens ont saboté leurs outils. Ils ont ensuite reçu l’ordre d’utiliser des véhicules pour détruire les cultures. En cas d’échec, une solution radicale était employée : un pulvérisateur agricole répandait un produit chimique toxique. La substance était mortelle pour les animaux et dangereuse pour les humains. »

      L’empoisonnement des cultures n’était pas un acte d’autodéfense. Il a été soigneusement planifié et a impliqué non seulement des acteurs militaires, mais également l’Agence juive :

      Une réunion organisée au commandement central [de l’armée en avril 1972], à laquelle ont participé des officiers, un représentant du département « colonie » de l’Agence Juive ainsi que le responsable des propriétés des absents, était intitulée « Pulvériser les zones irrégulières dans le secteur de Tel-Tal ». Tel-Tal est devenu Gitit... Selon ce document, l’objectif de cette rencontre était d’établir la « responsabilité et le calendrier de l’épandage ». Il y est également préciser que personne ne devait se rendre dans la zone dans les trois jours qui suivraient la pulvérisation « par crainte d’un empoisonnement de l’estomac. » Les animaux, selon le document, ne devaient pas pénétrer dans la zone pendant une semaine supplémentaire... Une autre réunion a eu lieu plus tard dans le mois. « Ce commandement n’a aucune objection à procéder à la pulvérisation comme prévu », peut-on lire dans le procès-verbal. « Le responsable des propriétés des absents veillera à ce que les frontières de la zone soient marquées avec précision et dirigera l’avion d’épandage en conséquence ».

      C’était l’Israël de la Première ministre Golda Meir.

      L’article de Haaretz est sous #paywall :
      https://www.haaretz.com/israel-news/2023-06-23/ty-article-magazine/.highlight/israel-poisoned-palestinian-land-to-build-west-bank-settlement-in-1970s-documents-reveal/00000188-e8aa-df52-a79d-fcabdd200000

  • Rages contre les machines : Luddites, unissez-vous ! - Par Thibault Prévost | Arrêt sur images
    https://www.arretsurimages.net/chroniques/clic-gauche/rages-contre-les-machines-luddites-unissez-vous

    La grève qui secoue Hollywood est tout sauf anecdotique

    (...)

    la situation, qui paralyse la gigantesque industrie culturelle étasunienne, est inédite depuis 60 ans

    (...)

    Et sauf erreur de ma part, nos médias à qui on ne la fait pas, ne s’y intéressent pas. du. tout.

    L’article est passionnant de bout en bout.

    • « les médias (…) ne s’y intéressent pas. du. tout. »

      Fact-check : Le Monde (qui ne s’intéresse pas beaucoup aux grèves), a consacré trois articles à cette grève (certes moins qu’à la grève du JDD, seule autre grève traitée dans ses colonnes au cours du mois).

      – Pourquoi les travailleurs d’Hollywood sont-ils en grève ? Comprendre en trois minutes (vidéo)
      – Plusieurs stars d’Hollywood manifestent leur soutien à la grève des acteurs sur Times Square (info AFP)
      – Qui est vraiment... Fran Drescher, meneuse de la grève des acteurs à Hollywood (portrait)

      #de_rien

    • Je confesse, je ne parcours pas Le Monde ou Le Figaro. Je prends comme référence parfaitement subjective Google News et les journaux télévisés. Les journaux télévisés passent 50% de leur temps à évoquer les plages et la montagne, la circulation sur les autoroutes, les bornes électriques... Mais une grève qui bloque Hollywood et toute l’industrie de la propagande cinématographique occidentale, pas plus de quelques reportages de quelques dizaines de secondes que je n’ai pas eu la chance de pouvoir voir.

      Pour en revenir aux points que je trouve passionnants dans cet article, ce sont ces rappels historiques de combien la loi, l’état de droit, peut devenir cruelle.

      De 1811 à 1813 [en GB], les Luddites mènent des actions de sabotage contre « les machines préjudiciables à la communauté », avant d’être matés dans le sang par 14 000 soldats, appuyés par une loi faisant du sabotage de machine un crime puni de mort.

      Quant à ce nouveau concept, je le trouve tout à fait pertinent, depuis le temps que je dois transférer les emails de mes clients chez l’un ou l’autre des GAFAM, pour qu’ils puissent échanger des emails avec leurs clients en toute quiétude, et sans crainte de perdre des affaires.

      Elle va même d’autant mieux qu’elle recycle la méthode de ses voisines californiennes de la Silicon Valley, en appliquant progressivement un capitalisme dit « de plateforme », que l’économiste et ex-ministre des Finances grec Yanis Varoufakis (cité par l’indépassable Cory Doctorow) appelle désormais "#techno-féodalisme" . Selon lui et d’autres, nous vivons désormais dans une économie dominée non plus par le capital mais par la rente : les entreprises ne créent pas de valeur, elles se concentrent jusqu’à obtenir un monopole, puis déploient des systèmes d’intermédiation numérique -une application, un site- pour capturer (gratuitement ou presque) la valeur produite en amont par d’autres, avant de la revendre au prix fort aux utilisateurs/consommateurs.

      (...)

      Dans un tel système de monopoles et de dépendances, les rapports de domination ne sont plus ceux de l’ouvrier et du patron, mais ceux du serf et du suzerain. La caste bourgeoise a laissé place à la caste vectorialiste, écrit Mackenzie Wark dans Capital is Dead. Et la production, écrivait l’économiste Cédric Durand en 2020 dans son livre #Techno-féodalismes : critique de l’économie numérique , a laissé place à la prédation.

  • Il explique pourquoi il a tiré 69 fois lors d’une émeute au Bourget : « La seule solution à cet instant »
    https://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/il-explique-pourquoi-il-a-tire-69-fois-lors-dune-emeute-au-bourget-la-seu

    Le directeur de la sécurité et de la prévention du Bourget (Seine-Saint-Denis) s’exprime pour la première fois, après l’épisode des 69 coups de feu tirés en l’air fin juin, pour protéger le bureau de #police_municipale assailli par des émeutiers. « J’ai tiré des dizaines de fois pour créer un effet de sidération », se justifie-t-il, en invoquant « l’état de nécessité et de légitime défense ».

    « un effet de sidération », en effet, sur le lecteur.

    #paywall #police #suicidez-vous

  • Virgil a perdu l’oeil gauche à la suite d’un tir injustifié de LBD d’un policier, Konbini
    https://www.youtube.com/watch?v=J0dexnkRC7c

    Virgil, 24 ans, a perdu l’oeil gauche à la suite d’un tir injustifié de LBD d’un policier. Il marchait seul dans les rues de Nanterre après la marche blanche en hommage à Nahel. L’ancien militaire témoigne : “J’ai eu la chance de ne pas avoir perdu la vie ce jour-là”

    Virgil R., autre victime de la police à Nanterre
    https://www.humanite.fr/societe/violences-policieres/virgil-r-autre-victime-de-la-police-nanterre-802994

    Visé par un tir de LBD sans aucune justification, à Nanterre, le 29 juin, le jeune homme a perdu son œil gauche. Alors qu’une enquête est ouverte, il revient sur la soirée du drame et lance un appel à témoins.

    La rue Craiova, à Nanterre est déserte ce 29 juin, en fin de soirée, quand Virgil s’y engage. Il vient de quitter des amis pour aller à la recherche d’une boutique encore ouverte où acheter à manger pour tout le monde. Après avoir marché quelques mètres le jeune normand aperçoit au bout de la rue une patrouille de trois ou quatre policiers, armés et casqués qui s’avance. « Je ne les regarde pas spécialement, je continue mon chemin tranquillement. Je m’apprête à les saluer quand on va se croiser », explique-t-il.

    Le jeune homme n’est pas spécialement inquiet même s’il sait par expérience que sa couleur de peau joue en sa défaveur aux yeux des forces de l’ordre : « Quand je circule en voiture en région parisienne, je me fais systématiquement arrêter. Si je me promène en jogging, il est rare que j’échappe à un contrôle d’identité... Mais comme je ne commets pas d’infraction, que je fais profil bas quels que soient les propos ou les provocations que j’entends, je ne leur donne pas l’occasion de faire dégénérer la situation.

    #paywall

    #police #Nanterre #LBD

    • c’est de la récup, je n’ai pas mieux
      #paywall

      L’octogénaire qui a tué Mahamadou Cissé remis en liberté, Ration

      Après six mois de détention provisoire, le harki qui avait tué, en décembre 2022 à Charleville-Mézières, son ancien voisin, un jeune homme noir, « par exaspération », selon les mots du procureur, a été remis en liberté.

      Le 9 décembre 2022, dans la soirée, Hocine A., 82 ans, tuait d’une balle son ancien voisin Mahamadou Cissé, 21 ans, à Charleville-Mézières (Ardennes). Le vétéran de la guerre d’Algérie reprochait au jeune homme d’avoir occupé son hall, puis de l’avoir insulté, voire menacé de ses poings. Une ultime vexation selon cet habitant de la Ronde-Couture, exaspéré par la vie de ce quartier populaire. Comme pour justifier cet acte, le #procureur de la République de Reims parlait alors d’« homicide par exaspération ». Une déclaration reçue comme un « coup de massue » par la sœur de la victime. Assétou Cissé expliquait à Libération que les propos du parquetier ainsi que d’autres éléments du dossier soulevaient la « problématique du racisme » couvée par ce drame (cette coloration n’est pas pour l’heure retenue par l’autorité judiciaire). D’autant qu’Hocine A. recevait ensuite, depuis sa prison, le soutien d’une association très droitière d’anciens combattants, et des courriers de soutien aux relents xénophobes et racistes.

      Dans le cadre de l’information judiciaire, Hocine A. a été mis en examen pour homicide volontaire, détention d’arme de catégorie A sans autorisation, violences sur personnes dépositaires de l’autorité publique avec arme (il a brièvement menacé de son 22 long rifle les policiers venus l’interpeller) et menace de mort sur un témoin et ami de Mahamadou Cissé (qui a porté plainte).

      « Atténuer le risque de représailles »

      Toutefois, et suivant les réquisitions du procureur de la République, la juge d’instruction a ordonné, le 21 juillet, la fin, au bout d’environ six mois, de la détention provisoire de Hocine A.. Son contrôle judiciaire lui interdit de paraître dans les Ardennes, de sortir du territoire national et lui impose de se présenter régulièrement au service pénitentiaire d’insertion et de probation du département d’Occitanie où il sera désormais hébergé, à des centaines de kilomètres de son ancien domicile. La juge d’instruction considère d’ailleurs « que cette proposition d’hébergement permet d’atténuer le risque de trouble à l’ordre public ainsi que le risque de représailles de la part du mis en examen [et de] garantir la sécurité de ce dernier afin que la procédure d’information judiciaire puisse être menée à son terme ». De plus, la magistrate estime que le retraité « dispose de l’ensemble de ses attaches sur le territoire français, dont plusieurs de ses enfants qui se sont mobilisés pour l’assister au cours de sa détention [et] qu’il n’a jamais fait état d’une volonté de fuir ses responsabilités, quand bien même il minimise la portée des gestes qu’il a pu avoir ».

      « Décision incompréhensible »

      Dans un communiqué de presse daté du même jour, Saïd Harir, l’avocat de la famille de Mahamadou Cissé (qui s’est constituée partie civile), déplorait une décision judiciaire « incompréhensible », entre autres car elle « ne contraint pas le mis en examen au port d’un bracelet électronique » : « Le sentiment d’abandon de désespoir et de colère de la famille de M. Cissé ne peut qu’être compris et partagé par l’ensemble des justiciables. »

    • Remise en liberté du meurtrier de Mahamadou Cissé : « C’est une manière de nous tuer une seconde fois »
      Placé en détention provisoire depuis le meurtre « par exaspération » de Mahamadou Cissé, à Charleville-Mézières, en décembre 2022, un octogénaire, ancien militaire pendant la guerre d’Algérie, a été remis en liberté par les autorités judiciaires. Une décision inadmissible pour les proches de la victime, rassemblés mardi devant le palais de justice.
      Publié le
      Mercredi 26 juillet 2023
      Thomas Lemahieu

      Les proches de Mahamadou Cissé ont organisé un rassemblement le 25 juillet à Reims devant le palais de justice. Ils dénoncent la libération de Hocine A., mis en examen pour avoir tué Mahamadou.

      Reims (Marne), envoyé spécial.
      Mahamadou Cissé ne se voyait pas forcément en haut de l’affiche. Il voulait déjà imposer sa chance. Du cinéma, le jeune homme de 21 ans en parlait avec des étoiles dans les yeux, puis – ses amis en témoignent – avec ce sourire éclatant, gourmand, ravageur presque. Il voulait voir sa tête à l’écran ou, simplement, son nom au générique.
      Après avoir participé, en 2021, comme figurant au tournage de Tirailleurs, un film avec Omar Sy , il rêvait de pousser plus loin. Devenir acteur, vraiment. C’était à la fois un bonheur et un risque, son but, et le chemin pouvait peut-être passer par l’école Kourtrajmé, lancée par le réalisateur Ladj Ly et ses copains (Kim Chapiron, Romain Gavras, Toumani Sangaré).
      D’ailleurs, à la mi-décembre 2022, Mahamadou devait quitter le quartier, la Ronde-Couture, à Charleville-Mézières (Ardennes), pour un premier rendez-vous à Montfermeil (Seine-Saint-Denis). Assétou, sa grande sœur, se préparait à l’accueillir en région parisienne…
      Mahamadou Cissé n’est plus : une ou deux balles dans le thorax tirées par un voisin octogénaire, harki et ancien militaire
      Mahamadou Cissé n’est jamais arrivé chez Kourtrajmé. Il n’a pas vu Tirailleurs, sorti en salles en janvier dernier. Ses rêves, son élan, sa vie, tout a été volé, le soir du 9 décembre 2022. Une ou deux balles dans le thorax tirées par un voisin octogénaire, harki et ancien militaire. Mahamadou Cissé n’est plus. Ni figurant, ni vedette. Rien, ou presque, quantité négligeable : son assassinat est, selon sa famille et ses amis qui le dénoncent entre amertume et colère, traité comme celui d’un personnage secondaire. Comme le meurtre d’un citoyen de seconde zone, à toutes les étapes.

      Après la remise en liberté, vendredi dernier, par ordonnance de la juge d’instruction de Reims, de Hocine A., mis en examen pour homicide volontaire, détention d’armes de catégorie A sans autorisation, menaces de mort à l’encontre d’un témoin et violences sur personnes dépositaires de l’autorité publique – retranché dans son appartement à la Ronde-Couture, il a un temps mis en joue les policiers venus l’arrêter –, les proches et une centaine des soutiens de Mahamadou Cissé sont venus, mardi 25 juillet, protester devant le palais de justice.
      L’incompréhension et l’indignation sont totales sur les marches : après six mois de détention provisoire, l’octogénaire, présumé innocent et soutenu crânement par un groupuscule d’anciens militaires d’extrême droite, bénéficie d’une libération conditionnelle. Il a juste interdiction de se rendre dans les Ardennes ou de quitter la France ; il est également obligé de se présenter régulièrement au service pénitentiaire de probation et d’insertion en Occitanie où il a reçu une proposition d’hébergement qui a manifestement convaincu l’autorité judiciaire. Selon la magistrate rémoise, Hocine A. « n’a jamais fait état d’une volonté de fuir ses responsabilités, quand bien même il minimise la portée des gestes qu’il a pu avoir ». Contacté par l’Humanité, Me Pascal Ammoura, avocat du mis en examen, n’a pas donné suite .
      Membre du cabinet de Me Saïd Harir, le défenseur de la famille de Mahamadou Cissé, Me Katia Agher, présente à Reims pour une rencontre impromptue avec la juge d’instruction et pour le rassemblement, n’en revient pas. « Nous ne comprenons vraiment pas cette ordonnance, glisse-t-elle. La détention provisoire sert à protéger l’ordre public, mais aussi l’instruction du dossier. Or, à ce stade, il n’y a eu ni reconstitution, ni confrontation avec les principaux témoins. On n’a pas le retour de l’expertise balistique, si bien qu’on ne sait pas combien de coups ont été tirés… C’est encore plus surprenant dans le contexte que nous connaissons aujourd’hui, avec des jeunes qui sont condamnés à un an de prison ferme pour avoir ramassé une canette pendant les émeutes et incarcérés du coup bien plus longtemps que le mis en examen poursuivi pour avoir donné la mort à Mahamadou Cissé. »
      L’une des gifles les plus spectaculaires a été adressée par l’institution judiciaire
      Grande sœur de Mahamadou, Assétou Cissé sort, elle aussi, en colère et déterminée, après l’entrevue avec la magistrate en charge de l’instruction, une heure avant le rassemblement public. « C’est elle qui a demandé à nous voir, confie-t-elle à l’Humanité. On sent bien qu’il y a une forme d’embarras, mais quand elle a pris sa décision de remettre l’assassin en liberté, elle l’a prise sans nous, sans nous consulter ! Le mal est fait, en l’occurrence. L’homme qui a tué mon frère est libre. Et nous, on a pris perpétuité déjà, Mahamadou est six pieds sous terre. C’est un jeune Noir qui est mort, on dira… Son corps n’était pas encore froid qu’on cherchait déjà à en faire un voyou. Mais non, c’est un enfant de la République qui est mort et c’est tout le quartier de la Ronde-Couture, tout Charleville qui ont été meurtris : tout le monde a entendu ses cris, vu son corps par terre. Même le maire LR de la ville dénonce cette décision de la juge d’instruction… Nous en appelons à Gérald Darmanin, Éric Dupond-Moretti et au gouvernement, ce mépris ne peut pas perdurer. »
      Porte-parole du collectif Justice pour Mahamadou – « Cela m’est tombé dessus car je suis un peu la grande gueule de la famille », confesse-t-elle –, la trentenaire accuse : « Remettre cet homme en liberté, c’est nous placer en insécurité, nous abandonner une fois de plus… Est-ce qu’on peut imaginer ce que c’est de le voir, lui, qui est allé charger son fusil avec 15 balles et qui est revenu vers Mahamadou et ses amis pour leur tirer dessus, qui a prémédité et planifié son acte – il en avait parlé à un proche qui a alerté la police municipale –, débarquer tranquillement, sans menottes, à la reconstitution quand elle aura lieu ? Ou de le voir arriver libre aux assises ? C’est une manière, après nous avoir pris notre frère, de nous tuer tous, une seconde fois…”
      À travers les prises de parole, toute la violence renvoyée à la famille et aux proches de Mahamadou remonte à la surface. L’une des gifles les plus spectaculaires a été adressée par l’institution judiciaire elle-même quand le procureur de la République de Reims a parlé de »meurtre par exaspération« , avec »perte de contrôle« , mais ça n’est pas tout…
      Bakary Cissé, un des petits frères, témoigne de comment, à l’hôpital, on a voulu lui faire croire que la victime était toujours au bloc opératoire, alors que la presse locale avait déjà annoncé son décès. Arrivé à Charleville, le lendemain au petit matin, Djibril raconte qu’à la police on ne lui parle pas de son jeune frère, mais du risque d’avoir des » poubelles brûlées« . » Mais, enfin, vous vous rendez compte ? s’exclame-t-il. Mon frère est mort, et vous cherchez des circonstances pour expliquer un meurtre… On est une famille noire, certes, je suis désolé, mais c’est comme ça. On n’est pas des animaux, et nos vies ne valent pas moins que celles des autres…« 

      « Mais si les prisons sont dangereuses, alors il faut faire sortir beaucoup de gens, non ? » 
      Alors que, quelques minutes plus tôt, Assétou Cissé laisse entendre que, pour la juge d’instruction, il s’agit en fait de ne pas laisser »mourir en prison« celui que tous appellent »l’assassin« – » Mais si les prisons sont dangereuses, alors il faut faire sortir beaucoup de gens, non ?« interroge-t-elle – Hatouma, la tante de la victime, fait remarquer, avec les mots et l’expérience de la génération des parents de Mahamadou.
       »Vous savez, moi, le père de mon père et le père de ma mère, ils ont combattu pour la France, on les a pris, on ne leur a pas laissé le choix, ils sont venus sans passeport, sans visa, sans hébergement pour participer à la guerre de 14-18... Des tirailleurs, oui, qui ont combattu pour ce pays. L’homme qui a abattu Mahamadou, lui, il s’est engagé par intérêt dans l’armée, il avait tout à gagner à l’Algérie française, puis à la France, et quelque part, on en voit encore les effets aujourd’hui dans le traitement d’exception qu’il reçoit.« 
      Hatouma se redresse, s’excusant de » maladresses« , qui n’en sont manifestement pas, et reprend. »Il paraît que cet homme, qui a pris la vie de Mahamadou, souffrait en prison. Il fallait lui rendre sa liberté pour ne pas qu’il meure derrière les barreaux ! Mais Mahamadou aussi avait une vie à vivre…« 

  • Election of the chair of the #IPCC – The Economist
    #GIEC

    Editor’s note: the ipcc’s new chair will be elected at its 59th session in Nairobi on July 25th-28th. Three weeks ago we invited all four candidates for the post to contribute a piece to this section; Dr Roberts and Jean-Pascal van Ypersele agreed to do so.

    • Debra Roberts on why she is running to be chair of the IPCC
    https://www.economist.com/by-invitation/2023/07/24/debra-roberts-on-why-she-is-running-to-be-chair-of-the-ipcc

    The organisation should be more inclusive, and more focused on assessing climate measures’ effectiveness, she says

    • Jean-Pascal van Ypersele on why he is running to be chair of the IPCC
    https://www.economist.com/by-invitation/2023/07/24/jean-pascal-van-ypersele-on-why-he-is-running-to-be-chair-of-the-ipcc

    He believes that the climate panel can serve policymakers’ needs better

    #paywall

    • Debra Roberts on why she is running to be chair of the IPCC
      The organisation should be more inclusive, and more focused on assessing climate measures’ effectiveness, she says

      D. R. :
      REFLECTING ON THE Intergovernmental Panel on Climate Change’s (IPCC’s) sixth assessment cycle, known as AR6, I am struck by the extent to which global challenges, once distant or abstract, are now immediate and personal. Global crises made me caregiver to my 100-year-old father during the covid pandemic; contributed to a week of poverty-fuelled civil unrest where I live in South Africa; and saw flood waters engulf our home because of the ever-warming atmosphere.

      These experiences remind us why science is so important. Evidence-based decision-making has allowed the world to respond to the pandemic, attribute extreme events to climate change and understand that inequity anywhere undermines a safer, more sustainable future for everyone.

      For the past 35 years the IPCC has provided decision-makers with scientific evidence to inform policy. Over the first five assessment cycles the panel explained the causes and impacts of climate change, whereas the most recent cycle has focused on identifying solutions.

      But during the United Nations’ “decade of action”—aimed at stepping up action to tackle the world’s biggest challenges—it is clear that we need not only solutions, but also an assessment of their feasibility and effectiveness to inform ambitious short-term action. And action is critical as the AR6 reports conclude that the pace and scale of what has been done so far are insufficient to tackle climate change. This is the challenge for the seventh assessment cycle, AR7.

      Having worked at the interface between science, policy and practice for more than 30 years in the fields of climate change, biodiversity, sustainability and resilience, I know how difficult it is to turn science into action. Experience has taught me that the best outcomes come from working together to prioritise equity and shared responsibility.

      My priority as chair of the IPCC would be to build a strong leadership team. I would harness the strengths of the vice-chairs and the Working Group and Task Force/Group co-chairs and bureaus to strategically plan the scientific workflow of the cycle and determine how we make IPCC operations more sustainable. That will involve assessing and reducing the carbon footprint of IPCC’s own activities. An AR7 leadership team with a shared vision and clear roles would drive even stronger scientific integration than we saw in AR6. The Special Report on Cities offers an early opportunity to put increased integration into practice.

      Ensuring more balanced representation of women and scientists from the global south, and addressing data gaps for the south, should be priorities for AR7. My appointment as the first female chair, and the first from Africa, would encourage more women and global-south scientists to volunteer their time. I would also work with the IPCC vice-chairs to liaise more closely with member governments, who are responsible for identifying national experts, to ensure that a more representative range of authors are nominated for AR7 reports.

      In addition, we need to make the work environment more inclusive, for instance by training people to work effectively in diverse, multicultural teams. Ensuring that the Gender Action Team concludes the work on a code of conduct and complaints process should also help.

      Engaging more young scientists is critical. By involving early-career scientists and IPCC scholarship recipients, and providing clear roles for Chapter Scientists, who give technical and logistical support to authors, we can help ensure the longevity of the organisation.

      Strengthening the organisation must be accompanied by actions that enhance the scientific leadership of the IPCC. Given the increase in climate-change-related literature, I believe AR6 was the last assessment cycle in which it was possible to produce a comprehensive assessment of the literature using traditional means. In AR7 we should evaluate new tools such as AI and machine learning, which can potentially assist the assessment process and increase access to non-English literature. We must ensure that authors from the global south have equal access.

      AR7 will require broader engagement with those who hold indigenous and local knowledge, which will be crucial in developing strategies that improve stewardship of ecosystems, increase biodiversity and improve resilience. Better co-ordination with the work of other global initiatives, such as the Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services, which was created to bridge the gap between biodiversity science and policy, should also be prioritised.

      Finally, if IPCC reports are to inform fast and far-reaching implementation, we must be willing to question whether lengthy assessment reports delivered at the end of the decade of action are the best approach. Shorter, more focused special reports may better support ambitious action and the second Global Stocktake—the process that enables governments and other stakeholders to assess progress made in meeting the goals of the Paris agreement on climate change. We should step up regionally focused communication efforts and encourage other networks, including NGOs, to produce their own reports based on IPCC material. The chair should play a central role in IPCC communications. As a skilled science communicator, I am well placed to do that.

      In the decade of action, we need IPCC leadership with the right experience. As an active publishing scientist and skilled practitioner, I bring a practical approach to the science. My experience would help me to build bridges inside and outside the IPCC. I would ensure that the panel’s work stays independent of politics, is fair and balanced, prioritises scientific integrity and creates a work environment that values all voices. The science of AR7 will be critical to ensuring we leave no person, place or ecosystem behind.■

      Debra Roberts is IPCC Co-Chair of Working Group II (Sixth Assessment Cycle); heads the sustainability and resilience function in eThekwini municipality in Durban; and holds the Professor Willem Schermerhorn Chair in Open Science from a Majority World Perspective at the University of Twente.

    • Jean-Pascal van Ypersele on why he is running to be chair of the IPCC
      He believes that the climate panel can serve policymakers’ needs better

      J.-P. Y :
      THIS YEAR marks the 35th anniversary of the Intergovernmental Panel on Climate Change (IPCC) and the halfway point to achieving the UN Sustainable Development Goals (SDGs) by 2030. Our planet is facing challenges that have no historical equivalent. Action, based on the best scientific assessments, is needed on a number of fronts: to stay on track with the 1.5°C goal and accelerate reductions in emissions; to engineer a just transition to more climate-resilient economic development; to put the most climate-vulnerable countries on a stronger footing and provide funding for a broader set of developing countries; and to find the right mix of climate-change mitigation, adaptation and other societal objectives.

      Action means alerting the world to the consequences of inaction while looking for ways to tackle the climate crisis. The IPCC has been doing this consistently, for example providing lists of technologies and measures that could help reduce greenhouse-gas emissions by 2030, with a clear indication of their lifecycle costs.

      I am convinced that the IPCC can serve policymakers’ needs even better. Scientists and policymakers need to discuss issues freely before any IPCC report is written, to increase the policy relevance of such documents. Many of the policymakers I met during my campaign to chair the IPCC told me their job would be easier if climate action (SDG 13) was better integrated into the 2030 agenda and the 16 other SDGs. We must let the IPCC help those policymakers.

      In its most recent reports, the IPCC helped to break down the barriers between different, siloed objectives by demonstrating links and synergies between them. Eradicating poverty (SDG 1), for example, is essential while adapting to climate change, reducing net CO2 emissions and improving people’s health. I intend to continue on this track if I become chair and I propose the preparation of a special report on climate change and sustainable development, with a full assessment of the many synergies (and the trade-offs) between the 17 SDGs. The world needs more solutions and more inspiration, rather than another doom-and-gloom report.

      The IPCC has transformed the production and communication of climate-change knowledge, greatly enhancing awareness and acceptance of the global emergency. I want to reinforce this authority by making the IPCC the global voice of climate. This requires a comprehensive communication strategy. I initiated work on this when I was vice-chair between 2008 and 2015. But getting the message across remains a challenge. I want to improve the readability of report conclusions and make it easier for decision-makers and the public to digest the IPCC’s output. And I want to encourage feedback from both constituencies. Our reports should not only disseminate knowledge but also spark dialogue.

      Inclusivity will be central to my programme as chair. During my campaign visits to more than 25 countries, I was struck by the diversity of human experience. I met many people who had been deeply affected by climate change, ranging from vulnerable women in fishing communities in Bangladesh, to a boy who had seen his friend drowned in a Belgian river swollen by torrential rains, to ministers from small islands that had seen a quarter of their annual GDP wiped out by a hurricane. I also met those trying to help, from experts in carbon capture and storage in Saudi Arabia to remote-sensing scientists monitoring disasters at the European Space Agency. I have talked to climate modellers trained in physics, just as I am; to social and behavioural scientists studying the mental and sociological obstacles to further climate action; and to pension-fund managers trying to make their portfolios greener.

      Climate change experienced in Alaska, France, Vanuatu or Zimbabwe differs in ways we can only grasp and respond to if we study the situations of those on the frontline in different parts of the world. The IPCC is a global organisation, and to continue to be respected globally it must be even more inclusive than it is today.

      I aim to increase the participation of experts from developing and climate-vulnerable countries, particularly women and early-career scientists, from all relevant disciplines, including economic and social sciences. There is evidence that women are particularly vulnerable to the effects of climate change. It cannot be acceptable that they make up only one-third of IPCC report authors. And we need more young experts—who will have more time to make a difference—just as much as we need the knowledge of indigenous people. We also need to remedy the under-representation of experts from the global south.

      The IPCC is well established as an epistemic authority in climate science and serves as a model of international expertise. But it needs to evolve if it wants to stay ahead of the climate emergency and a fast-changing social and geopolitical context. In the next assessment period, our work must be characterised by greater relevance, stronger communication and, above all, inclusivity. I am determined to serve as the chair who makes the IPCC the most solid, most scientific and most eloquent voice on climate, leaving no one unaware, no one behind.■

      Jean-Pascal van Ypersele is professor of climatology and sustainable development sciences at UCLouvain. He was vice-chair of the IPCC between 2008 and 2015.

  • Michael E. Mann, climatologue : « Le #climat ne cesse de se dégrader, et c’est déjà très grave. Mais rien ne prouve que des #points_de_non-retour aient été franchis »
    https://www.lemonde.fr/planete/article/2023/07/23/crise-climatique-a-l-echelle-de-la-civilisation-humaine-nous-entrons-dans-un

    Michael E. Mann, directeur du centre pour les sciences et l’environnement de l’université de Pennsylvanie (Etats-Unis), réfute l’idée d’une accélération du réchauffement, mais prévient que nous pourrions franchir des points de bascule si nous continuons à utiliser des #énergies_fossiles.

    #paywall

  • Survivalisme et permaculture : comment (sur)vivre après l’effondrement ? - Par Pauline Bock | Arrêt sur images
    https://www.arretsurimages.net/emissions/arret-sur-images/survivalisme-et-permaculture-comment-sur-vivre-apres-leffondrement

    Comment vivra-t-on après la fin du monde, ou, en tout cas, de notre monde ? Comment s’y préparer ? Depuis la pandémie de Covid-19, la guerre en Ukraine, la succession d’étés caniculaires et l’inflation qui explose, le spectre de l’effondrement de notre société – qu’il soit climatique, social, politique, ou tout à la fois ne semble plus un lointain horizon, mais une possibilité bien réelle.

    Après notre série d’été sur l’effondrement en 2018, cette année, « Arrêt sur images » a choisi de revenir sur le sujet. Dans cette émission, on se demande si, depuis cinq ans, les médias et la société ont changé de point de vue sur les survivalistes, les preppers, les gens qui stockent des denrées dans leur cave, rejoignent un collectif de permaculture ou qui participent à des stages de survie. Comment repenser nos modes de vie et tendre vers davantage d’autonomie et de résilience ?

    En plateau, la journaliste d’"ASI" Pauline Bock accueille Corinne Morel Darleux, autrice de l’essai sur l’effondrement « Plutôt couler en beauté que flotter sans grâce »(Libertalia, 2019), qui tient une chronique mensuelle pour « Reporterre » et a dirigé le hors-série « Socialter » autour du sujet ""Comment nous pourrions vivre" " ; Eléonore Lluna, ancienne infirmière devenue coach en survie, qui propose des stages d’autonomie en pleine nature. En visio, le journaliste Alexandre Pierrin, qui réalisé la série « Survivre » sur les survivalistes en France pour France TV Slash ; et la chercheuse au CNRS Madeleine Sallustio, qui a étudié les collectifs néo-paysans et leur rapport à l’avenir dans l’ouvrage « À la recherche de l’écologie temporelle : Vivre des temps libérés dans les collectifs néo-paysans autogérés : une analyse anthropologique ».

    #survie #effondrement #survivalisme #médias #journalisme #paywall

  • Je suis maraîcher bio et je ne veux pas choisir entre le camp des agriculteurs et celui des écologistes | Tribune/Libé | 17.07.23

    https://www.liberation.fr/idees-et-debats/tribunes/je-suis-maraicher-bio-et-je-ne-veux-pas-choisir-entre-le-camp-des-agricul

    Face à la montée du dérèglement climatique, je me refuse à choisir entre une radicalité revendiquée et un consensus mortifère. Au risque de m’exposer aux critiques, notamment celles de mes amis de la Confédération paysanne et des Soulèvements de la Terre, je voudrais proposer une piste. Même si l’urgence climatique est à notre porte, même si les gouvernements successifs font des efforts démesurés pour maintenir l’ordre établi, nous devons malgré tout sortir de l’urgence et nous approcher d’une expérience de la nécessité qui intègre le temps et la durée. Sans quitter la flamme du soulèvement pour autant. Ce double mouvement de soulèvement et d’enracinement, en apparence contradictoire, est une piste pour que l’écologie devienne populaire. Et de ce point de vue, il y a urgence. Quelle serait la méthode pour y parvenir ?

  • La #justice française suspend le contrôle des frontières par #drones

    Le jeudi 13 juillet, le Tribunal Administratif de Pau a rendu une décision annulant l’ordonnance du 26 juin 2023 du préfet des Pyrénées-Atlantiques. Cette #ordonnance autorise la capture, l’archivage et la transmission d’#images par des #caméras installées sur des aéronefs entre le 26 juin et le 26 juillet.

    Cette décision fait suite à la #plainte déposée par les avocats de Pau et de Bayonne, la fédération Etorkinekin Diakité et l’association SOS Racisme Gipuzkoa.

    La décision donne raison aux plaignants : cette ordonnance porte gravement et manifestement atteinte au droit et au respect de la vie privée et familiale.

    SOS Racisme Gipuzkoa - #SOS_Racisme_Gipuzkoa s’est montré satisfait de la décision du tribunal de Pau. Elle montre qu’il est possible de trouver une protection dans les garanties légales qui protègent les droits fondamentaux contre les actions de l’exécutif français contre ces droits.

    SOS Racisme a apprécié le travail accompli par l’Association des Avocats pour obtenir cette résolution et s’est montrée disposée à la poursuivre, car le gouvernement français viole à plusieurs reprises les droits fondamentaux des personnes résidant ou circulant dans le Pais Basque.

    SOS Racisme demande à nouveau aux autorités françaises et espagnoles de respecter le droit de chacun à la libre circulation et, en particulier, de circuler sur les frontières #Irun / #Hendaye. Il demande également la suspension immédiate des contrôles de profil racial, qui sont effectués systématiquement par les policiers.

    Donostia, 2023/07/14

    SOS Racismo Gipuzkoa

    Gipuzkoako SOS Arrazakeria

    #militarisation_des_frontières #frontières #migrations #Espagne #France #suspension #Pyrénées

    Reçu via la mailing-list Migreurop, le 14/07/2023

    • SOS Racismo Gipuzkoa: La justicia francesa suspende el control fronterizo por drones

      El jueves 13 de julio, el Tribunal Administrativo de Pau ha dictado una resolución por la que suspende la orden del Prefecto de Pyrénées-Atlantiques de 26 de junio de 2023 que autoriza la captación, archivo y transmisión de imágenes por medio de cámaras instaladas en aeronaves entre el 26 junio y el 26 de julio.

      La resolución responde a la demanda que, en ese sentido, plantearon ante dicho tribunal, la Asociación de Abogados para la defensa de las personas extranjeras, formada por abogados de Pau y Baiona, la Federación Etorkinekin Diakité y SOS Racismo Gipuzkoa- Gipuzkoako SOS Arrazakeria.

      La resolución da la razón a los demandantes de que dicha orden afecta de manera grave y manifiestamente ilegal al derecho y al respeto de la vida privada y familiar.

      SOS Racismo Gipuzkoa- Gipuzkoako SOS Arrazakeria se felicita por la resolución del tribunal de Pau. Muestra que es posible encontrar amparo en las garantías legales que salvaguardan derechos fundamentales frente a actuaciones contrarias a los mismos por parte del ejecutivo galo.

      SOS Racismo pone en valor la labor desarrollada por la Asociación de Abogados para conseguir dicha resolución y muestra su disposición a continuar con dicha labor ante las reiteradas violaciones por parte del ejecutivo galo respecto a derechos fundamentales de las personas que viven o transitan por el País Vasco.

      SOS Racismo reitera su demanda a las autoridades francesas y españolas de respetar el derecho de todas las personas a la libre circulación y, en concreto, a transitar por las áreas fronterizas de Irun/Hendaia. Reclama, a su vez, el cese inmediato de los controles por perfil racial que, de manera sistemática, llevan a cabo las diversas policías.

      https://sosracismo.eu/justicia-paraliza-drones-frontera

      Pour télécharger l’#ordonnance (n° 2301796):
      https://sosracismo.eu/wp-content/uploads/2023/07/Resolucion-drones.pdf

    • Section du Contentieux, Juge des référés, 25 juillet 2023, 476151

      Texte
      Vu la procédure suivante :

      L’association Avocats pour la défense des étrangers, la Fédération Etorkinekin Diakité, l’association S.O.S. Racismo Gipuzkoa - Gipuzkoako S.O.S. Arrazakria, M. A H, Mme T H, M. B L, M. M N, Mme S K, Mme O Q, Mme F P, M. G C, Mme J C, Mme R E et M. D I ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Pau, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, d’une part, de suspendre l’exécution de l’arrêté du 26 juin 2023 par lequel le préfet des Pyrénées-Atlantiques a autorisé la captation, l’enregistrement, et la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs, et, d’autre part, d’enjoindre au préfet des Pyrénées-Atlantiques de mettre un terme à l’usage de ce dispositif. Par une ordonnance n° 2301796 du 13 juillet 2023, le juge des référés du tribunal administratif de Pau a suspendu l’exécution de cet arrêté.

      Par une requête et un nouveau mémoire, enregistrés les 20 et 24 juillet 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, le ministre de l’intérieur et des outre-mer demande au juge des référés du Conseil d’Etat, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative :

      1°) d’annuler l’ordonnance n° 2301796 du 13 juillet 2023 du juge des référés du tribunal administratif de Pau ;

      2°) de rejeter la demande présentée par l’association Avocats pour la défense des étrangers et autres.

      Il soutient que :

      – la condition d’urgence n’est pas satisfaite dès lors que, d’une part, il n’est pas porté un préjudice suffisamment grave et immédiat à la situation actuelle des requérants en ce que seul un nombre restreint d’individus est concerné par la mesure de surveillance, qui est par ailleurs encadrée par de strictes garanties, qu’elle ne présente pas de caractère fréquent et répété et qu’il n’en résulte aucune atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale et, d’autre part, la mesure est indispensable pour assurer la sauvegarde de l’ordre public ;

      – aucune atteinte grave et manifestement illégale n’a été portée à une liberté fondamentale ;

      – l’arrêté du 26 juin 2023 n’est pas entaché d’illégalité dès lors, en premier lieu, qu’il est nécessaire en ce qu’il répond à l’objectif de lutte contre l’immigration irrégulière, alors que le nombre des franchissements illégaux de la frontière, qui peuvent s’avérer périlleux, s’accroît substantiellement, en particulier en été, en deuxième lieu, qu’il n’existe pas de mesure moins intrusive pour atteindre pleinement la finalité poursuivie, les sentiers concernés et les chemins situés à proximité n’étant pas totalement carrossables, et, en dernier lieu, que la mesure est proportionnée à l’objectif poursuivi.

      Par un mémoire en défense et un nouveau mémoire, enregistrés les 23 et 24 juillet 2023, l’Association pour la défense des étrangers et autres concluent au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de l’Etat le versement de la somme de 200 euros à chacun des défendeurs au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative. Ils soutiennent que la condition d’urgence est satisfaite, et que l’arrêté du 26 juin 2023 porte une atteinte grave et immédiate au droit au respect de la vie familiale.

      Vu les autres pièces du dossier ;

      Vu :

      – la Constitution, notamment son Préambule ;

      – la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

      – le code de la sécurité intérieure ;

      – la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 modifiée ;

      – le code de justice administrative ;

      Après avoir convoqué à une audience publique, d’une part, le ministre de l’intérieur et des outre-mer, et d’autre part, l’association Avocats pour la défense des étrangers et autres ;

      Ont été entendus lors de l’audience publique du 24 juillet 2023, à 10 heures 30 :

      – Me Mathonnet, avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation, avocat de l’association Avocats pour la défense des étrangers et autres ;

      – les représentantes de l’association Avocats pour la défense des étrangers et autres ;

      – les représentants du ministre de l’intérieur et des outre-mer ;

      à l’issue de laquelle le juge des référés a reporté la clôture de l’instruction au même jour à 19 heures 30 ;

      Considérant ce qui suit :

      1. L’article L. 511-1 du code de justice administrative dispose que : « Le juge des référés statue par des mesures qui présentent un caractère provisoire. Il n’est pas saisi du principal et se prononce dans les meilleurs délais. » Aux termes de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : « Saisi d’une demande en ce sens justifiée par l’urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d’une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public aurait porté, dans l’exercice d’un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. () ».

      Sur l’office du juge des référés et sur les libertés fondamentales en jeu :

      2. Il résulte de la combinaison des dispositions des articles L. 511-1 et L. 521-2 du code de justice administrative qu’il appartient au juge des référés, lorsqu’il est saisi sur le fondement de l’article L. 521-2 et qu’il constate une atteinte grave et manifestement illégale portée par une personne morale de droit public à une liberté fondamentale, résultant de l’action ou de la carence de cette personne publique, de prescrire les mesures qui sont de nature à faire disparaître les effets de cette atteinte, dès lors qu’existe une situation d’urgence caractérisée justifiant le prononcé de mesures de sauvegarde à très bref délai et qu’il est possible de prendre utilement de telles mesures.

      3. Pour l’application de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, le droit au respect de la vie privée, qui comprend le droit à la protection des données personnelles, et la liberté d’aller et venir constituent des libertés fondamentales au sens des dispositions de cet article.

      Sur le cadre juridique du litige :

      4. Aux termes de l’article L. 242-5 du code de la sécurité intérieure « I - Dans l’exercice de leurs missions de prévention des atteintes à l’ordre public et de protection de la sécurité des personnes et des biens, les services de la police nationale et de la gendarmerie nationale ainsi que les militaires des armées déployés sur le territoire national dans le cadre des réquisitions prévues à l’article L. 1321-1 du code de la défense peuvent être autorisés à procéder à la captation, à l’enregistrement et à la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs aux fins d’assurer () / 5° La surveillance des frontières, en vue de lutter contre leur franchissement irrégulier ; / (). / Le recours aux dispositifs prévus au présent I peut uniquement être autorisé lorsqu’il est proportionné au regard de la finalité poursuivie. / II - Dans l’exercice de leurs missions de prévention des mouvements transfrontaliers de marchandises prohibées, les agents des douanes peuvent être autorisés à procéder à la captation, à l’enregistrement et à la transmission d’images au moyen de caméras installées sur des aéronefs ». Aux termes de l’article L. 242-4 du même code « La mise en œuvre des traitements prévus aux articles L. 242-5 () doit être strictement nécessaire à l’exercice des missions concernées et adaptée au regard des circonstances de chaque intervention ». En vertu du IV de l’article L. 242-5 de ce code, l’autorisation requise, subordonnée à une demande qui précise, notamment, « () 2° La finalité poursuivie ; / 3° La justification de la nécessité de recourir au dispositif, permettant notamment d’apprécier la proportionnalité de son usage au regard de la finalité poursuivie ; () / 8° le périmètre géographique concerné », « est délivrée par décision écrite et motivée du représentant de l’Etat dans le département ou, à Paris, du préfet de police, qui s’assure du respect du présent chapitre. Elle détermine la finalité poursuivie et ne peut excéder le périmètre strictement nécessaire à l’atteinte de cette finalité ». Ainsi que l’a jugé le Conseil constitutionnel par sa décision n° 2021-834 DC du 20 janvier 2022, ces dispositions ont précisément circonscrit les finalités justifiant le recours à ces dispositifs, et l’autorisation requise, qui détermine cette finalité, le périmètre strictement nécessaire pour l’atteindre ainsi que le nombre maximal de caméras pouvant être utilisées simultanément, ne saurait être accordée qu’après que le préfet s’est assuré que le service ne peut employer d’autres moyens moins intrusifs au regard du droit au respect de la vie privée ou que l’utilisation de ces autres moyens serait susceptible d’entraîner des menaces graves pour l’intégrité physique des agents, et elle ne saurait être renouvelée sans qu’il soit établi que le recours à des dispositifs aéroportés demeure le seul moyen d’atteindre la finalité poursuivie.

      Sur le litige :

      5. Par un arrêté du 26 juin 2023, le préfet des Pyrénées-Atlantiques a autorisé la captation, l’enregistrement et la transmission d’images par la direction interdépartementale de la police aux frontières d’Hendaye aux moyens de caméras installées sur des aéronefs au titre de la surveillance aux frontières en vue de lutter contre leur franchissement irrégulier, du 26 juin au 26 juillet 2023 et de 9 heures à 18 heures, sur un périmètre recouvrant une partie de la frontière franco-espagnole et du territoire des communes d’Hendaye, de Biriatou et d’Urrugne. Le ministre de l’intérieur et des outre-mer fait appel de l’ordonnance du 13 juillet 2023 par laquelle le juge des référés du tribunal administratif de Pau, statuant sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative, a suspendu l’exécution de cet arrêté.

      Sur la condition tenant à l’existence d’une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale :

      6. Il résulte de l’instruction et des échanges au cours de l’audience publique que, si l’autorisation ne permet d’utiliser qu’un seul drone à la fois, son périmètre géographique, qui s’étend sur l’essentiel du territoire de la commune de Biriatou et sur une partie de ceux des communes d’Hendaye et d’Urrugne, recouvre une superficie de près de 20 km2 et comprend un grand nombre de maisons d’habitation.

      7. Le ministre de l’intérieur et des outre-mer soutient, d’une part, que cette mesure est nécessaire au regard de la hausse du nombre de franchissements illégaux de la frontière, d’autre part, qu’il n’existe pas de mesure moins intrusive, les effectifs de fonctionnaires affectés à la lutte contre l’immigration irrégulière clandestine ayant diminué depuis le début de l’année 2023, en raison de la moindre disponibilité des unités de CRS et de gendarmes mobiles mis à disposition de la direction interdépartementale de la police de l’air et des frontières, fréquemment affectés à d’autres missions, alors qu’une partie de la zone est d’un accès difficile, les sentiers utilisés ou les chemins situés à proximité n’étant pas entièrement carrossables, et les migrants s’en éloignant parfois pour échapper aux contrôles, et enfin que la mesure, notamment la délimitation de son périmètre géographique, est proportionnée compte tenu de ces caractéristiques. Ces appréciations sont contestées par l’association Avocats pour la défense des étrangers et autres, qui produisent des séries de données recueillies par une association sur l’accueil de migrants à proximité de la zone entre mars 2021 et mai 2023 faisant apparaître une baisse des flux et l’absence d’effets saisonniers notables, ainsi que les chiffres du centre d’accueil de migrants de la mairie de Bayonne, en baisse en 2023, et des indications sur les moyens matériels et humains déployés par la police de l’air et des frontières aux principaux points de passage de la zone et sur les sentiers concernés jusqu’à la date de la décision contestée, ainsi que sur l’accessibilité de ces sentiers. Les séries de données extraites du système PAFISA, relatives à l’activité de la direction interdépartementale de la police aux frontières de Hendaye, compétente dans les départements des Pyrénées-Atlantiques et des Landes, et les éléments de contexte partiels présentés par le ministre, les uns et les autres pour la première fois à l’issue de l’audience, qui font apparaître, entre le premier semestre 2022 et le premier semestre 2023, une baisse de 6 154 à 3 481 du nombre de non-admissions à la frontière, une hausse de 206 à 366 du nombre de réadmissions par les autorités espagnoles et une hausse de 539 à 817 du nombre d’étrangers en situation irrégulière interpellés, ne permettent pas, en l’état de l’instruction, de confirmer l’existence de facteurs de hausse de l’activité surveillance des frontières en vue de lutter contre leur franchissement irrégulier. En outre le ministre n’apporte pas d’indication sur la part de ces flux qui se rapporte à la zone concernée par l’arrêté litigieux. En l’état de l’instruction, les données produites par l’administration sur les flux migratoires et les éléments fournis sur les caractéristiques géographiques de la zone concernée et sur les moyens qui y sont affectés à la lutte contre le franchissement irrégulier des frontières ne sont pas suffisamment circonstanciés pour justifier, sur la base d’une appréciation précise et concrète de la nécessité de la proportionnalité de la mesure, que le service ne peut employer, pour l’exercice de cette mission dans cette zone et sur toute l’étendue de son périmètre, d’autres moyens moins intrusifs au regard du respect de la vie privée que les mesures mentionnées au point 5, ou que l’utilisation de ces autres moyens serait susceptible d’entraîner des menaces graves pour l’intégrité physique des agents. Par suite, c’est à bon droit que le juge des référés du tribunal administratif de Pau a jugé que l’association Avocats pour la défense des étrangers et autres étaient fondés à soutenir que l’arrêté contesté portait une atteinte grave et manifestement illégale au droit au respect de la vie privée.

      Sur la condition d’urgence :

      8. L’urgence de la suspension de l’arrêté contesté sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative doit être appréciée en tenant compte non seulement de ses effets sur les intérêts défendus par les requérants de première instance mais aussi de l’objectif de prévention des atteintes à l’ordre public auquel elle a pour objet de contribuer. Eu égard, d’une part, au nombre de personnes susceptibles de faire l’objet des mesures de surveillance litigieuses, d’autre part, aux atteintes qu’elles sont susceptibles de porter au droit au respect de la vie privée, et alors, ainsi qu’il a été dit au point 6, qu’il ne résulte pas de l’instruction que l’objectif de prévention des atteintes à l’ordre public ne pourrait être atteint en recourant à des mesures moins intrusives au regard du droit au respect de la vie privée, ou que l’utilisation de ces autres moyens serait susceptible d’entraîner des menaces graves pour l’intégrité physique des agents, la condition d’urgence doit être regardée comme remplie.

      9. Il résulte de ce qui précède que le ministre de l’intérieur et des outre-mer n’est pas fondé à soutenir que c’est à tort que, par l’ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Pau a suspendu l’exécution de l’arrêté du préfet des Pyrénées-Atlantiques du 26 juin 2023.

      10. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat le versement à chacun des défendeurs d’une somme de 200 euros au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

      O R D O N N E :

      –-----------------

      Article 1er : La requête du ministre de l’intérieur et des outre-mer est rejetée.

      Article 2 : L’Etat versera, au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, une somme de 200 euros chacun à l’association Avocats pour la défense des étrangers, à la Fédération Etorkinekin Diakité, à l’association S.O.S. Racismo Gipuzkoa - Gipuzkoako S.O.S. Arrazakria, à M. A H, à Mme T H, à M. B L, à M. M N, à Mme S K, à Mme O Q, à Mme F P, à M. G C, à Mme J C, à Mme R E et à M. D I.

      Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée au ministre de l’intérieur et des outre-mer, ainsi qu’à l’association Avocats pour la défense des étrangers, premier défendeur nommé.

      Fait à Paris, le 25 juillet 2023

      Signé : Jean-Yves Ollier

      https://justice.pappers.fr/decision/c8942bf2cabc0c5be781d2b621e7c3ef

  • « La mort de Nahel M. s’inscrit dans la continuité historique des crimes racistes commis à l’encontre des Noirs et des Arabes de ce pays »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/15/la-mort-de-nahel-m-s-inscrit-dans-la-continuite-historique-des-crimes-racist

    « La mort de Nahel M. s’inscrit dans la continuité historique des crimes racistes commis à l’encontre des Noirs et des Arabes de ce pays »
    TRIBUNE – Hicham Benaissa – Sociologue
    Le sociologue Hicham Benaissa rappelle, dans une tribune au «  Monde* », qu’il est vain de croire que le calme revenu après les émeutes en banlieue est durable. La colère se manifestera tant que nos institutions ne regarderont pas notre passé colonial en face*

    Un fait devient social et historique, nous enseigne Emile Durkheim, lorsqu’il est régulier, objectif, général. C’est d’ailleurs à ce titre que le sociologue s’est intéressé au crime en tant qu’objet qui répond aux critères d’un phénomène social. Indépendamment de la volonté des uns et des autres, un fait social s’impose à nous de l’extérieur, à tel point que nous pouvons en donner des prévisions.

    La sociologue Rachida Brahim a fourni un travail de recherche précieux qui a consisté à recenser le nombre de crimes racistes commis entre 1970 et 1997. Elle a listé, au total, 731 actes, soit une moyenne de 27 cas par an. Dans le cadre d’un débat critique et universitaire, on peut, si on le souhaite, débattre des chiffres et des concepts, mais il sera difficile de contester la constance et la régularité de ce phénomène. Et, au-delà de la statistique froide, il faut rappeler à la conscience publique la nature précise de quelques événements marquants.

    #paywall

    • French riots show how entrenched inequalities have become

      The gulf between immigrants and those born in the country is larger than in almost any other developed nation

      Imagine two countries. The first is proudly Christian, it allowed racial segregation in living memory and racism is mentioned more frequently in its media than anywhere else in the developed world. The second is strictly secular and legally prohibits the collection of data on people’s race, a conscious effort by its leaders to avoid using ethnicity to differentiate or divide.

      Which do you think would offer people from diverse racial and religious backgrounds the best prospects of success? Of becoming equal participants in society? The answers revealed in the data are surprising.

      In 2021, US unemployment was 5.5 per cent for those born in the country, and 5.6 per cent for those born overseas. Black and white employment rates are now neck and neck. In France, unemployment is seven per cent among those born in the country, but 12 per cent for immigrants, rising past 17 per cent among those who arrived in the last ten years. Comparisons with Britain, whose demographics and colonial history perhaps make for a fairer benchmark, are similarly damning.

      Following a week of rioting across France, spurred by the death of a teenager of North African descent shot dead by police at a traffic stop, these statistics are worth revisiting. While the number of arrests has declined this week, the need for a serious conversation about how France continues to fail its immigrant communities and their neighbourhoods remains.

      Just as in France’s 2005 bout of urban violence, or London’s own riots in 2011, fractious relations between police and ethnic minorities provided the spark for unrest fuelled by deprivation and social exclusion. Rioters tend to come disproportionately from disadvantaged neighbourhoods: those who don’t have a stake in society have little to lose in burning it down.

      Across the west, young black and brown men have grown bitterly used to being disproportionately targeted by police stop and searches, but the magnitude of the disparity in France is shocking. In London, black people are between two and three times as likely to be apprehended as their white counterparts, but in Paris the figure rises to six times, and almost eight times for those of Arab origin.

      Encounters with French police are more lethal, too, as officers are routinely armed and are allowed to shoot at people who don’t comply with traffic stops if they are deemed to pose a safety risk. There were 26 fatal police shootings in France in 2022, compared to just 2 in the UK, and in the past 18 months French police have shot dead 17 people during traffic stops such as that which sparked the latest riots.

      Last Friday as the unrest escalated, the two largest police unions released a statement declaring they were “at war” with “vermin” and “savage hordes”. This culture of hostility has grown since Nicolas Sarkozy abandoned neighbourhood policing two decades ago, in favour of more repressive tactics. A future government led by Marine Le Pen’s far-right party would surely only lean into the adversarial approach.

      And there is little sign of improvement on integration. One in five of France’s foreign-born population believe they are discriminated against, the joint highest with Italy in the developed world. Meanwhile France’s immigrants are almost three times as likely as those born in the country to be in poverty. In the UK, the poverty rates between immigrants and others are the same.

      This French disparity is compounded by decades of failed urban policy resulting in immigrant communities being concentrated in the banlieues, emphasising their otherness and hampering social mobility. The cheek-by-jowl nature of wealth and poverty in London comes with its own problems, but has been a buttress against the ossification of inequality seen in France. Twenty-eight per cent of recent French immigrants are now in the lowest tenth of earners, compared to just eight per cent of non-immigrants. In the UK, the figure is ten per cent regardless of country of birth.

      Despite claims that France is race-blind, the data tells a different story. Without reforms in both policing and social exclusion, there is little hope that these violent episodes will cease any time soon.

      john.burn-murdoch@ft.com, @jburnmurdoch

    • Les langues se délient dans la presse étrangères. Très bien. Mais à moins qu’une agence de notation dégrade à nouveau la France sur le marché de la dette, quels bénéfices pourrait-on retirer de ce « Macronie bashing » ?
      Sur un horizon proche, perso, je ne vois que des emmerdes. Les « investisseurs » se désinvestissent (trop d’insécurité). La France ainsi ostracisée perd tout crédit sur la scène internationale (n’est pas Donald Trump qui veut).
      Le gouverne-ment s’arqueboute sur un déni de plus en plus surréaliste. Pendant qu’une grande partie de la population tombe dans la précarité voire la misère, le pays « se tient sage » grâce à la propagande de Brave France Macronnienne (BFM) et consorts...
      {edit] j’oubliais grâce aussi au lobbying intense des « syndicats » du crime policier.

  • Didier Fassin : en France, « la police a gagné la bataille idéologique » | Mediapart | 07.07.23

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/070723/didier-fassin-en-france-la-police-gagne-la-bataille-ideologique

    Idées — Entretien

    Le chercheur Didier Fassin enseigne à la fois aux États-Unis et en France, où il a étudié l’action de la police dans les quartiers populaires. Pour Mediapart, il revient notamment sur les similitudes et les différences après les meurtres de George Floyd et de Nahel.

    pas lu :-) Mais autant, la police n’a gagné qu’une bataille - et encore, faut voir.

    => https://seenthis.net/messages/1008999#message1009175 via @ant1

  • #Emeutes_urbaines : « Ce qu’elles révèlent, ce n’est pas tant l’échec de la #politique de la #ville que celui de toutes les #politiques_publiques »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/06/emeutes-urbaines-ce-qu-elles-relevent-ce-n-est-pas-tant-l-echec-de-la-politi

    Depuis le début des années 1980, les vagues émeutières embrasant les quartiers populaires s’accompagnent de controverses interprétatives enflammées dans les médias. Les explications proposées ont varié au fil du temps, mais un argument traverse les décennies qui semble faire consensus chez tous les commentateurs : l’émeute marquerait l’échec de la politique de la ville. La politique ainsi mise en cause a pourtant connu d’importantes évolutions au cours des quarante dernières années, le plus souvent à la suite d’épisodes émeutiers. Si échec de la politique de la ville il y a, ce n’est pas la même politique qui a échoué au début des années 1990, en 2005 ou aujourd’hui.

    Le jugement d’échec semble d’autant plus incontestable en 2023 que l’Etat aurait mobilisé, depuis une quinzaine d’années, des budgets considérables pour les quartiers populaires. Les annonces récurrentes d’un nouveau « plan banlieue » ont pu donner crédit à cette idée d’une politique de la ville richement dotée. Bien que ces annonces soient le plus souvent restées des annonces, elles ont ouvert la voie à la dénonciation des « milliards pour les banlieues », au profit de populations qui ne le mériteraient pas.

    Portée par des entrepreneurs de fracture sociale, cette critique a été d’autant plus ravageuse qu’elle s’est prolongée par une mise en concurrence des souffrances territoriales, opposant les quartiers défavorisés des métropoles et une « France périphérique » aux contours flous mais dont la couleur est claire. Les premiers bénéficieraient d’une discrimination positive, au détriment des villes moyennes, des espaces périurbains et des territoires ruraux, dont les populations sont pourtant durement affectées par les recompositions industrielles et la précarisation de l’emploi, les politiques d’austérité et les fermetures de services publics, ainsi que par l’augmentation du coût de la vie.

    La critique de l’inefficacité se mue alors en une mise en cause de la légitimité même de la politique de la ville, illustrée par cette formule qui fait florès à l’extrême droite : on déshabille la « France périphérique » pour habiller celle qui vit de l’autre côté du périph.

    Moins de 1 % du budget de l’Etat

    Il faut pourtant le répéter inlassablement : les quartiers qui cumulent toutes les difficultés sociales ne bénéficient pas d’un traitement de faveur. Les crédits de la politique de la ville ont toujours été limités, inférieurs à 1 % du budget de l’Etat. Comme l’ont montré de nombreux travaux de recherche et d’évaluation ainsi que plusieurs rapports de la Cour des comptes, les moyens alloués au titre de cette politique ne suffisent pas à compenser l’inégale allocation des budgets des autres politiques publiques (éducation, emploi, santé, sécurité…) qui s’opère systématiquement au détriment des quartiers dits « prioritaires » et de leurs habitants.

    Les seuls milliards dont ces quartiers ont vu la couleur sont ceux de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), qui ne proviennent que marginalement de l’Etat : sa contribution se limite à 10 % du budget de l’agence, loin derrière Action Logement (70 %) et l’Union sociale pour l’habitat (20 %). Ce sont donc les cotisations des employeurs pour le logement de leurs salariés et les contributions du monde HLM (habitation à loyer modéré) qui financent la rénovation urbaine et non les impôts des Français.

    Bien qu’infondée, la critique des « milliards pour la banlieue » n’a pas été sans effet, conduisant les gouvernants à désinvestir la politique de la ville par crainte de susciter le ressentiment d’une fraction importante de l’électorat populaire sensible aux discours du Rassemblement national sur l’abandon de la France périphérique. Cette crainte a été amplifiée par le mouvement des « gilets jaunes », à la suite duquel la politique de la ville et les quartiers qu’elle cible ont disparu de l’agenda politique.

    La « séquence banlieue » ouverte lundi 26 juin par Emmanuel Macron à Marseille visait à répondre aux maires de banlieue et aux acteurs de terrain qui, depuis l’enterrement du rapport Borloo (dont il n’est pas inutile de rappeler aujourd’hui le sous-titre : « pour une réconciliation nationale »), critiquent ce désintérêt de l’exécutif pour les quartiers populaires.

    Défiance généralisée

    Le grand débat organisé dans la cité de la Busserine devait mettre en scène un président à l’écoute, mobilisant des moyens exceptionnels pour l’égalité des chances dans des quartiers nord délaissés par les élus locaux. La séquence se prolongeait le lendemain à Grigny (Essonne), avec le lancement des célébrations des 20 ans de l’ANRU, dont les réalisations ont produit des transformations visibles du cadre de vie de centaines de quartiers, à défaut de leur situation sociale. Elle devait se conclure à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines), avec un comité interministériel des villes (CIV) maintes fois repoussé, où allaient enfin être annoncées les mesures du plan Quartiers 2030 concocté par Olivier Klein.

    La séquence était bien préparée mais rien ne s’est passé comme prévu. S’il a permis au président de renouer avec un exercice qu’il affectionne, le grand débat a surtout révélé l’exaspération des habitants, l’épuisement des acteurs associatifs et la défiance généralisée à l’égard du pouvoir politique. L’explosion de colère qui a suivi la mort du jeune Nahel a éclipsé les images de vingt ans de rénovation urbaine, et contraint le gouvernement à rapatrier à Matignon un CIV dont les annonces ont été repoussées à une date indéterminée. Ce report peut être utile s’il amène le gouvernement à réviser sa copie, pour envisager des réformes structurelles plutôt qu’un catalogue de programmes exceptionnels et de mesures expérimentales.

    Car ce que révèlent les #émeutes, ce n’est pas tant l’échec de la #politique_de_la_ville que celui de toutes les politiques publiques qui laissent se déployer la #ségrégation, la #stigmatisation et les #discriminations, voire y contribuent. A cet égard, on ne peut que regretter l’abandon en mai dernier du plan de #mixité_scolaire envisagé par Pap Ndiaye. Mais ce que rappellent d’abord les émeutes, c’est l’état plus que dégradé des relations entre la #police et les #populations_racisées des #quartiers_populaires, et la nécessité d’une transformation profonde des #pratiques_policières. Même si elle est politiquement difficile, l’ouverture de ce chantier s’impose, tant elle conditionne la #réconciliation_nationale.

    by https://twitter.com/renaud_epstein

    • Fabien Jobard, politiste : « Le législateur a consacré l’ascendant de la police sur la jeunesse postcoloniale »
      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/05/fabien-jobard-politiste-le-legislateur-a-consacre-l-ascendant-de-la-police-s

      Le spécialiste des questions policières revient, dans un entretien au « Monde », sur les spécificités françaises dans les rapports entre les forces de l’ordre et la jeunesse des quartiers populaires issue de l’immigration. Il éclaire le contexte dans lequel prennent place les émeutes ayant suivi la mort de Nahel M. à Nanterre.

      Directeur de recherche au CNRS, Fabien Jobard est politiste, chercheur au Centre de recherche sociologique sur le droit et les institutions pénales. Il est l’auteur, avec le sociologue Olivier Fillieule, de Politiques du désordre. La police des manifestations en France (Seuil, 2020), avec Daniel Schönpflug, de Politische Gewalt im urbanen Raum (« violence politique en milieu urbain », Gruyter, 2019, non traduit), avec Jérémie Gauthier, de Police : questions sensibles (Presses universitaires de France, 2018) et, avec Jacques de Maillard, de Sociologie de la police. Politiques, organisations, réformes (Presses universitaires de France, 2015). Directeur du Groupe européen de recherches sur les normativités (GERN), Fabien Jobard publie en septembre une bande dessinée réalisée avec Florent Calvez : de la création des bobbys anglais aux dystopies policières contemporaines, Global Police. La question policière à travers le monde et l’histoire (Delcourt/Encrage) interroge la nature et le devenir de nos polices.

      Les événements de Nanterre, qu’il s’agisse de la mort de Nahel M. ou des émeutes qui ont suivi, montrent à quel point les relations entre la police et les jeunes des quartiers populaires sont dégradées. S’agit-il d’une spécificité française ?

      Les événements auxquels nous avons assisté ces derniers jours ne sont pas propres à la France : on en observe de comparables aux Etats-Unis, en Belgique, aux Pays-Bas – parfois au Royaume-Uni ou en Suède. Or, Suède mise à part, ces pays ont en commun une histoire contemporaine marquée soit par la prégnance de l’esclavage des populations noires, soit par la présence d’une population issue des territoires coloniaux. Le contraste avec l’Allemagne est frappant : dans ce pays qui a été privé de ses colonies africaines par le traité de Versailles, en 1919, les tensions avec les populations minoritaires existent mais elles sont bien moins fréquentes et bien moins intenses...

      La suite #paywall

    • De quelle manière cette histoire coloniale française pèse-t-elle ?

      [Fabien Jobard ] La guerre d’Algérie et la colonisation sont à mille lieues des préoccupations des policières et policiers de notre pays : ce ne sont pas eux, individuellement, qui portent cette histoire et la font perdurer. Savoir si les policiers sont racistes ou non n’aide d’ailleurs pas vraiment à comprendre ce qui se joue. Ce qui fait que la police est un lieu de perpétuation du rapport colonial sur notre sol est la collision de deux phénomènes historiques.

      Le premier est le fait que les populations issues des territoires nord-africains ont été installées à la va-vite dans des grands ensembles de nos banlieues. Ces villes étaient sous-administrées – pas ou presque pas de police, quelques brigades de gendarmerie, des commissariats isolés. A cette époque, la police faisait avec ce qu’elle avait et, de surcroît, recrutait peu d’effectifs nouveaux. La doctrine et les chefs disponibles étaient donc ceux des années 1950-1960, ceux de la #guerre_en_métropole, lorsque la gestion des populations nord-africaines reposait sur la mise à distance, le contrôle, l’imposition d’une obligation de déférence permanente – bref, la subordination sous férule policière. Dans un tel schéma, le #contrôle_d’identité avec fouille est central : c’est l’instrument majeur d’imposition de l’autorité policière comme préalable non négociable.

      Une telle gestion des populations subalternes aurait pu s’éteindre peu à peu, silencieusement emportée par la croissance et le renouvellement des générations, tant du côté de la police que du côté de la jeunesse. Mais au milieu des années 1970, la France s’est engagée sur une voie économique singulière, celle de la #désindustrialisation – et c’est le second phénomène historique décisif. De 1975 à nos jours, plus de 2 millions d’emplois industriels se sont évaporés : la France est devenue un pays de services et cette mutation a pénalisé en tout premier lieu les jeunes hommes sortis du système scolaire sans qualification – les jeunes femmes s’en sortent mieux. Or, dans quels rangs se recrutent principalement ces jeunes hommes ? Dans ceux des familles les moins favorisées, les moins dotées – les familles immigrées.

      C’est un contraste marquant avec la trajectoire historique allemande : l’Allemagne a protégé son industrie. Lorsque les jeunes sortent du système scolaire sans qualification – le système allemand est bien plus soucieux de la formation aux métiers manuels –, une place les attend à l’usine, sur la chaîne, à l’atelier. Outre-Rhin, l’industrie parvient donc à absorber ces « jeunes à problèmes », comme on dit là-bas, comme autrefois [ces saloperies de, ndc] Renault et Citroën absorbaient nos blousons noirs.

      En France, dès le milieu des années 1970, une #population_oisive essentiellement formée des jeunes issus de l’immigration coloniale s’est constituée au pied des tours. Cette jeunesse est disponible aux tensions avec la police : de #Toumi_Djaidja, fils de harki victime, en 1983, un soir de ramadan, aux Minguettes, d’un tir policier dans le ventre alors qu’il tentait de venir en aide à un de ses amis aux prises avec un chien policier, à Nahel, à Nanterre, en 2023, les relations sont explosives. La dynamique socio-économique française a fourni à la police une clientèle, essentiellement issue des populations coloniales, qui est enfermée, avec elle, dans un face-à-face mortifère et sans issue. [une bien trop grande proximité, ndc]

      Les pratiques de la police sont encadrées par le droit. Quelle a été l’évolution des textes depuis les années 1970 ?

      Sur ce plan, il est frappant de constater que le droit, notre droit républicain, n’a pas corrigé les pratiques mais les a, au contraire, garanties. Je reprends les contrôles d’identité. Ces pratiques se développaient de manière assez sauvage : le droit positif ne les prévoyait pas. En février 1981, le gouvernement de Raymond Barre a fait adopter une loi décriée par la gauche qui a « créé » les contrôles d’identité (art. 78-2 du code de procédure pénale). En réalité, cette loi consacre ces contrôles : elle « couvre », en quelque sorte, des pratiques dont nos recherches ont démontré qu’elles visent essentiellement la jeunesse postcoloniale. Ce geste, que la gauche n’a pas abrogé, est significatif d’une dynamique qui s’est enclenchée dans d’autres domaines de l’action policière : les pratiques et les perceptions policières ont été relayées par les politiques publiques.

      Quelles étaient ces politiques publiques ?

      A partir des années 1990, une décennie marquée par des émeutes urbaines localisées engendrées par des faits policiers mortels (ou la rumeur de tels faits), deux choix ont été très explicitement arrêtés. Le premier, c’est le renforcement de l’arsenal pénal contre les #mineurs auteurs de faits de #délinquance_de_voie_publique : les circulaires de politique pénale, puis la loi elle-même, encouragent la fermeté à l’égard de ces jeunes délinquants qui se recrutent essentiellement parmi les jeunes de cité, ce qui vient rétrospectivement légitimer l’action policière à leur égard. La politique pénale est telle qu’aujourd’hui le législateur offre aux policiers la possibilité de sanctionner eux-mêmes des délits par une amende dite « délictuelle » . Or, ces délits étant ceux habituellement commis par les jeunes de cité, ce pouvoir de sanction exorbitant confié par le législateur à la police consacre son ascendant sur cette fraction de la jeunesse.

      La seconde trajectoire de politique publique est l’abandon de ce que l’on appelait, il n’y a pas si longtemps encore, les politiques d’accompagnement social de la délinquance. Pour des raisons à la fois idéologiques et budgétaires, les gouvernements successifs ont concentré la dépense publique sur les forces de l’ordre (15 milliards d’euros et 8 500 agents supplémentaires sont prévus dans la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur du 24 janvier 2023) et ont privé les communes et les départements de fonds permettant une action sociale portée par les éducateurs spécialisés, les éducateurs de rue, les travailleurs sociaux. Même les emplois précaires – les emplois-jeunes puis les emplois aidés – ont été supprimés, les premiers sous le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, les seconds sous celui d’Edouard Philippe. J’insiste sur la dimension budgétaire de ces choix : en Allemagne, les communes et l’Etat disposent encore de moyens financiers pour l’action sociale.

      La France pourrait-elle s’inspirer des politiques mises en place en Allemagne ?

      L’Allemagne a perdu ses colonies il y a un siècle, elle n’a pas fait le choix de se défaire de son industrie, elle n’a pas renoncé au social au profit du sécuritaire. Et le caractère décentralisé et régional de la police, qui était une des conditions de la sortie du nazisme en 1945-1949, a fait que « la » police existe à peine en tant qu’institution et, surtout, en tant que groupe d’intérêts. Les syndicats policiers n’y sont pas engagés dans un défi permanent lancé aux politiques et aux magistrats, facteur considérable d’apaisement des passions policières et de discipline dans les rangs. Plus qu’un modèle dont on importerait telle ou telle recette, l’Allemagne offre plutôt un horizon dans lequel s’inscrit la question policière.
      Cette question ne pourra pas être dénouée seule : libérer la police française de sa colonialité ne passe pas par je ne sais quelle réforme isolée – type « revenir-à-la-police-de-proximité » – mais par l’investissement massif dans la formation, l’emploi et l’accompagnement social d’une jeunesse que les gouvernements successifs ont bien lâchement confiée aux soins presque exclusifs de la police.

      heureusement qu’il y a une gauche qui veut libérer la police ah ah ah

    • #Didier_Fassin : en France, « la #police a gagné la #bataille_idéologique » | Mediapart
      https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/070723/didier-fassin-en-france-la-police-gagne-la-bataille-ideologique

      #post_colonialisme

      DidierDidier Fassin est professeur au Collège de France, directeur d’études à l’#EHESS, et enseigne également à l’Institute for Advanced Study de #Princeton.

      Il a publié aux éditions du Seuil La Force de l’ordre. Une anthropologie de la police des quartiers, dans lequel il étudiait des brigades anticriminalité (BAC) dont les insignes exhibaient les barres d’une cité prise dans la lunette de visée d’un fusil, des meutes de loups devant des tours d’habitation, une panthère déchirant de ses griffes un quartier plongé dans l’obscurité ou encore une araignée emprisonnant dans sa toile un ensemble d’immeubles. Il y observait des pratiques relevant souvent d’une logique « #postcoloniale ».

      Pour Mediapart, il revient sur les situations avant – et les mobilisations après – la mort de #George_Floyd aux États-Unis en 2020 et celle de #Nahel M. en 2023.

      Mediapart : Dans La Force de l’ordre. Une anthropologie de la police des quartiers, écrit à partir d’une enquête inédite menée pendant 15 mois, entre 2005 et 2007, avec une BAC de la région parisienne, vous dressiez un constat catastrophique de l’action des BAC dans les banlieues, qui relevait davantage d’un processus de chasse dans une « jungle » que d’une opération de maintien de l’ordre ou de lutte contre la délinquance. On a pu vous dire alors que cette unité n’était pas représentative de la police française : ce qui se passe aujourd’hui vous ferait-il dire qu’elle était plutôt préfigurative de tendances racistes de la police française ? 

      Didier Fassin : Je ne généraliserais pas de la sorte pour ce qui est de tous les policiers. Lorsque mon livre est sorti, on a dit en effet que j’avais dû étudier des unités très atypiques, car j’indiquais la sympathie que les agents avec lesquels je patrouillais manifestaient ouvertement à l’égard de Jean-Marie Le Pen. Six ans plus tard, en 2017, on découvrait que les deux tiers des policiers en activité avaient voté pour sa fille au premier tour de l’élection présidentielle, soit plus de trois fois plus que la population générale.

      Mais plutôt que le racisme individuel, ce qui m’intéresse, et m’inquiète, c’est le racisme institutionnel, qu’il soit celui de la police en général, dont on voit qu’elle ne sanctionne pas les pratiques violentes et discriminatoires de ses agents, ou de certains syndicats en particulier, dont on vient de lire qu’ils considéraient les jeunes des quartiers difficiles comme des « nuisibles » qu’il faut mettre « hors d’état de nuire ».

      Dans cette perspective, je pense que les choses se sont encore aggravées depuis que j’ai conduit mon enquête, et c’est largement la responsabilité des gouvernements successifs qui, d’une part, n’ont pas cessé de céder devant les exigences de l’institution et des syndicats, et, d’autre part, n’ont jamais tenté d’engager de réforme.

    • Nayra : « Vous leur avez craché dessus et vous leur demandez de se calmer ? »
      Après la mort de Nahel, tué à bout portant par un policier à Nanterre le 27 juin 2023, une partie des quartiers populaires s’embrase. Dans le fracas, des adolescents disent une réalité ancienne de ségrégation et de racisme. #Mediapart donne la parole aux #rappeuses et aux #rappeurs qui se tiennent du côté de ces #révoltes. Épisode 1 : #Nayra, rappeuse de #Saint-Denis.

    • super interview aussi d’un spécialiste (anthropologue, U. Saint-denis) qui recence les émeutes (dans une liste quasi exhaustive) partout ds le monde depuis 2007.

      #au_poste par l’excellent @davduf

      https://www.auposte.fr/le-soulevement-des-quartiers-ce-quil-dit-et-ce-quon-ne-dit-pas

      pas encore écouté ceux-là par contre :

      https://www.auposte.fr/soulevement-2023-leloge-de-lemeute-avec-jacques-deschamps-philosophe

      https://www.auposte.fr/soulevement-2023-vers-une-secession-des-quartiers-populaires-rencontre-avec-

    • De la répression coloniale aux violences policières. @survie
      https://survie.org/billets-d-afrique/2021/303-dec-2020-janv-2021/article/de-la-repression-coloniale-aux-violences-policieres

      Au moment où la France est traversée par une série de révoltes à la suite du meurtre de Nahel par la police, et pour alimenter les reflexions sur la colonialité de la police française, nous republions cet article de Florian Bobin, étudiant-chercheur en Histoire africaine, paru en janvier 2021 dans Billets d’Afrique. Il a été publié préalablement en anglais dans Africa is A Country puis dans Jacobin , et en français dans la revue Contretemps. Il retrace l’histoire de la structuration de la #police_française, au service des intérêts esclavagistes, colonialistes puis néocolonialistes. Il montre la continuité de cette histoire avec la culture et les pratiques actuelles des forces de l’ordre en France, notamment vis-à-vis des jeunes Africains et Afro-descendants, mais aussi de celles de ses anciennes colonies africaines.

    • Didier Fassin : en France, « la police a gagné la bataille idéologique »

      Pour George Floyd, toute la société s’était mobilisée, il y avait eu des manifestations dans tout le pays. Ça a été un choc majeur. Pour Nahel, seuls les quartiers populaires ont bougé. Le lendemain, on ne parlait plus que de désordres urbains et, le surlendemain, de l’incendie de la maison d’un maire.

      https://justpaste.it/9hjxo

      #police #quartiers_populaires

  • « Méga-bassines » à Sainte-Soline : ce document qui pourrait remettre à plat le projet [Exclusif] | Le Télégramme
    https://www.letelegramme.fr/france/mega-bassines-a-sainte-soline-ce-document-qui-pourrait-remettre-a-plat-


    En mars dernier, une manifestation organisée par les opposants au projet de « méga-bassines » à Sainte-Soline avait fait plusieurs blessés lors d’affrontements avec les forces de l’ordre.
    Yohan Bonnet/AFP

    Autour du chantier contesté de « méga-bassines » à Sainte-Soline (79), une médiation regroupant agriculteurs et défenseurs de l’environnement a franchi une étape avec le vote d’une motion commune. Sans pour autant abandonner le principe de ces réserves d’eau, le document préconise une refonte totale du projet.

    C’est un « petit » document de deux pages seulement, mais dont la dimension est inversement proportionnelle au nombre de caractères couchés sur le papier. Car la motion votée mardi par le Comité de bassin Loire Bretagne à la quasi-unanimité (137 pour sur 138 votants à bulletins secrets), propose un début de sortie de crise à des acteurs radicalement opposés autour du projet de bassins de rétention d’eau, appelés plus communément « méga-bassines », dans la petite commune de Sainte-Soline, dans les Deux-Sèvres.

    suspens ! le reste est derrière le #paywall
    la barrière de péage du Télégramme s’étant notablement renforcée récemment

  • #Yassine_Bouzrou, #avocat : « Il n’y a pas de problème policier en France, il y a un problème judiciaire »
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/07/05/yassine-bouzrou-il-n-y-a-pas-de-probleme-policier-en-france-il-y-a-un-proble

    Pour moi, il n’y a pas de problème #policier en France, il y a un problème #judiciaire. Tant que la justice protégera d’une manière aussi flagrante les policiers, ils n’auront aucune raison de modifier leur comportement. La responsabilité est d’abord judiciaire. Si, demain, la justice décidait, comme elle le fait en matière de #violences_policières, de prononcer des non-lieux dans toutes les affaires de stupéfiants par exemple, on risquerait d’avoir une explosion du trafic de stupéfiants en France. Dans les faits, comme il y a une #impunité_judiciaire presque complète, il est logique que les actes de violences policières se multiplient. Or, il y a eu une #aggravation des violences policières illégitimes ces dernières années, avec l’impunité totale dans les dossiers de « #gilets_jaunes » éborgnés au #LBD [lanceur de balles de défense], avec l’augmentation du nombre de morts du fait de la loi de 2017 sur les refus d’obtempérer. La justice n’a jamais été aussi radicale dans l’#exonération des policiers.

    Pour moi, l’#IGPN, c’est un faux problème. Conduire des enquêtes pénales suppose de faire appel à des officiers de police judiciaire, eux seuls peuvent placer en garde à vue et conduire des investigations importantes. Remplacer l’IGPN signifiera qu’on changera de nom, c’est tout. Le problème, c’est que l’IGPN ne travaille pas pour les #avocats, mais pour les procureurs, et travaille surtout pour le ministère de l’intérieur. Comme l’IGPN a la double casquette, administrative et judiciaire, ils disent, dans leurs conclusions, s’il y a eu ou non une faute commise, donc ils portent un jugement. Ensuite, il est très facile pour un magistrat de se ranger derrière l’avis de l’IGPN, en expliquant qu’aucune faute n’a été commise, et donc de classer sans suite ou de rendre un non-lieu.

    • En quoi c’est un faux problème puisque dans pas mal de pays l’IGPN locale ne dépend pas du même ministère, c’est vraiment indépendant. C’est bien une énorme différence que juste le nom, de pas dépendre de la même hiérarchie du tout et d’avoir un organisme plus indépendant (dans la mesure du possible, ça reste le même gouvernement).

    • Des premières communications des parquets jusqu’à l’utilisation de l’#IGPN ou des expertises, tout est fait pour criminaliser nos clients et protéger les forces de l’ordre. Nous avons un mal fou à obtenir les dossiers des policiers. Cela serait pourtant important. Ont-ils déjà fait usage de leurs armes ? Ont-ils déjà été l’objet de plaintes ? D’enquêtes ? Dans l’affaire Traoré, il a fallu cinq ans pour obtenir, non pas les dossiers, mais une synthèse de l’#IGGN [inspection générale de la gendarmerie nationale] sur leur parcours. Dans l’affaire Zineb Redouane, nous n’avons rien. Dans un dossier de tir de LBD dans la tête d’une enfant à Chanteloup-les-Vignes (Yvelines), nous avons demandé que l’ADN soit prélevé sur le projectile – que la famille avait remis à la police. La justice a refusé. Puis elle a conclu à un classement sans suite pour défaut d’identification du tireur.

      Nous sommes aussi confrontés à des faux sur les procès-verbaux. Dans un dossier à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), par exemple, d’un homme tabassé par un policier, ce dernier avait rédigé un PV – complètement faux – sans savoir qu’il était filmé. Il avait été renvoyé devant le tribunal correctionnel et non devant la cour criminelle. Il a fallu se battre pour obtenir qu’il soit jugé pour faux en écriture. Les peines, lorsqu’il y a un procès, sont aussi, très souvent, trop légères. Même lorsqu’ils sont convaincus de la culpabilité des policiers, les magistrats ont tendance à requérir du sursis. Le slogan « Pas de justice, pas de paix » a du sens. Or, il n’y a aucune justice en matière de violences policières illégitimes.

      https://justpaste.it/bnl4t

      #Police #justice #impunité #immunité

    • ce qu’il dit, @rastapopoulos, c’est que si la justice ne sanctionne pas ces fonctionnaires (au moyen de peines diverses, y compris des interdictions d’exercer, des interdictions d’utilisation d’une arme) il n’y aura - sauf exception et a minima -pas de sanction dont l’institution policière elle-même serait à l’origine en cas d’excès de pouvoir, d’abus, de délit ou de crime à l’encontre des justiciables, que c’est à la justice de protéger les justiciables et de traiter les fonctionnaires de policiers comme des justiciables.

      il essaie de creuser une brèche dans et contre la justice comme institution policière, de tordre ce bras de la police. c’est du moins -peut-être est-ce « optimiste » -ce que je comprends.

    • @rastapopoulos
      il me semble que le discours s’entende, voire est même stratégique. L’idée, comme détaillée par @colporteur, est que tant que la justice ne punit pas les mauvais élève, il n’y a aucune raison que cela change, quand bien même les enquêtes seraient menées sérieusement ou que l’IGPN serait un organisme indépendant (les juges sont libres ensuite de suivre, ou non, ses recommandations).

      Il est peut-être d’autant plus stratégique de raisonner ainsi, que les magistrats pourraient être sensibles à ces critiques, issues de praticiens des cours de justice. En tant qu’avocat impliqué depuis plus de 15 ans sur ces cas de violences policières (avec notamment Arie Alimi), il estime en tout cas que c’est par cette brèche qu’il est plus probable de pouvoir avancer sur ces questions dans le cas français... je lui fait personnellement confiance et suis plutôt heureux de la médiatisation des arguments de la défense, qui est souvent relayée en second ordre.

    • Mort de Nahel : la troublante fiche de police qui relance la piste du mensonge
      https://www.leparisien.fr/faits-divers/mort-de-nahel-la-troublante-fiche-de-police-qui-relance-la-piste-du-menso

      Versée à l’enquête judiciaire, une fiche d’intervention mentionne que l’adolescent a foncé sur le policier auteur du tir mortel. Un comportement depuis remis en doute par la vidéo des faits. La famille de la victime y voit la preuve d’un mensonge policier.

      #Paywall... #faux_en_écriture_publique

    • Un comportement depuis remis en doute

      Même face à l’évidence, notre journaliste ne parvient pas à écrire « ...depuis remis en cause... ». Parce que la parole policière ne doit pas être remise en cause. Remise en doute, à la limite, mais encore faut-il qu’un juge se laisse convaincre, et alors, alléluia, on pourra passer à autre chose et faire comme si la vidéo n’avait jamais existé. Ou l’inverse. L’important étant de passer à autre chose, avec sursis.

    • la presse se fait fort de souligner que la défense Nahel avait pointé un « faux en écriture publique » de manière erronée puisque les premiers éléments policiers ne résultaient que d’échanges radios et de leur résumé (et non de PV). or voici que ce crime spécifique ressurgit mécaniquement. le travail de défense juridique des policiers impliqués avait commencé. il fallait étayer un scénario mensonger qui ne pouvait reposer sur les seules déclarations des concernés par une parole assermentée (qui prend valeur de preuve).
      pas de bol. la défense police s’est effondrée et doit se reconstruire.

      l’expression police criminelle désigne une caractéristique générale de l’institution.

  • Troisième nuit d’émeutes à Hem : Pôle Emploi ravagé par un incendie
    https://www.lavoixdunord.fr/1347006/article/2023-06-30/troisieme-nuit-d-emeutes-hem-pole-emploi-ravage-par-un-incendie

    La Maison de l’Emploi a été prise pour cible dans la nuit de jeudi à vendredi par des émeutiers. Le hall d’accueil a été saccagé et les locaux de #Pôle_Emploi ont été incendiés.

    La Maison de l’Emploi a été prise pour cible dans la nuit de jeudi à vendredi par des émeutiers. Le hall d’accueil a été saccagé et les locaux de Pôle Emploi ont été incendiés.

    « On est épuisés. » Cette cadre de l’administration municipale hémoise a les larmes aux yeux ce vendredi matin. Après une troisième nuit de violences, la fatigue est visible sur les visages. Et le constat est amer. Cette fois, c’est la #Maison_de-l’Emploi située au croisement de l’avenue Laenec et de la rue Henri-Dunant qui a été prise pour cible par les émeutiers.
    Dans la Maison de l’emploi, la vision est sinistre. L’accueil a été complètement saccagé mais, surtout, les locaux de Pôle Emploi ont été incendiés. La directrice de la structure est choquée. Elle pense à ses 30 salariés qui n’ont plus de lieu de travail [mais on droit au chômage technique] et aux 3 000 demandeurs d’emploi qui dépendent de l’agence hémoise. « On ne va pas pouvoir les accueillir avant un moment, déplore Karine Peixoto. On va les orienter vers le numérique et pour ceux qui ne peuvent pas, on va les orienter vers d’autres agences Pôle emploi. »

    A Dammarie-les-Lys (Seine-et-Marne), L’Espace Emploi, qui abrite l’association d’insertion ODE et le dispositif de création d’entreprises l’Atelier, a été pris pour cible vers trois heures du matin.

    #paywall... #émeutes #révoltes #incendie #il_suffit_de_traverser_la_rue

  • Sebastian Roché : « Les mauvaises pratiques policières sapent les fondements de la République » | Le monde | 02.07.23

    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/02/sebastian-roche-les-mauvaises-pratiques-policieres-sapent-les-fondements-de-

    Les mauvaises pratiques policières, violence en tête, sont toxiques pour la nation. Le régime démocratique ambitionne de réunir les différences sur la base de l’égalité afin d’assurer la cohésion sociale, mais celle-ci est corrodée par des comportements que la morale réprouve et que la loi interdit. Il est temps que la classe politique en prenne conscience et déchire le voile d’ignorance qu’elle préfère se mettre sur les yeux.

    Comme à Los Angeles en 1992, à Clichy en 2005, à Londres en 2011, le tir mortel sur Nahel à Nanterre provoque une indignation morale, et une colère qui déclenche des émeutes, déchirant la collectivité politique. Il est trop facile, et surtout erroné, de blâmer les comportements individuels des policiers. Les hommes politiques qui votent les lois, permettant aux policiers de tirer lorsqu’il n’y a pas de danger, sont à la source des émeutes destructrices. Blâmer les familles, les jeux vidéo, les médias sociaux et les quelques « pommes pourries » dans la police – qu’il convient de sévèrement punir – est la tactique des décideurs qui visent à s’exonérer de leurs responsabilités.

    Ce sont pourtant eux qui choisissent de donner plus d’armes aux agents (Flash-Ball, LBD, grenades, armes longues), de réduire leur formation pour, précipitamment, « mettre du bleu » dans la rue et d’élargir les conditions d’usages des armes. Quoi qu’il en coûte. Ce sont nos gouvernants qui, puisant leurs références à l’extrême droite, propagent des « concepts » comme décivilisation et ensauvagement auxquels font écho des syndicats de police qui parlent de « guerre » contre « les nuisibles », un vocabulaire colonial, comme dans le tract d’Alliance et de l’Unsa du 30 juin.

    • Perte de confiance dans les élus et la loi

      Un homicide policier « de trop » a mis le feu aux banlieues. Mais quel est le carburant qui a été enflammé ? Il est composé des émotions accumulées par les adolescents, lors de ces contacts ordinaires avec des policiers, faits de peur et d’humiliation. La jeunesse y est particulièrement sensible, plus que tout autre segment de la population. Ces expériences engendrent non seulement un rejet de la police, mais aussi une perte de confiance dans les élus et la loi, et un effondrement de la croyance dans la valeur des processus démocratiques. Ceci explique que les appels au calme ou la décision de mettre le policier en examen pour homicide volontaire n’a guère d’effet d’apaisement.

      La discrimination et la brutalité sont régulières, lors des contrôles d’identité. Nous disposons maintenant de plus d’une dizaine d’enquêtes de politistes, démographes ou du défenseur des droits qui prouvent l’existence de contrôles au faciès de Paris à Marseille en passant par Lyon. La discrimination est un délit, quand bien même un policier en est l’auteur.

      « il vous reste la moitié de l’article derrière le #paywall »

  • Mort de #Nahel : « J’avais peur qu’on me tire dessus », le passager qui a pris la fuite sort du silence

    Fouad (le prénom a été changé), 17 ans, était le passager avant de la Mercedes jaune que conduisait Nahel avant d’être tué par un tir policier, mardi, à Nanterre. Après le drame, il s’est enfui, « paniqué », avant d’aller passer quelques jours chez son père, à Marseille. Il affirme qu’il se présentera lundi au commissariat, pour livrer sa version des faits.

    (#paywall)

    https://www.leparisien.fr/faits-divers/mort-de-nahel-javais-peur-quon-me-tire-dessus-le-passager-qui-a-pris-la-f

    Dans Aujourd’hui en France :

    Depuis mardi, jour où il a vu son copain d’enfance Nahel se faire abattre devant ses yeux par un policier à Nanterre (Hauts-de-Seine), Fouad*, 17 ans, se terre. « Il n’arrête pas de faire des cauchemars », déglutit la mère de l’adolescent, Salma*. « Il ne peut pas s’empêcher de mettre en boucle les images de la mort de Nahel. Il passe son temps à pleurer », s’alarme-t-elle. Son fils, rappelle-t-elle, « est avant tout une victime ». « Voir son ami mourir devant soi, c’est dramatique. Sans compter qu’il aurait pu lui aussi être blessé par balle. Il va falloir qu’il vive avec ça. »

    Dans la Mercedes jaune, Fouad était au moment des faits le passager avant. Pris en chasse par les deux motards de la #Direction_de_l'ordre_public_et_de_la_circulation (#DOPC), alors qu’ils circulaient à vive allure le long d’une voie de bus, à Nanterre, les adolescents se retrouvent bloqués dans un embouteillage.

    Selon le récit de Fouad, les motards mettent alors pied à terre. « Ils sont arrivés en courant. Ils nous ont dit de baisser la fenêtre. Nahel a baissé la fenêtre », affirme l’adolescent. Les deux motards se placent sur le côté gauche de la voiture, l’un à hauteur de la portière du conducteur, et l’autre au niveau de l’aile avant.

    « Je vais te mettre une balle dans la tête ! »

    « Le motard qui était près de la fenêtre a dit : Éteins le moteur ! Et il a mis un #coup_de_crosse à Nahel, gratuitement. Le deuxième motard s’est penché par la fenêtre, et il lui a mis un coup de crosse, lui aussi. » Selon Fouad, Nahel était alors « un peu sonné » et « paniqué ». « Il ne savait pas quoi faire. Il avait la tête qui tournait, il était vraiment traumatisé », glisse-t-il.

    Selon Fouad, les policiers auraient alors « commencé à braquer Nahel ». Le policier placé près de la vitre conducteur aurait dit : « Éteins le moteur ou je te shoote ! » Le binôme du motard, placé à l’avant du véhicule, aurait renchéri, en disant : « Un truc comme : Je vais te mettre une balle dans la tête ! »

    Toujours d’après le récit de Fouad, le jeune conducteur a « essayé de se protéger, pour ne pas se manger un autre #coup ». « Et comme il était un peu sonné, son pied s’est enlevé de la pédale de frein. Comme c’est une #voiture_automatique, elle a avancé toute seule. Le policier situé près de la fenêtre a dit à son collègue : Shoote-le ! C’est là que le motard qui était à l’avant a tiré », retrace le jeune homme.

    « J’avais #peur qu’on me tire dessus »

    Fouad raconte avoir vu son copain « agoniser ». « Le pied de Nahel s’est bloqué sur l’accélérateur. Il a réussi à être là encore pendant trois secondes, et, d’un coup, il s’est mis à trembler. Il ne me répondait pas. »

    Quand la voiture s’est encastrée dans du mobilier urbain, place Nelson-Mandela, Fouad, paniqué, a pris la fuite en courant : « J’avais peur. Peur qu’on me tire dessus. » Une fois rentré chez lui, Fouad se lance dans une logorrhée incompréhensible, se remémore sa maman. « Il était complètement affolé. Il ne faut pas oublier qu’il n’a que 17 ans. » La mère de Fouad confie avoir elle aussi « paniqué ». « J’ai voulu aller à la police, mais avec le travail et mes cinq enfants à gérer toute seule, c’était compliqué. »

    Salma a fini par envoyer son fils aîné chez son père à Marseille (Bouches-du-Rhône), et ses quatre autres enfants chez son ex-belle-soeur, à la campagne. Elle a pris attache avec un avocat, M e Thomas Maïer, qui va se constituer partie civile. Fouad est rentré jeudi chez sa mère, pour assister aux funérailles de son ami, samedi. « Nous nous présenterons lundi au commissariat », promet la mère de famille.

    Contacté, M e Thomas Maïer n’a pas souhaité faire de commentaire.

    #témoignage #passager

  • Mort de #Nahel : « Ils sont rattrapés par le réel »

    #Ali_Rabeh, maire de #Trappes, et #Amal_Bentounsi, fondatrice du collectif Urgence, notre police assassine, reviennent dans « À l’air libre » sur la mort de Nahel, 17 ans, tué par un policier à Nanterre, et les révoltes qui ont suivi dans de nombreuses villes de France.

    https://www.youtube.com/watch?v=euw03owAwU8&embeds_widget_referrer=https%3A%2F%2Fwww.mediapart.fr%2

    https://www.mediapart.fr/journal/france/290623/mort-de-nahel-ils-sont-rattrapes-par-le-reel
    #violences_policières #banlieues #quartiers_populaires #naïveté

    • « #Emmanuel_Macron ne comprend rien aux banlieues »

      Ali Rabeh, maire de Trappes (Yvelines), a participé à l’Élysée à la rencontre entre le chef de l’État et quelque 200 maires, le 4 juillet, pour évoquer la révolte des quartiers populaires. Il dénonce sans langue de bois l’incapacité du Président à comprendre ce qui se joue dans les banlieues et son manque de perspectives pour l’avenir.

      Vous avez été reçu mardi 4 juillet à l’Élysée par le président de la République avec des dizaines d’autres maires. Comment ça s’est passé ?

      Ali Rabeh : Le Président a fait une introduction très courte pour mettre en scène sa volonté de nous écouter, de nous câliner à court terme, en nous disant à quel point on était formidable. Puis ça a viré à la #thérapie_de_groupe. On se serait cru aux #alcooliques_anonymes. Tout le monde était là à demander son petit bout de subvention, à se plaindre de la suppression de la taxe d’habitation, de la taille des LBD pour la police municipale ou de l’absence du droit de fouiller les coffres de voiture… Chacun a vidé son sac mais, à part ça et nous proposer l’accélération de la prise en charge par les #assurances, c’est le néant. La question primordiale pour moi n’est pas de savoir si on va pouvoir réinstaller des caméras de surveillances en urgence, ou comment réparer quelques mètres de voiries ou des bâtiments incendiés. Si c’est cela, on prend rendez-vous avec le cabinet du ministre de la Ville ou celui des Collectivités territoriales. Mais ce n’est pas du niveau présidentiel.

      Quand on parle avec le président de la nation, c’est pour cerner les #causes_structurelles du problème et fixer un cap afin d’éviter que ça ne se reproduise. Et là-dessus on n’a eu #aucune_réponse, ni #aucune_méthode. Il nous a dit qu’il avait besoin d’y réfléchir cet été. En fait, Emmanuel Macron voulait réunir une assemblée déstructurée, sans discours commun. Il a préféré ça au front commun de l’association #Ville_&_Banlieue réunissant des maires de gauche et de droite qui structurent ensemble un discours et des #revendications. Mais le Président refuse de travailler avec ces maires unis. Il préfère 200 maires en mode grand débat qui va dans tous les sens, parce que ça lui donne le beau rôle. En réalité, on affaire à des #amateurs qui improvisent. Globalement ce n’était pas à la hauteur.

      Le Président n’a donc rien évoqué, par exemple, de l’#appel_de_Grigny ou des nombreuses #propositions déjà faites par le passé sur les problématiques liées aux #banlieues et qui ne datent quand même pas d’hier ?

      Non. Il a fait du « Macron » : il a repris quelques éléments de ce qu’on racontait et il en fait un discours général. Il avait besoin d‘afficher qu’il avait les maires autour de lui, il nous a réunis en urgence pendant que les cendres sont brûlantes, ce qu’il a refusé de faire avant que ça n’explose. Et ce, malgré nos supplications. Pendant des mois, l’association Ville & Banlieue a harcelé le cabinet de Mme Borne pour que soit convoqué un Conseil interministériel des villes conformément à ce qu’avait promis le Président. Cela ne s’est jamais fait. Macron n’a pas tenu sa parole. On a eu du #mépris, de l’#arrogance et de l’#ignorance. Il n’a pas écouté les nombreuses #alertes des maires de banlieue parce qu’il pensait que nous étions des cassandres, des pleureuses qui réclament de l’argent. C’est sa vision des territoires. Elle rappelle celle qu’il a des chômeurs vus comme des gens qui ne veulent pas travailler alors qu’il suffirait de traverser la route. Emmanuel Macron n’a donc pas vu venir l’explosion. Fondamentalement, il ne comprend rien aux banlieues. Il ne comprend rien à ce qu’il s’est passé ces derniers jours.

      A-t-il au moins évoqué le #plan_Borloo qu’il a balayé d’un revers de main en 2018 ?

      Je m’attendais justement à ce qu’il annonce quelque chose de cet acabit. Il ne l’a pas fait. Il a fait un petit mea-culpa en disant qu’à l’époque du rapport Borloo, sur la forme il n’avait pas été adroit mais il affirme que la plupart des mesures sont mises en œuvre. Il prétend, tout content de lui, qu’il y a plus de milliards aujourd’hui qu’hier et que le plan Borloo est appliqué sans le dire. C’était #grotesque. J’aurais aimé qu’il nous annonce une reprise de la #méthode_Borloo : on fait travailler ensemble les centaines de maires et d’associatifs. On se donne six mois pour construire des propositions actualisées par rapport au rapport Borloo et s’imposer une méthode. Lui a dit : « J’ai besoin de l’été pour réfléchir. » Mais quelle est notre place là-dedans ?

      Dans ses prises de paroles publiques, le Président a fustigé la #responsabilité des #parents qui seraient incapables de tenir leurs enfants. Qu’en pensez-vous ?

      Qu’il faut commencer par faire respecter les mesures éducatives prescrites par les tribunaux. Pour ces mamans qui n’arrivent pas à gérer leurs enfants dont certains déconnent, les magistrats imposent des éducateurs spécialisés chargés de les accompagner dans leur #fonction_parentale. Or, ces mesures ne sont pas appliquées faute de moyens. C’est facile après de les accabler et de vouloir les taper au porte-monnaie mais commençons par mettre les moyens pour soutenir et accompagner les #familles_monoparentales en difficulté.

      Le deuxième élément avancé ce sont les #réseaux_sociaux

      C’est du niveau café du commerce. C’est ce qu’on entend au comptoir : « Faut que les parents s’occupent de leur môme, faut les taper aux allocs. Le problème ce sont les réseaux sociaux ou les jeux vidéo… » Quand on connaît la réalité c’est un peu court comme réponse. On peut choisir d’aller à la simplicité ou on peut se poser la question fondamentale des #ghettos de pauvres et de riches. Pour moi l’enjeu c’est la #mixité_sociale : comment les quartiers « politique de la ville » restent des quartiers « #politique_de_la_ville » trente ans après. Or personne ne veut vraiment l’aborder car c’est la montagne à gravir.

      Vous avez abordé cette question lors de votre intervention à l’Élysée. Comment le Président a-t-il réagi ?

      Il a semblé réceptif quand j’ai évoqué les ghettos de riches et les #maires_délinquants qui, depuis vingt-deux ans, ne respectent pas la #loi_SRU. Il a improvisé une réponse en évoquant le fait que dans le cadre des J.O, l’État prenait la main sur les permis de construire en décrétant des opérations d’intérêt national, un moyen de déroger au droit classique de l’#urbanisme. Il s’est demandé pourquoi ne pas l’envisager pour les #logements_sociaux. S’il le fait, j’applaudis des deux mains. Ça serait courageux. Mais je pense qu’il a complètement improvisé cette réponse.

      En ce moment, on assiste à une #répression_judiciaire extrêmement ferme : de nombreux jeunes sans casier judiciaire sont condamnés à des peines de prison ferme. Est-ce de nature à calmer les choses, à envoyer un message fort ?

      Non. On l’a toujours fait. À chaque émeute, on a utilisé la matraque. Pareil pour les gilets jaunes. Pensez-vous que la #colère est moins forte et que cela nous prémunit pour demain ? Pas du tout. Que les peines soient sévères pour des gens qui ont mis le feu pourquoi pas, mais ça ne retiendra le bras d’aucun émeutier dans les années qui viennent.

      Vous avez été dans les rues de Trappes pour calmer les jeunes. Qu’est-ce qui vous a marqué ?

      La rupture avec les institutions est vertigineuse. Elle va au-delà de ce que j’imaginais. J’ai vu dans les yeux des jeunes une véritable #haine de la police qui m’a glacé le sang. Certains étaient déterminés à en découdre. Un jeune homme de 16 ans m’a dit « Ce soir on va régler les comptes », comme s’il attendait ce moment depuis longtemps. Il m’a raconté des séances d’#humiliation et de #violence qu’il dit avoir subies il y a quelques mois de la part d’un équipage de police à #Trappes. Beaucoup m’ont dit : « Ça aurait pu être nous à la place de Nahel : on connaît des policiers qui auraient pu nous faire ça. » J’ai tenté de leur dire qu’il fallait laisser la justice faire son travail. Leur réponse a été sans appel : « Jamais ça ne marchera ! Il va ressortir libre comme tous ceux qui nous ont mis la misère. » Ils disent la même chose de l’#impunité des politiques comme Nicolas Sarkozy qui, pour eux, n’ira jamais en prison malgré ses nombreuses condamnations. Qui peut leur donner tort ?

      Il se développe aussi un discours politique extrêmement virulent sur le lien de ces #violences_urbaines avec les origines supposément immigrées des jeunes émeutiers. Qu’en pensez-vous ?

      Quand Robert Ménard a frontalement dit, dans cette réunion des maires, que le problème provenait de l’#immigration, le président de la République n’a pas tiqué. Une partie de la salle, principalement des maires LR, a même applaudi des deux mains. Il y a un #glissement_identitaire très inquiétant. Culturellement, l’extrême droite a contaminé la droite qui se lâche désormais sur ces sujets. Ces situations demandent de raisonner pour aller chercher les causes réelles et profondes du malaise comme l’absence d’#équité, la concentration d’#inégalités, d’#injustices, de #frustrations et d’#échecs. C’est beaucoup plus simple de s’intéresser à la pigmentation de la peau ou d’expliquer que ce sont des musulmans ou des Africains violents par nature ou mal élevés.

      Comment ces discours sont-ils perçus par les habitants de Trappes ?

      Comme la confirmation de ce qu’ils pensent déjà : la société française les déteste. Dans les médias, matin, midi et soir, ils subissent continuellement des #discours_haineux et stigmatisant de gens comme Éric Zemmour, Marine le Pen, Éric Ciotti, etc. qui insultent leurs parents et eux-mêmes au regard de leur couleur de peau, leur religion ou leur statut de jeune de banlieue. Ils ont le sentiment d’être les #rebuts_de_la_nation. Quotidiennement, ils ont aussi affaire à une #police qui malheureusement contient en son sein des éléments racistes qui l’expriment sur la voie publique dans l’exercice de leur métier. Ça infuse. Les jeunes ne sont pas surpris de l’interprétation qui est faite des émeutes. En réalité ils l’écoutent très peu, parce qu’ils ont l’habitude d’être insultés.

      D’après vous, que faut-il faire dans l’#urgence ?

      Il faut arrêter de réfléchir dans l’urgence. Il faut s’engager sur une politique qui change les choses sur dix à quinze ans. C’est possible. On peut desserrer l’étau qui pèse sur les quartiers en construisant des logements sociaux dans les villes qui en ont moins. Moi, je ne demande pas plus de subventions. Je veux que dans quinze à vingt ans, on me retire les subventions « politique de la ville » parce que je n’en aurai plus besoin. C’est l’ambition qu’on doit porter.

      Et sur le court terme ?

      Il faut envoyer des signaux. Revenir sur la loi 2017 car cela protégera les policiers qui arrêteront de faire usage de leurs armes à tort et à travers, s’exposant ainsi à des plaintes pour homicide volontaire, et cela protégera les jeunes qui n’auront plus peur de se faire tirer comme des lapins. Il faut aussi engager un grand #dialogue entre la police et les jeunes. On l’a amorcé à Trappes avec le commissaire et ça produit des résultats. Le commissaire a fait l’effort de venir écouter des jeunes hermétiquement hostiles à la police, tout en rappelant le cadre et la règle, la logique des forces de l’ordre. C’était très riche. Quelques semaines plus tard le commissaire m’a dit que ses équipes avaient réussi une intervention dans le quartier parce que ces jeunes ont calmé le jeu en disant « on le connaît, il nous respecte ». Il faut lancer un #cercle_vertueux de #dialogue_police-population, et #jeunesse en particulier, dans les mois qui viennent. La police doit reprendre l’habitude de parler avec sa population et être acceptée par elle. Mettons la police autour de la table avec les jeunes, les parents du quartier, des éducateurs, les élus locaux pour parler paisiblement du ressenti des uns et des autres. Il peut y avoir des signaux constructifs de cet ordre-là. Or là on est dans la culpabilisation des parents. Ça ne va pas dans le bon sens.

      https://www.politis.fr/articles/2023/07/emmanuel-macron-ne-comprend-rien-aux-banlieues
      #Macron #ignorance

    • Entre Emmanuel Macron et les banlieues, le #rendez-vous_manqué

      En 2017, le volontarisme du chef de l’Etat avait fait naître des #espoirs dans les #quartiers_populaires. Malgré la relance de la #rénovation_urbaine, le rejet du plan Borloo comme son discours sur le #séparatisme l’ont peu à peu coupé des habitants.

      Il n’y a « pas de solution miracle ». Surtout pas « avec plus d’argent », a prévenu le chef de l’Etat devant quelque 250 maires réunis à l’Elysée, mardi 4 juillet, sur l’air du « trop, c’est trop » : « La santé est gratuite, l’école est gratuite, et on a parfois le sentiment que ce n’est jamais assez. » Dans la crise des violences urbaines qui a meurtri 500 villes, après la mort du jeune Nahel M. tué par un policier, le président de la République a durci le ton, allant jusqu’à rappeler à l’ordre des parents. Une méthode résumée hâtivement la veille par le préfet de l’Hérault, Hugues Moutouh, sur France Bleu : « C’est deux claques, et au lit ! »

      L’urgence politique, dit-on dans le camp présidentiel, est de rassurer une opinion publique encore sous le choc des destructions et des pillages. « Une écrasante majorité de Français se raidit, avec une demande d’autorité forte, confirme Brice Teinturier, directeur général délégué d’Ipsos. Déjà sous Sarkozy, l’idée dominait qu’on en faisait trop pour les banlieues. Les dégradations réactivent cette opinion. Emmanuel Macron est sur une crête difficile à tenir. »

      Ce raidissement intervient sur fond de #fracture territoriale et politique. « L’opposition entre la France des quartiers et celle des campagnes nous revient en pleine figure. Si on met encore de l’argent, on accentuera la fracture », pense Saïd Ahamada, ex-député de la majorité à Marseille. « Les gens en ont ras le bol, ils ne peuvent plus entendre que ces quartiers sont abandonnés », abonde Arnaud Robinet, maire de Reims, qui abrite sept #quartiers_prioritaires_de_la_politique_de_la_ville (#QPV), et membre du parti d’Edouard Philippe.

      (#paywall)

      https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/07/06/entre-emmanuel-macron-et-les-banlieues-le-rendez-vous-manque_6180759_823448.

  • Pourquoi les #services_publics sont pris pour #cible

    Médiathèques, écoles ou centres sociaux ont été pris pour cibles dans la nuit du 28 au 29 juin dans différentes villes de France. À l’éternelle question de savoir pourquoi, les sciences sociales apportent des réponses de plus en plus précises depuis les émeutes de 2005.

    À chaque affrontement entre forces de l’ordre et jeunes des #quartiers_populaires, après chaque nuit de #soulèvement_urbain, une question revient parmi les observateurs mais aussi les habitant·es : pourquoi s’en prendre aux #équipements_publics qui offrent encore quelques #services sur des territoires le plus souvent déshérités en la matière ?

    Derrière cette interrogation se loge aussi une question plus souterraine : qu’y a-t-il dans la tête des #jeunes qui affrontent la police, mettent le feu ou défoncent des vitrines ? Les sciences sociales ont largement travaillé la question, particulièrement depuis les émeutes de 2005, et montrent qu’il est impossible de voir dans ces gestes le simple #nihilisme, voire le #banditisme auxquels certaines voix voudraient les réduire.

    Une réponse préliminaire à la question oblige à commencer par passer au tamis ce que signifient « #services » ou « #équipements » publics dans un contexte de #révoltes et de #tensions_urbaines. S’en prendre à un commissariat au lendemain du meurtre d’un adolescent par un policier, ou même à une mairie qui a autorité sur une partie des forces de l’ordre, n’a pas nécessairement la même signification que s’en prendre à une école, un CCAS (centre communal d’action sociale), une salle des fêtes ou une bibliothèque...

    Un second préliminaire contraint aussi de rester prudent, au-delà même de la nature des institutions visées, sur ce qu’elles peuvent représenter, et dont la signification peut rester opaque ou confuse. Un des jeunes ayant participé aux ateliers d’écriture organisés par l’écrivain et éducateur Joseph Ponthus dans une cité de Nanterre affirmait ainsi, à propos des émeutes de 2005 : « On a commencé par discuter de ce qu’il fallait pas brûler. Pas les voitures des gens, pas l’école, pas le centre commercial. On voulait s’attaquer à l’État. » De manière symptomatique, alors même que la volonté de s’en prendre à l’État est affirmée, l’école, pourtant l’institution publique qui maille l’ensemble du territoire, est mise de côté…

    Cela dit, et bien qu’il soit encore trop tôt pour mesurer l’ampleur du soulèvement actuel et répertorier ou cartographier précisément ce à quoi il s’attaque, il semble bien que les #équipements_publics soient particulièrement visés.

    Le seul ministère de l’éducation nationale a ainsi dénombré jeudi « une cinquantaine de structures scolaires impactées à des degrés divers » par les incidents survenus après la mort de #Nahel, aboutissant à la fermeture d’une « dizaine » d’entre elles, principalement dans les académies de Versailles, de Créteil et de Lille.

    Pour le sociologue Sebastian Roché, il y aurait même une distinction à faire à ce sujet entre aujourd’hui et l’automne 2005. Interrogé sur France Info jeudi 29 juin, il jugeait en effet que la révolte actuelle « était beaucoup plus tournée vers les #institutions_publiques », tandis que les émeutes de 2005 auraient en priorité visé « beaucoup plus les voitures », même si des attaques contre des institutions publiques – gymnases, crèches, bibliothèques – s’étaient alors produites.

    Le #livre sans doute le plus précis sur le sujet a été publié aux éditions Presses de l’Enssib en 2013 par le sociologue Denis Merklen et s’intitule Pourquoi brûle-t-on des bibliothèques ? (lire l’entretien que Mediapart avait conduit avec lui sur le sujet à l’occasion du dixième anniversaire des émeutes de 2005 : https://www.mediapart.fr/journal/france/021115/pourquoi-les-emeutiers-s-attaquent-aux-equipements-publics). Le chercheur y montrait qu’environ 70 bibliothèques avaient été incendiées en France entre 1996 et 2013, et que 2005 ne constituait pas une scène inédite ou inaugurale.

    Toutefois, soulignait #Denis_Merklen à propos de ces attaques commises envers les institutions publiques, « leur interprétation a changé après les émeutes qui ont eu lieu en France cette année-là, sûrement comme conséquence de l’ampleur de la mobilisation. Auparavant, elles étaient perçues comme des actes irrationnels, nihilistes, on parlait alors de “#violences_urbaines” et pas encore d’émeutes. Pourquoi s’attaquer à une école maternelle ou à un gymnase ? Pourquoi les bénéficiaires détruisaient-ils ce qui leur était destiné ? Ce n’était pas compréhensible. La plupart des lectures en faisaient la manifestation d’un déficit, voire d’une absence de #socialisation_politique. »

    Cette interprétation « nihiliste » demeure active dans certains secteurs de la société et du champ politique. Elle est propre à une manière de regarder les #marges de la ville-centre comme une zone peuplée de populations « ensauvagées », incapables de respecter le #bien_commun ou même de distinguer leur propre intérêt.

    Le sociologue et anthropologue #Jérôme_Beauchez, professeur à l’université de Strasbourg, a tout récemment retracé l’histoire longue de ce regard négatif dans un livre intitulé Les Sauvages de la civilisation. Regards sur la Zone, d’hier à aujourd’hui, publié par les éditions Amsterdam l’an dernier.

    Toutefois, même lorsque n’est pas entonné le refrain de la nécessaire remise en ordre d’un monde prétendument décivilisé à coups de renforts policiers, de couvre-feux ou d’états d’urgence, la dimension politique des attaques contre les institutions politiques demeure encore parfois déniée. Lorsque les institutions publiques visées sont des écoles ou des centres d’action sociale, mais aussi quand ceux qui les visent n’appartiennent pas à des organisations référencées et sont en outre le plus souvent cagoulés et racisés.

    À l’inverse, lorsque le mouvement poujadiste s’en était pris à des centres des impôts, lorsque des militants de la FNSEA ont attaqué manu militari des préfectures ou lorsque des marins-pêcheurs ont incendié le Parlement régional de Bretagne en février 1994, la dimension politique du geste a été immédiatement lue comme telle. Ce n’est donc pas la violence en elle-même qui distinguerait le bon grain politique de l’ivraie et de l’ivresse émeutières.

    Pour Denis Merklen, le ciblage des institutions publiques lors d’épisodes de #soulèvements_urbains est bien de nature politique, et même en quelque sorte au carré. « Aujourd’hui, affirme-t-il, les chercheurs en sciences sociales – sociologues, politistes, anthropologues – sont d’accord pour y voir au contraire un geste éminemment politique. Pourquoi cela ? Parce que les personnes vivant dans les quartiers populaires, plus que les autres, sont en contact permanent avec des institutions publiques pour résoudre les problèmes de leur vie quotidienne. S’en prendre à elles est une manière de signifier ce face-à-face. Ce n’est pas un déficit de #politisation, mais un changement dans la #politicité_populaire – c’est-à-dire de la manière de faire de la politique par les catégories populaires – par la #territorialisation des #conflits_sociaux. »

    Pour le sociologue, les émeutiers manifestent ainsi « le conflit dans lequel ils sont pris quotidiennement. Aux guichets des administrations, lieu principal des interactions, les #exclusions et les difficultés d’accès prennent la forme d’un #mépris fortement ressenti ».

    L’anthropologue #Alain_Bertho, professeur émérite à l’université Paris VIII, a consacré une grande partie de son travail aux #émeutes_urbaines, en France et à l’étranger, pour comprendre la mondialisation de ce vocabulaire de la protestation et en repérer les formes nationales ou locales. Il en a tiré deux ouvrages, Le Temps des émeutes, publié chez Bayard en 2009, puis Les Enfants du chaos, paru à La Découverte en 2016.

    Dans ces deux ouvrages, le chercheur insiste, lui aussi, pour prendre en compte la dimension politique des émeutes, précisément quand celle-ci est parfois occultée par le fait que ces soulèvements n’empruntent pas les voies de la politique institutionnelle, ni celles de la geste révolutionnaire qui vise les lieux incarnant le pouvoir en majesté, et non un gymnase ou l’antenne d’un centre de sécurité sociale.

    Il y a eu un débat en 2005, nous expliquait Alain Bertho au moment du soulèvement des « gilets jaunes », « sur la question de savoir si ces émeutes étaient un mouvement politique, proto-politique ou apolitique. La réponse que m’ont donnée ceux qui avaient alors brûlé des voitures est restée gravée dans ma tête : “Non, ce n’est pas politique, mais on voulait dire quelque chose à l’État.” Comment dire de façon plus claire que la politique partisane et parlementaire, à leurs yeux, ne servait à rien pour dire quelque chose à l’État ? ».

    Dans ce même entretien, Alain Bertho insistait également sur la nécessité d’être « attentif au répertoire d’action qu’est le langage de l’émeute », faisant une distinction notamment entre les émeutes avec et sans #pillage.

    Dans ce répertoire d’action en réalité pluriel de l’émeute, parfois masqué par les images répétitives des fumées et des affrontements, les attaques visant des équipements publics tiennent une place spécifique et paradoxale.

    Cependant, le #paradoxe n’est sans doute pas seulement celui qui se formule d’ores et déjà à large échelle, dans des micro-trottoirs se demandant pourquoi certains jeunes attaquent des institutions censées les et leur servir, ou même dans la bouche de chercheurs, à l’instar de #Sebastian_Roché jugeant, toujours sur France Info, qu’on assiste en ce moment à un « #désespoir que les populations retournent contre elles-mêmes ».

    Il réside aussi dans ce que souligne Denis Merklen, à savoir que, pour les personnes vivant dans les quartiers populaires, « les #services_publics sont leur seul recours pour leurs besoins les plus élémentaires, liés à l’éducation, à la santé, au transport, au logement, à l’énergie et à la culture. Quasiment tous les aspects de leur vie quotidienne sont entre les mains d’institutions publiques. C’est une situation paradoxale, car cela tient aussi à la solidité et à la pénétration de notre État social qui assure tant bien que mal des filets solides de protection ».

    Ces filets de protection sont certes moins nombreux et solides aujourd’hui qu’il y a dix ans, en raison du délitement des services publics, mais il n’en reste pas moins qu’une spécificité des soulèvements urbains en France, par rapport à d’autres pays, est de viser les institutions publiques, en partie parce qu’il existe – ou existait – encore un #espoir en leur effectivité et efficacité.

    C’est en tout cas ce qui ressortait de l’ouvrage codirigé par les sociologues #Hugues_Lagrange et #Marco_Oberti l’année suivant les émeutes de 2005, intitulé Émeutes urbaines et protestations et publié aux Presses de Sciences Po. Le livre collectif proposait notamment une comparaison entre les situations italienne et britannique en rappelant que la société française se « caractérise par un État centralisé, de puissants services publics, une référence forte à la laïcité, une immigration ancienne liée à une histoire coloniale et à une décolonisation douloureuses ».

    Pour les directeurs de cet ouvrage, la comparaison internationale des protestations urbaines conduisait à un « étrange paradoxe. La plus grande efficacité de la société française à lutter contre les inégalités sociales et à assurer une meilleure protection sociale produit simultanément un fort sentiment d’#exclusion, surtout dans les quartiers populaires et immigrés les plus ségrégués ».

    D’autant qu’à lire Hugues Lagrange et Marco Oberti, les Français, contrairement aux Britanniques, étaient « équipés de lunettes construites pour ne pas voir cette #ségrégation_ethnique ». Une situation largement liée à une pensée de la République et une #organisation_territoriale de ses services publics qui, à force de vouloir être « #colour_blind », s’avèrent aveugles aux #discriminations_ethnoraciales que leurs propres institutions publiques peuvent pourtant reproduire.

    C’est évidemment le cas avec cette institution particulière qu’est la #police, comme l’avait déjà montré le sociologue #Didier_Fassin dans son ouvrage La Force de l’ordre, qui explorait le #racisme présent à l’intérieur de certaines unités de la #BAC en particulier et l’éloignement croissant entre les #forces_de_l’ordre et les habitant·es des quartiers populaires de façon plus générale.


    Mais c’est aussi vrai d’institutions qui ont, au contraire, tenté de réduire la distance entre les institutions et les populations auxquelles elles s’adressent. Concernant le cas particulier des #bibliothèques, Denis Merklen notait ainsi qu’elles « ont fait un immense travail de réflexion autocritique. Elles ont renouvelé leurs approches ; elles se sont ouvertes ».

    Mais, poursuivait-il, elles ne peuvent, pas plus qu’aucun service public pris isolément, « résoudre les problèmes économiques et sociaux qui se posent dans ces quartiers », en raison « de la situation catastrophique du marché du travail » qui fait que « beaucoup d’habitants ne peuvent plus compter sur leur salaire » et n’ont plus que les services publics – et non plus les employeurs - comme interlocuteurs de leur situation sociale. Ce qui peut amener à détruire une salle des fêtes plutôt que séquestrer un patron…

    https://www.mediapart.fr/journal/culture-et-idees/290623/pourquoi-les-services-publics-sont-pris-pour-cible
    #quartiers_populaires #France #émeutes #sciences_sociales #SHS #ressources_pédagogiques #banlieues #violence
    ping @cede

    • « Pourquoi ont-ils brûlé les écoles ? »

      Pourquoi s’attaquer à l’école, laquelle est le plus grand symbole de l’égalité, un sanctuaire du savoir
      Et, c’est gratuit ! Ils se pénalisent eux-mêmes !
      Comme ils sont bêtes et barbares dans les quartiers !

      Si c’était plus compliqué  ?

      L’école est sans doute la première institution marquant les jeunesses populaires (des banlieues) en appliquant une domination, une ségrégation, une violence.
      Sûrement même avant celle de la police.
      Derrière un idéal et des valeurs théoriques, on ne peut nier l’effet de l’école.

      Quand l’école transforme l’inégalité sociale en inégalités scolaires, quand l’école humilie les familles et les élèves.
      Quand on forme des ghettos scolaires et que l’école n’offre pas de bonnes perspectives.

      La gauche quinoa ne comprend pas
      « il faut s’attaquer aux méchantes banques qui ont refusé mon deuxième crédit ! »
      Mais, l’école est aussi un lieu d’exclusion et de répression pour une partie de la population.

      Dans
      « Quand les banlieues brûlent Retour sur les émeutes de novembre 2005. »

      Laurent Ott écrit un texte assez intéressant.
      J’ai le pdf si besoin.

      Une école qui brûle ce n’est pas bien. Je le précise quand même.
      Mais, ce n’est sans doute pas un acte qui sort de nulle part et qui peut s’expliquer calmement.
      Sans l’encourager, je précise encore.

      https://www.cairn.info/quand-les-banlieues-brulent--9782707152176-page-126.htm

      https://twitter.com/Banlieuedeprof/status/1674813901874114560

    • Pourquoi les émeutiers s’en prennent-ils aux services publics ?

      À chaque émeute urbaine que la France connaît depuis maintenant près de quatre décennies, les symboles de l’État et les équipements collectifs semblent concentrer la colère d’une partie de la jeunesse des quartiers concernés. Cette situation suscite d’autant plus d’interrogations que des moyens significatifs ont été consacrés à la rénovation des banlieues françaises dans le cadre de la politique de la ville, en particulier depuis le début des années 2000. Cet article apporte des éléments de réponses à ce paradoxe apparent, en montrant que le besoin de participation et de reconnaissance des habitants reste peu pris en compte par les pouvoirs publics et explique largement le ressentiment d’une frange de la population.

      https://www.cairn.info/revue-francaise-d-administration-publique-2017-3-page-631.html

    • Emeutes urbaines : « Ce qu’elles révèlent, ce n’est pas tant l’échec de la politique de la ville que celui de toutes les politiques publiques »

      Les crédits de la #politique_de_la_ville ont toujours été limités et ne compensent pas l’inégale allocation des budgets affectés au logement, à l’emploi, à la santé ou à la sécurité, qui s’opère au détriment des quartiers défavorisés, rappelle le sociologue #Renaud_Epstein, dans une tribune au « Monde ».

      Depuis le début des années 1980, les vagues émeutières embrasant les quartiers populaires s’accompagnent de controverses interprétatives enflammées dans les médias. Les explications proposées ont varié au fil du temps, mais un argument traverse les décennies qui semble faire consensus chez tous les commentateurs : l’émeute marquerait l’échec de la politique de la ville. La politique ainsi mise en cause a pourtant connu d’importantes évolutions au cours des quarante dernières années, le plus souvent à la suite d’épisodes émeutiers. Si échec de la politique de la ville il y a, ce n’est pas la même politique qui a échoué au début des années 1990, en 2005 ou aujourd’hui.

      Le jugement d’échec semble d’autant plus incontestable en 2023 que l’Etat aurait mobilisé, depuis une quinzaine d’années, des budgets considérables pour les quartiers populaires. Les annonces récurrentes d’un nouveau « plan banlieue » ont pu donner crédit à cette idée d’une politique de la ville richement dotée. Bien que ces annonces soient le plus souvent restées des annonces, elles ont ouvert la voie à la dénonciation des « milliards pour les banlieues », au profit de populations qui ne le mériteraient pas.

      Portée par des entrepreneurs de fracture sociale, cette critique a été d’autant plus ravageuse qu’elle s’est prolongée par une mise en concurrence des souffrances territoriales, opposant les quartiers défavorisés des métropoles et une « France périphérique » aux contours flous mais dont la couleur est claire. Les premiers bénéficieraient d’une discrimination positive, au détriment des villes moyennes, des espaces périurbains et des territoires ruraux, dont les populations sont pourtant durement affectées par les recompositions industrielles et la précarisation de l’emploi, les politiques d’austérité et les fermetures de services publics, ainsi que par l’augmentation du coût de la vie.

      La critique de l’inefficacité se mue alors en une mise en cause de la légitimité même de la politique de la ville, illustrée par cette formule qui fait florès à l’extrême droite : on déshabille la « France périphérique » pour habiller celle qui vit de l’autre côté du périph.

      (#paywall)

      https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/07/06/emeutes-urbaines-ce-qu-elles-relevent-ce-n-est-pas-tant-l-echec-de-la-politi

      déjà signalé sur seenthis :
      https://seenthis.net/messages/1008999

  • [au fil de la journée du 29 juin, varia]
    CARTE. Mort de Nahel à Nanterre : quelles sont les villes les plus touchées par les violences urbaines en Île-de-France ?
    https://france3-regions.francetvinfo.fr/paris-ile-de-france/carte-mort-de-nahel-a-nanterre-quelles-sont-les-villes-

    28 juin et nuit du 29 juin, par touches lacunaires, et articles plus approfondis
    https://seenthis.net/messages/1007824

    "Thread des vidéos les plus FOLLES d’hier] soir en France."
    https://twitter.com/kaayaace/status/1674213673315827714
    avec disqueuse and so on mais pas les deux scènes avec fusils que j’ai vu : tirs sur des caméras de surveillance placées en hauteur ; ni les plus efficaces moment de pyrotechnie, ni l’utilisation d’explosif pour mettre à distance la police

    une belle compilation vidéo (c’est pas riot porn)
    https://twitter.com/PerkutMedia/status/1674407279272050688

    les images, vérifiées par l’ImMonde, de plusieurs commissariats pris pour cibles (lors d’une des attaques, une personne armée d’un fusil en couverture)

    https://www.lemonde.fr/societe/video/2023/06/29/mort-de-nahel-m-a-nanterre-les-images-verifiees-de-plusieurs-commissariats-p

    Lors des émeutes de 2005, 11 500 policiers et gendarmes avaient été mobilisés... https://berthoalain.files.wordpress.com/2007/12/emeutes-de-2005-dans-les-banlieues-francaises.pdf Darmanin annonce la mobilisation ce soir de 40 000 #policiers, quatre fois plus que les 9000 d’hier, avec en prime le RAID, la BRI et le GIGN engagés en réserve (la CRS8 a mangé à Nanterre, et il reste je ne sais combien d’unités à créer en plus de celle de Marseille pour quadriller le territoire).
    il est vrai que la révolte a commencé à toucher même des villes centres (Paris, Rennes, Lille, Marseille...), contrairement à ce qui s’était passé en 2005, où une des surprises fut l’ébullition dans de petites localités jusqu’alors considérées comme tranquilles.

    mobiliser 1/6eme des effectifs alors que les émeutes vont continuer ce week end (et après ?), c’est faire peu de cas de ce qui s’est produit lors de la mobilisation contre la réforme des retraites, où ils étaient dépassés, fatigués sur la durée. LR réclame déjà l’état d’urgence. on aura sous peu une belle alliance majoritaire.

    « Ils ont tout pris » : des supermarchés pillés en marge de la nuit de violences urbaines #paywall
    https://www.leparisien.fr/seine-saint-denis-93/ils-ont-tout-pris-des-supermarches-pilles-en-marge-de-la-nuit-de-violence

    En Seine-Saint-Denis, des #supermarchés de tailles variées ont été le théâtre de #vols et de dégradations, à Aulnay et Romainville notamment dans la nuit de mercredi à ce jeudi. Des scènes similaires ont eu lieu dans les Yvelines, en Seine-et-Marne, et dans le Val-de-Marne.

    apaisement. on nous fait des déclarations publiques (Macron, Borne) qui fâchent les policiers. très exceptionnellement un sous fifre du gouvernent a(urait ?) rendu visite à la famille de Nahel. on nous montre que la justice commence son travail (rare cas d’un tireur policier placé en détention), or le proc ne fait rien de la complicité du deuxième motard de la police, rien des probables déclarations mensongères des policiers (faux en écriture publique) repris par la pref et la presse.
    la défense plaide donc à raison pour un dépaysement qui brise la complicité obligée des institutions répressives locales, manière de faire qu’une justice structurellement au service de la police le soit de façon moins stricte.

    Cazeneuve sur la loi de 2017 sur la sécurité publique modifiant les conditions de tirs policiers, prise pour satisfaire la police (après que trois policiers aient été blessés à Vitry-Chatillon (ce qui a causé la longue détention abusive que l’on sait)
    https://www.lemonde.fr/politique/article/2023/06/29/adolescent-tue-par-un-policier-a-nanterre-emmanuel-macron-sur-une-ligne-de-c

    Be water ? On annonce qu’il n’y aura ni bus ni tramway ce soir en IDF après 21 heures, Tours et d’autres villes emboitent le pas.

    Roussel, "Les violences ne servent en rien notre combat pour la vérité et la justice." (RS), viré de la marche à Nanterre.

    15h30 arrivant à la préfecture, la marche blanche de Nanterre ("révolte" a dit la mère de Nahel, avant de passer à la télé...), gazée, se transformée en attaque contre les policiers et un bâtiment de bureau, flambant neuf, puis flambant tout court https://immobilier.cushmanwakefield.fr/location-bureaux/bureaux-a-louer-nanterre-92000-163612

    La police essaie de tenir la place Nelson Mandela par force moyens

    L’huma croit encore aux bavures (#paywall)
    De Vaulx-en-Velin à Nanterre, des bavures aux émeutes, Alessio Motta, enseignant chercheur en sciences sociales, spécialiste des mobilisations collectives.
    https://www.humanite.fr/en-debat/mort-de-nahel/de-vaulx-en-velin-nanterre-des-bavures-aux-emeutes-801243

    Coté syndicats, signaux faibles.
    @RevPermanente
    https://twitter.com/RevPermanente/status/1674376341695676417

    Alors que nombre d’organisations syndicales restent silencieuses ou passives après la mort de Nahel mardi dernier à #Nanterre, la Fédération Sud Rail a appelé à manifester avec la famille ce jeudi. Une délégation de cheminots sera présente

    une demande d’une réforme de la police et pas d’appel à la mobilisation ou à la solidarité, coté CGT
    Drame à Nanterre : les pouvoirs publics doivent réagir !
    https://www.cgt.fr/comm-de-presse/drame-nanterre-les-pouvoirs-publics-doivent-reagir

    La Défense est touchée un jour de taf (et pas comme lors des GJ un samedi)
    Brav-M déployée à Nanterre
    annonce de l’envoi de la BRI, "l’anti gang", également dédiée à l’#anti-terrorisme https://fr.wikipedia.org/wiki/Brigade_de_recherche_et_d%27intervention_(France), une "unité dédiée aux interventions difficiles" (Le Parisien) comme pour faire face à des personnes armées susceptibles de tirer à balles ou cartouche. Certes, hier, des policiers ont eu du mal à pénétrer dans des immeubles d’habitation et il n’y a décidément pas assez de CRS8 qui s’ennuient (comme le disait l’un de leurs chef il y a peu) en attendant d’entrer en scène...

    Le maintien de l’ordre est perturbé par l’inévitable imprédictible : les unités spécialisés type BRI, Raid, GIGN étaient annoncées comme "mises en réserve" pour la soirée. La BRI arrive en avance car le pouvoir est en retard.

    Le #couvre-feu instauré à #Clamart de 21h à 6h du matin jusqu’au lundi 3 juillet. (BFMTV) devrait faire des émules dans les mairies.

    18h30 un hélicoptère de la gendarmerie survole Nanterre et la BRI intervient, histoire de fixer les esprits.
    L’idéal, selon une logique contre-insurrectionnelle, serait d’arriver à des interpellations débouchant rapidement sur de lourdes peines. Ça fermerait le clapet de tous ceux qui ces derniers mois se sont offusqué des arrestations de masse sans traduction judiciaire.
    faut fixer des identités dissuasives : "casseurs", "manifestant violent"

    Raid à Lille, Porte des Postes

    une bien belle pose :

    #Nahel #assassinat_policier #police #villes #quartiers #révolte #émeutes #carte #IDF #contre_insurrection

  • Meurtre policier à Nanterre : BFM et Cnews criminalisent la victime et défendent le policier
    https://www.revolutionpermanente.fr/Meurtre-policier-a-Nanterre-BFM-et-Cnews-criminalisent-la-victi

    Toute la journée, comme à chaque meurtre policier, des déclinaisons plus ou moins explicites de ces rhétoriques visant à justifier les meurtres policiers auront rempli les antennes des médias. Mais alors que la rage face à ce nouveau meurtre est massive, ces réactions insupportables pourraient être une goutte de trop supplémentaire dans l’océan de la colère contre les violences policières.

    #ACAB

    Marc Olivier Fogiel (à la tête de BFMT)

    Le 24 avril 2019, Alain Weill le nomme directeur général de la chaîne d’information en continu BFM TV (groupe Altice-SFR). Marc-Olivier Fogiel quitte en conséquence RTL (groupe M6). Il prend ses fonctions en juillet 2019.

    En mars 2021, Le Canard enchaîné révèle que Marc-Olivier Fogiel fréquente régulièrement, en compagnie d’une vingtaine de journalistes du groupe Altice (BFM TV, RMC, SFR), un restaurant clandestin parisien, en dépit des restrictions imposées par le gouvernement dans le cadre de la pandémie de Covid-19.

    Le site Off-investigation décrit dans une enquête publiée en 2023 un management autoritaire et vertical au sein de la rédaction de BFMTV, conduisant à des souffrances au travail. Très proche d’Emmanuel Macron, Marc-Olivier Fogiel est également accusé d’empiler « les entorses à la déontologie et les biais éditoriaux protégeant ses amis ou l’exécutif ». Il interdit par ailleurs l’usage de l’expression « violences policières ».

    Vincent Bolloré (à la tête de CNEWS)
    https://www.lemonde.fr/societe/article/2023/03/21/soupcons-de-corruption-au-togo-la-reconnaissance-de-culpabilite-de-vincent-b (#paywall)

  • Andreas Malm, auteur de « Comment saboter un pipeline » : « Pour donner l’impression que Les Soulèvements de la Terre est en réalité un groupement de dangereux terroristes, l’Etat français a dû inventer un gourou »
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/22/andreas-malm-auteur-de-comment-saboter-un-pipeline-mon-propos-est-d-ouvrir-u

    Le gouvernement français veut dissoudre Les Soulèvements de la Terre, qui ont joué un rôle déterminant dans plusieurs grandes mobilisations écologistes ces dernières années, et tout dernièrement contre le projet insensé et funeste de mégabassines à Sainte-Soline (Deux-Sèvres), dans l’ouest de la France. Pour donner l’impression que ce réseau militant est en réalité un groupement de dangereux terroristes, l’Etat français a dû inventer un gourou, un maître à penser qui aurait par avance théorisé leur passage à l’acte. De façon flatteuse mais grotesque, il semblerait que le pouvoir ait jeté son dévolu sur un universitaire suédois qui, contrairement à Ted Kaczynski, ne vit pas dans une cabane isolée pour fabriquer des bombes artisanales. Voilà qui manque cruellement d’imagination…
    Tactique plus ambitieuse

    Tout observateur raisonnable pourra juger combien cette démarche est maladroite et grossière. Tout d’abord, mon livre a été publié en France il y a trois ans. Il a été traduit en dix langues et a récemment inspiré un thriller hollywoodien (Sabotage, par Daniel Goldhaber). Je suis venu à plusieurs reprises discuter du livre en France autour d’événements de lancement, d’interviews, etc. Dans cette période, ni moi ni mon éditeur n’avons été soupçonnés ou accusés de quoi que ce soit d’illégal. Si le livre était si provocateur et dangereux que le décret le laisse entendre, les services de police auraient donc mis trois ans pour lire et assimiler ses quelque 200 pages (en petit format) ?

    • […]
      Par ailleurs, si je respecte et admire Les Soulèvements de la Terre – comme je respecte, par exemple, les militants allemands d’Ende Gelände –, nous ne sommes pas particulièrement liés et nous ne sommes même pas d’accord sur de nombreux points d’analyse ou de perspectives. Ces camarades seraient les premiers à dire qu’ils rejettent mon orientation trotskiste old school, mon étatisme, mon hostilité à l’anarchisme, et ainsi de suite. L’idée que mon livre serait une bible pour eux est donc, pour être très honnête, une ânerie et une marque de mépris.

      #paywall

  • « Pour donner l’impression que Les Soulèvements de la Terre est en réalité un groupement de dangereux terroristes, l’Etat français a dû inventer un gourou », Andreas Malm, activiste et théoricien
    https://www.lemonde.fr/idees/article/2023/06/22/andreas-malm-auteur-de-comment-saboter-un-pipeline-mon-propos-est-d-ouvrir-u

    Honnêtement, je ne sais pas si je dois rire ou pleurer, ou les deux en même temps.
    Il apparaît qu’au milieu d’une vague de répression instiguée par l’Etat français à l’encontre des militants écologistes (qui s’inscrit dans une escalade autoritaire beaucoup plus vaste menée par le président Macron et ses alliés), mon livre Comment saboter un pipeline (La Fabrique, 2020) a été cité dans un décret de dissolution : il serait à l’origine de tous les « désordres » attribués aux luttes environnementales dans la période récente.

    Le gouvernement français veut dissoudre Les Soulèvements de la Terre, qui ont joué un rôle déterminant dans plusieurs grandes mobilisations écologistes ces dernières années, et tout dernièrement contre le projet insensé et funeste de mégabassines à Sainte-Soline (Deux-Sèvres), dans l’ouest de la France. Pour donner l’impression que ce réseau militant est en réalité un groupement de dangereux terroristes, l’Etat français a dû inventer un gourou, un maître à penser qui aurait par avance théorisé leur passage à l’acte. De façon flatteuse mais grotesque, il semblerait que le pouvoir ait jeté son dévolu sur un universitaire suédois qui, contrairement à Ted Kaczynski, ne vit pas dans une cabane isolée pour fabriquer des bombes artisanales. Voilà qui manque cruellement d’imagination…

    Tactique plus ambitieuse

    Tout observateur raisonnable pourra juger combien cette démarche est maladroite et grossière. Tout d’abord, mon livre a été publié en France il y a trois ans. Il a été traduit en dix langues et a récemment inspiré un thriller hollywoodien (Sabotage, par Daniel Goldhaber). Je suis venu à plusieurs reprises discuter du livre en France autour d’événements de lancement, d’interviews, etc. Dans cette période, ni moi ni mon éditeur n’avons été soupçonnés ou accusés de quoi que ce soit d’illégal. Si le livre était si provocateur et dangereux que le décret le laisse entendre, les services de police auraient donc mis trois ans pour lire et assimiler ses quelque 200 pages (en petit format) ?

    Par ailleurs, si je respecte et admire Les Soulèvements de la Terre – comme je respecte, par exemple, les militants allemands d’Ende Gelände –, nous ne sommes pas particulièrement liés et nous ne sommes même pas d’accord sur de nombreux points d’analyse ou de perspectives. Ces camarades seraient les premiers à dire qu’ils rejettent mon orientation trotskiste old school, mon étatisme, mon hostilité à l’anarchisme, et ainsi de suite. L’idée que mon livre serait une bible pour eux est donc, pour être très honnête, une ânerie et une marque de mépris.
    Comment saboter un pipeline est une contribution à un débat plus large au sein du mouvement écologiste, qui a été amené à se poser des questions difficiles sur ce qu’il est urgent de faire dans une situation où les effets du changement climatique s’intensifient et s’accélèrent, mais où les Etats hégémoniques sont déterminés à agir de façon minimale ou à ne pas agir du tout. Je fais valoir que tous les mouvements ayant provoqué des changements sociaux de grande ampleur – des suffragettes et des mouvements anticoloniaux jusqu’au mouvement des droits civiques dans les années 1960 et au-delà – ont, dans certaines circonstances, eu à mettre en place des tactiques plus ambitieuses, et que cela a souvent été couronné de succès.

    « Désarmer » le capitalisme fossile

    Mon propos est simplement d’ouvrir un débat exigeant sur la légitimité d’actions de désobéissance, notamment sur des sites-clés de l’infrastructure et de la logisitique du capitalisme fossile. Et soyons clairs ici, je parle de propriété, d’objets matériels, pas de personnes – je n’ai jamais prôné la violence contre des individus ou des groupes. On peut rejeter ou critiquer les raisonnements du livre, mais il est proprement stupéfiant que ces propositions relativement modestes soient maintenant qualifiées de « terrorisme intellectuel » ou d’« actions extrêmes allant jusqu’à la confrontation avec les forces de l’ordre » par le ministre français de l’intérieur, Gérald Darmanin.

    En réalité, le livre n’est pas très original : il existe aujourd’hui de très nombreux ouvrages qui analysent les catastrophes à venir liées au changement climatique et au désastre écologique. Dans ce contexte, je suis loin d’être le seul auteur à soutenir que nous devons désactiver rapidement et de manière décisive l’infrastructure des combustibles fossiles. Mais il est vrai que Comment saboter un pipeline met en évidence quelque chose qui glace le sang des tenants de l’ordre existant : s’ils entendent laisser intact le système en place, il y a toutes les raisons d’imaginer que les mouvements de masse prendront eux-mêmes en charge le « désarmement » du capitalisme fossile – ce qui n’est rien d’autre qu’un geste d’autopréservation de grande ampleur.

    Le capitalisme fossile nous conduit à toute vitesse vers le précipice. Quelqu’un doit tirer le frein d’urgence. Si les gouvernements ne le font pas, le reste d’entre nous le fera.

    Andreas Malm est maître de conférences en géographie humaine en Suède. Il est l’auteur, aux éditions La Fabrique, de L’Anthropocène contre l’histoire (2017), Comment saboter un pipeline (2020), La Chauve-Souris et le Capital (2020), Fascisme fossile (avec le Zetkin Collective, 2020) et Avis de tempête (à paraître en octobre).